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Chronique

DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Chronique | publié le : 14.04.2015 | DENIS MONNEUSE

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DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Crédit photo DENIS MONNEUSE

LE DEUXIÈME ÂGE DES RESSOURCES HUMAINES

La fonction RH est-elle appelée à disparaître ? Si cocasse soit-elle (nul ne s’interroge sur la survie de la finance ou de la logistique), cette question revient aussi régulièrement que celle du sexe des anges.

L’avènement des Moocs et du big data, c’est-à-dire des formations en ligne ouvertes à tous et du traitement de données à grande échelle, incite certains observateurs à reposer le problème. D’un côté, les services formation n’auraient plus de sens puisque chacun pourrait picorer en ligne les modules de formation dont il aurait besoin. De l’autre, les RH tendraient à être réduites à une équipe de geeks, experts en contrôle de gestion sociale, bons à inonder les managers de chiffres pour les aider à gérer leurs collaborateurs.

Les auteurs d’une telle vision apocalyptique pour la fonction RH sont-ils sérieux ou cherchent-ils à créer du buzz (ou du ramdam, pour reprendre les préconisations des défenseurs de la langue française)? Peu importe, l’essentiel est de se placer dans le temps long afin d’éviter les effets de mode et les propos à l’emporte-pièce. Dans quelle époque vivons-nous et qu’est-ce qui nous attend demain ? Le dernier livre d’Erik Brynjolfsson et Andrew McAfee, The Second Machine Age, est sans doute l’un de ceux qui répond le mieux à ces questions existentielles(1).

Pour ces deux chercheurs du MIT, le premier âge des machines remonte au 19e siècle, quand la machine à vapeur et la mécanique se sont substituées à la force musculaire humaine et animale ou bien l’ont renforcée. Le deuxième âge des machines, celui dans lequel nous sommes entrés depuis quelques années, consiste en des technologies numériques qui se substituent à la force cérébrale humaine ou bien la renforcent.

Quelles conséquences en attendre sur le marché du travail ? Les auteurs de tâches routinières, suivant des processus clairs et prédéfinis et nécessitant des compétences moyennes, sont amenés à être remplacés par des algorithmes. En revanche, les individus hautement qualifiés, dont les tâches ne peuvent guère être automatisées, ont de beaux jours devant eux : leur productivité et leur rémunération devraient même augmenter. Autrement dit, l’avenir est sombre pour le chargé de paye et l’employé administratif, mais radieux pour le directeur des relations sociales et le directeur de la diversité, par exemple.

Ouf ! La fonction RH n’est pas une espèce en voie de disparition. Toutefois, comme le disait il y déjà près de vingt ans Anthony Rucci, professeur à l’université de l’Illinois à Chicago, la question est moins de savoir si les RH sont amenées à disparaître que si les RH doivent survivre… ce qui n’est pas tout à fait la même chose !(2)

Quelle est, alors, la principale utilité des RH pour les années à venir ? Aider les salariés à développer leur employabilité. Car, dans un environnement technologique si mouvant, les métiers sont amenés à évoluer plus fréquemment, les compétences sont sans cesse à mettre à jour et la mobilité professionnelle devient indispensable(3). Loin de la fin de la fonction RH, on entre peut-être plutôt dans son deuxième âge !

1) Erik Brynjolfsson, Andrew McAfee, The Second Machine Age, Norton, 2014.

2) Anthony Rucci, “Should HR survive ? A profession at the crossroads”, Human Resource Management, vol. 36, n° 1, 1997.

3) Lire le rapport de l’Institut de l’entreprise, “L’emploi à vie est mort, vive l’employabilité !”, septembre 2014.

Auteur

  • DENIS MONNEUSE