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Sur le terrain

EMPLOI : EN HAUTE-SAVOIE, DES EMPLOYEURS PARIENT SUR le CDI pour les saisonniers

Sur le terrain | Pratiques | publié le : 07.04.2015 | Florence Roux

Deux entreprises et un service public du Haut-Chablais viennent de créer un groupement d’employeurs mixte, public-privé, pour salarier certains saisonniers en CDI. Un premier pas vers une action plus large en Haute-Savoie.

Recruter des saisonniers en CDI n’est pas simple dans les stations des Alpes où la saison d’hiver dure quatre mois, celle d’été six mois, et où les compétences sont aussi éloignées que pisteur, par exemple, pour la première, et paysagiste pour la seconde. Dans le Haut-Chablais (74), tel est pourtant le pari de la Serma (remontées mécaniques de Morzine-Avoriaz), de Trans auto parc et de la communauté de communes du Haut-Chablais (CCHC), qui ont créé, fin 2014, le groupement d’employeurs (GE) expérimental Atout saison. Leur objectif : recruter des salariés qui, selon la saison, changeront de travail, mais pas de patron.

« Ce groupement est multisectoriel, car la multiactivité est capitale en montagne, remarque Christian Gilquin, directeur de Peripl, la plate-forme de la saisonnalité qui pilote ce projet à l’initiative de la Direccte et de la région. Et, pour renforcer son potentiel d’embauche, le GE est mixte, avec des employeurs privés comme publics. C’est inédit en Rhône-Alpes et encore très rare en France depuis la loi sur le sujet de 2011. »

Construction de compromis

Pour le spécialiste de la saisonnalité, « le pari du CDI est d’autant plus ambitieux qu’il faut concilier des conditions de travail très différentes ». La Serma, entreprise de 300 personnes qui dépend de la convention collective des remontées mécaniques, offre notamment des salaires et des avantages sociaux supérieurs à ceux d’employeurs plus petits ou publics. Depuis plusieurs mois – et avant même le premier recrutement, prévu en mai –, les membres du GE ont tout mis à plat : régime de sécurité sociale, de retraite, mutuelle, titres restaurant… et se sont attelés à construire des compromis.

Pour équilibrer les rémunérations, par exemple, le groupement recrutera les salariés au smic et leur versera une compensation salariale quand ils seront détachés à la Serma. Les heures supplémentaires, sujet sensible en hiver, seront toutes majorées au sein du GE, alors que certains secteurs ont, au contraire, des accords pour les réguler sans majoration. En matière de congés payés, Atout saison doit s’organiser pour donner à ses salariés en CDI au moins deux semaines entre mai et octobre, c’est-à-dire en pleine saison. Jusqu’à présent, les « employeurs d’été », qui recrutaient en CDD, n’avaient pas cette obligation et versaient simplement des indemnités de congés payés en fin de CDD.

Reste encore un frein à lever pour Atout saison : la loi prévoit que la mise à disposition chez un employeur public ne dépasse pas la moitié de l’activité du salarié de GE mixte. « Or la saison d’un paysagiste, l’été, est plus longue que celle du dameur, l’hiver, explique le directeur de Peripl. Il faut que le préfet nous autorise à déroger à cette règle. Nous devons prendre de l’avance sur la loi. »

L’enjeu vaut la peine, pour Stéphane Pugin-Bron, directeur de la communauté de communes (20 saisonniers sur 75 salariés) : « Le recrutement en CDI nous rend plus attractifs auprès de nos salariés qualifiés : ils peuvent se former davantage, accéder à des emprunts ou à un logement. Le GE tire les contrats vers le haut. » À la Serma, Thomas Faucheur, le directeur adjoint, acquiesce : « Atout saison peut nous permettre de mieux garder des gens qui ont une compétence rare, comme les dameurs.

« Le GE embauchera son premier salarié en CDI en mai : chef d’une équipe paysagiste l’été, pour la CCHC, conducteur de remontées mécaniques pour la Serma, l’hiver. Le groupement vise quatre ou cinq recrutements cette année, une dizaine à moyen terme. Puis 40 en Haute-Savoie d’ici à trois ans, quand l’expérience sera étendue au-delà du Chablais.

À l’automne, les partenaires sociaux concernés par la saisonnalité, sauf la CGT, se sont engagés à lancer d’autres tests de dispositifs de tiers employeurs. Pour un bilan après l’été 2016.

Auteur

  • Florence Roux