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L’enquête

LES GARDIENS DE LA PAIX INTERPELLÉS PAR LA GESTION DES ÂGES

L’enquête | publié le : 07.04.2015 | H. T.

Dans un contexte d’allongement des carrières, la direction des ressources et des compétences de la Police nationale a élaboré plusieurs mesures seniors plébiscitées par le terrain. Reste à les mettre en œuvre.

« En repoussant la limite d’âge à 67 ans, la réforme des retraites de 2010 a bouleversé les prévisions de départs à la retraite et, partant, les plans de recrutement et les prévisions budgétaires de la Police nationale, constate Laurence Affres, commissaire divisionnaire en charge de la mission veille, étude et prospective à la Direction des ressources et des compétences de la Police nationale (DRCPN). Au départ, on voyait surtout les commissaires se maintenir en activité, mais les officiers et les gardiens de la paix sont de plus en plus concernés. « 

Ce manque de visibilité a amené la direction générale, dans le cadre d’un grand cycle de concertation sociale, à mettre la gestion des âges sur la table. Le dossier a été confié à Laurence Affres, qui avait déjà réalisé plusieurs études auprès d’agents proches de la retraite et des réservistes retraités de la police. Et relevé « de fortes attentes en termes d’accompagnement des secondes parties et des fins de carrière », la commissaire précisant que 28 % des policiers ont plus de 45 ans.

Sa mission a démarré début 2014. Objectif : créer ex nihilo, en concertation avec les directions actives de la Police nationale, un plan seniors, initiative inédite dans la Fonction publique d’État. Les réunions de travail qui ont ponctué le 1er semestre 2014 ont débouché sur un plan en cinq axes, « présenté aux organisations syndicales », assure Laurence Affres. Le premier d’entre eux étant d’établir, avec l’appui des sociaux-démographes de son équipe, une pyramide des âges la plus fine et précise possible pour être en mesure d’identifier, dans chaque service, les métiers présentant un risque de perte de compétences.

PASSERELLES ENTRE DIRECTIONS

Il s’agit ensuite de favoriser les secondes parties de carrière (à partir de 45 ans), en développant l’information sur les postes vacants et non vacants. « La police est organisée en silo : il est difficile de passer d’une direction à l’autre. L’idée serait de développer des viviers d’agents s’inscrivant dans une perspective de mobilité, au moins pour les officiers et les commissaires », explique-t-elle. Une démarche qui va de pair avec le renforcement de la formation des seniors et la création de passerelles entre directions. Il s’agit aussi de favoriser les bilans de compétences, d’encourager les démarches de certification et de proposer des entretiens avec des conseillers mobilité-carrière.

Le troisième axe vise à favoriser la transmission des savoirs et des compétences, en mettant à contribution les agents seniors détenteurs de compétences rares pour des actions de sensibilisation, la rédaction de guides méthodologiques, etc. « Nous devons repenser le tutorat pour l’adapter aux seniors souhaitant remplir cette fonction. « La commissaire aimerait aussi profiter de l’occasion pour « constituer un patrimoine mémoriel de la Police nationale, en recueillant la parole des agents proches de la retraite, possédant des techniques et savoir-faire spécifiques ou ayant vécu des expériences enrichissantes au sein de la Police nationale ». Il s’agit d’un projet intitulé “Mémoires policières”, dont la base juridique (conditions d’archivage, déclaration Cnil…) est déjà posée, et qui cumulerait plusieurs avantages connexes : valorisation des agents ; accès, pour les chercheurs, à des témoignages réels ; meilleure compréhension du métier de policier par le grand public.

Une autre problématique incontournable, la préservation de la santé des seniors, figure de fait dans le quatrième volet du plan. Mais les pistes à suivre sont encore en gestation. « Notre médecine préventive s’adresse à tous, sans considérer spécialement les tranches d’âge. En outre, il est délicat d’interroger nos agents sur leur condition physique », souligne-t-elle.

DAVANTAGE DE COMMUNICATION

Le cinquième et dernier axe concerne l’accompagnement vers la retraite. « Les personnels manquent d’information sur le moment du départ, le montant de la pension, les formalités à accomplir, d’autant que les régimes de départ sont différents selon le corps », reconnaît Laurence Affres. D’où la rédaction d’un guide “Comprendre et préparer sa retraite”, qui devrait être diffusé dès juin sur l’intranet. Parmi les autres pistes évoquées : l’organisation de journées de préparation à la retraite, l’instauration de “transitions douces” via la conversion des comptes épargne-temps en temps partiel rémunéré comme un temps complet. Et la valorisation de la réserve civile volontaire, très appréciée des retraités pour qui le passage à l’inactivité peut être mal vécu.

Afin d’éviter à ce plan – concocté par une administration centrale – d’être perçu comme « technocratique », Laurence Affres est ensuite allée recueillir, sur le terrain, l’avis des agents (une centaine de personnes ont été sondées). Les retours ont été particulièrement favorables sur la plupart des mesures, soulignant l’importance de s’atteler à une gestion des âges. Reste que, si la démar che fait consensus, « la mise en œuvre de ce dispositif s’inscrit dans la durée et repose sur une stratégie RH solide ».

REPÈRES

Activités

Sécurité et paix publiques, police judiciaire, renseignement et information.

Effectif

Environ 140 000 personnes (dont 100 000 gardiens de la paix, 9 000 officiers et 1 500 commissaires).

Budget 2015

9,7 milliards d’euros.

Auteur

  • H. T.