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3 questions à… Thierry Raulin

ACTEURS | publié le : 17.03.2015 | Emmanuel Franck

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3 questions à… Thierry Raulin

Crédit photo Emmanuel Franck

DRH de JCDecaux, il se prononce contre la généralisation du CV anonyme et décrit une initiative de son entreprise en faveur de la diversité, qui favorise la réinsertion de détenus.

Le groupe de travail sur les discriminations dans l’accès à emploi, présidé par Jean-Christophe Sciberras, doit prochainement remettre ses conclusions au gouvernement, concernant notamment la généralisation du CV anonyme. Y êtes-vous favorable ?

Non, et j’y ai toujours été défavorable, même si je dois reconnaître que cette initiative de Claude Bébéar, en 2004, a contribué à sensibiliser les entreprises au thème de la diversité. Mais, en 2015, je ne connais pas de grandes entreprises qui ne soient conscientes de l’importance du sujet. Pour cette raison notamment, je pense que la généralisation du CV anonyme n’a pas d’intérêt. En outre, plus l’emploi est qualifié, plus la candidature passera par des effets de réseaux. Ainsi, 80 % du marché de l’emploi est caché, passe par les réseaux, la cooptation, la chasse. Dans ce contexte, ce type de CV ne changerait rien.

Enfin, le CV anonyme a cristallisé le débat sur les personnes d’origine étrangère ou issues de certains quartiers dits “sensibles”, alors que les formes de discrimination peuvent par nature être multiples et sans limites. Faisons confiance aux entreprises. Elles ont tout intérêt à refléter la diversité culturelle de leurs parties prenantes et de la société française. Néanmoins, toute discrimination dûment constatée doit être sévèrement punie.

Que fait JCDecaux en faveur de la diversité ?

Au-delà de nos pratiques de lutte contre toutes formes de discrimination, je tiens à évoquer une action que nous menons dans le cadre de l’association “Sortir de prison, intégrer l’entreprise” (Spile) afin de permettre à des ex-détenus de se réinsérer ; 90 000 détenus qui retrouvent la liberté chaque année retournent à la précarité qu’ils connaissaient avant d’être incarcérés.

JCDecaux contribue, modestement, mais de manière concrète, à rompre ce cercle vicieux en proposant de former les plus motivés en prison à la réparation de Vélib’, en vue d’en embaucher certains au sein de notre filiale Cyclocity, ou de leur permettre de trouver un emploi dans d’autres métiers du cycle. Nous avons ainsi installé, à l’intérieur de la maison d’arrêt de Villepinte (93), et dans le cadre d’un accord tripartite – Cyclocity, Sodexo justice et l’administration pénitentiaire –, un atelier de réparation de Vélib’. Encadrés par Sodexo et formés à nos process et méthodes, six détenus y remettent en état 40 vélos par semaine. Cela reste très modeste comparé aux 55 000 vélos réparés chaque année dans nos propres ateliers, mais indispensable pour embaucher selon notre pratique de “recrutement par simulation”. Notre objectif est bien la réinsertion et non le travail en milieu carcéral. Un premier ex-détenu a été engagé en CDI dans notre atelier de Cachan (92) en juillet 2014, et un deuxième sera prochainement recruté.

Avez-vous l’intention de développer cette initiative dans d’autres établissements pénitentiaires ?

Non, cette opération se limite à la maison d’arrêt de Villepinte, car sa mise en œuvre demande beaucoup d’énergie ainsi qu’une organisation et une planification nécessairement complexes compte tenu de l’environnement et de l’exigence bien compréhensible de l’administration pénitentiaire.

Auteur

  • Emmanuel Franck