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FORMER LES ÉQUIPES à mieux accueillir les malades chroniques

ZOOM | publié le : 17.02.2015 | Rozenn Le Saint

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FORMER LES ÉQUIPES à mieux accueillir les malades chroniques

Crédit photo Rozenn Le Saint

Les entreprises sont de plus en plus confrontées à la nécessité de gérer des salariés atteints de maladies graves qui imposent des traitements de longue durée et qui engendrent des absences. Pour les accompagner, Cap santé entreprise sensibilise managers et collègues à l’encadrement et à l’écoute de ces salariés.

Un nouvel acteur a fait son apparition sur le thème des maladies chroniques. Cap santé entreprise s’évertue à présenter aux entreprises les possibilités d’aménagements pour faciliter les conditions de travail des salariés concernés par ces pathologies. Piloté par la Ligue contre le cancer des Hauts-de-Seine, Cap santé entreprise a organisé un premier colloque sur les pathologies invalidantes en entreprise en décembre 2014. Elles ont pour point commun d’impliquer des allers-retours entre les arrêts maladies et les reprises de poste pendant une longue durée et de déboucher potentiellement sur une invalidité. Parmi elles, le cancer, mais aussi le diabète, les maladies cardiovasculaires ou psychiques, par exemple.

Le collectif allie des médecins du travail, des responsables d’associations d’aide aux malades et des professionnels des ressources humaines. Il a mis au point un dispositif permettant d’établir un diagnostic sur la perception de la maladie par les collaborateurs, qui a déjà été testé chez Veolia, au conseil général des Hauts-de-Seine, à la municipalité de Courbevoie et au Crédit mutuel Ile-de-France.

Une fois le diagnostic établi, il s’agit de mettre en place des échanges de bonnes pratiques organisés lors de rendez-vous ponctuels, une sensibilisation pour les managers et les collègues des salariés atteints d’une pathologie lourde afin de savoir comment se comporter. Cap santé entreprise organise également des permanences « touchant aussi bien le réconfort par l’écoute que les conseils en nutrition, en activité physique adaptée pour les salariés malades », indique Stanislas Regniault, directeur du comité des Hauts-de-Seine de la Ligue contre le cancer et cofondateur de Cap santé entreprise.

Peur de la mise au placard

L’objectif est avant tout de montrer aux salariés atteints d’une maladie chronique que leur entreprise est concernée par le sujet, « de manière à les inciter à la déclarer, sachant qu’elle devrait être bien acceptée par les collègues et bien gérée par leurs supérieurs », indique le responsable de la Ligue contre le cancer. Car « le fait que le salarié malade n’ose pas en parler reste le premier frein à son accompagnement », confirme Anne-Sophie Tuszynski, de Cancer at work, une autre association de sensibilisation qui travaille notamment avec Altran. Selon Séverine Lesgourgues, DRH d’Altran Ile-de-France, « il s’agit de respecter la discrétion voulue par le collaborateur tout en l’accompagnant au mieux dans l’étape de la réintégration ». « Les salariés malades n’ont pas peur de se faire licencier, mais d’être mis au placard. Leurs absences répétées sont parfois taboues alors que le manque de communication peut s’avérer pire si la personne est souvent en arrêt maladie et que personne ne comprend pourquoi », indique Cécile Bazillier, psychologue de la santé, également cofondatrice de Cap santé Entreprise.

diagnostic psychosocial

Le Crédit mutuel Ile-de-France a commencé à travailler sur la question avec la Ligue contre le cancer il y a cinq ans et a accepté de devenir une entreprise pilote pour mettre en œuvre un diagnostic psychosocial. « L’analyse des questionnaires nous a permis de nous rendre compte qu’il y avait un gros travail à accomplir auprès des managers de proximité pour les aider à identifier les souffrances et à mieux accompagner les maladies qui exigent des traitements lourds », reconnaît Damien Kunegel, directeur du Crédit mutuel de Lagny-Thorigny. L’encadrement a fait part de sa difficulté à trouver les bons mots ou à proposer les relais adéquats aux salariés, tels que Cap santé entreprise, mais aussi l’Institut Curie s’agissant du cancer, par exemple. « Les managers ne savent pas quoi dire, quoi proposer lors des entretiens de reprise. Il faut apprendre à gérer émotionnellement l’annonce d’une maladie dans une équipe, car cela peut créer un stress chez les collègues », confirme la psychologue. Damien Kunegel s’est rendu compte de la nécessité « d’amener le manager à mieux gérer le regard des collègues qui éprouvent souvent beaucoup d’empathie. Elle peut se traduire maladroitement », témoigne-t-il. Les quelque 200 directeurs d’agence et les chefs de service d’Ile-de-France devraient être formés à la question par Cap santé entreprise durant une journée en 2015.

Elle débute par un échange autour de la définition de la maladie chronique : si le cancer est une pathologie bien identifiée, les autres le sont moins. Il s’agit ensuite de décrire quelles sont les dispositions prises par la loi, en quoi consiste l’assistance thérapeutique, l’adaptation des postes de travail ou des emplois du temps. « Les salariés atteints de cancers peuvent suivre une chimiothérapie et bénéficier d’un temps partiel thérapeutique pour ménager leur fatigue. Cela donne le temps nécessaire à une reconstruction, à une poursuite du traitement, qui permettra de reprendre à temps plein par la suite », assure Fabrice Locher, médecin du travail de l’Association des centres médicaux et sociaux de santé au travail, partenaire de Cap santé entreprise.

La deuxième partie de la journée consiste en un jeu de rôle sur le thème de la réaction quand on apprend qu’un collègue est atteint d’une maladie grave. « Il s’agit de décrypter les symptômes, comme les absences répétées, l’isolement ou la fatigue, de comprendre par quelles émotions passent ces personnes atteintes d’une maladie invalidante sur le plan émotionnel, comme le déni, la culpabilité ou l’angoisse », indique Cécile Bazillier. « Nous n’avons pas tous des compétences de psychologue, mais le fait de savoir repérer chez les autres la façon dont ils réagissent permet de réévaluer notre comportement pour qu’ils se sentent mieux », assure-t-elle. Et d’éviter de montrer trop d’inquiétude ou d’agacement en cas de pression due à une charge de travail supplémentaire liée aux absences répétées.

Gérer le Retour

La troisième partie de la formation a trait au retour au travail, de manière à déterminer quelles sont les questions importantes à poser, simples et pratiques, sur les possibilités d’adaptation du poste en fonction du traitement, si la personne souhaite en parler avec ses collègues ou non. « Lors de la première réunion avec son manager au retour de la personne malade, il est important d’en programmer une ou deux autres pour montrer que l’on se soucie d’elle et que l’on est prêt à remanier l’organisation pour qu’elle se sente bien », conseille Cécile Bazillier. Durant la journée de formation, sont abordées les maladies graves qui engagent le pronostic vital et celles moins graves, mais qui sont amenées à se développer. Le jeu de rôles permet de déterminer celui qui incombe à chacun, du dirigeant d’entreprise aux syndicats, en passant par l’infirmière et le médecin du travail.

Auteur

  • Rozenn Le Saint