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L’enquête

COMMENT MESURER LES ÉCARTS DE SALAIRES À L’INTÉRIEUR DE L’ENTREPRISE

L’enquête | publié le : 17.02.2015 | SÉVERINE CHARON

MÉTHODES. Une entreprise qui souhaite se pencher sur les différences de salaires entre hommes et femmes dispose de nombreux outils, du simple graphique jusqu’aux méthodes statistiques et économétriques.

GRAPHIQUE

Une simple analyse descriptive peut déjà être riche d’enseignements en partant du rapport de situation comparée ; a minima, celui-ci doit comporter les rémunérations par catégorie professionnelle. En ajoutant à ce document un graphique donnant la proportion d’hommes et de femmes pour chaque coefficient hiérarchique de la convention collective de branche, cela permet de visualiser les différences de positionnement hiérarchique dans l’entreprise, principale source des inégalités de salaire.

ACCESSIBILITÉ : facile

LIMITE : ne permet pas de connaître les écarts de salaires à caractéristiques comparables.

HISTOGRAMME

Pour aller un peu plus loin dans la compréhension des écarts, il faut tenir compte de facteurs structurels, comme les différences d’âges, d’expériences, d’anciennetés, de diplômes… Un tableur avec les données individuelles (salaire annuel, sexe, année d’entrée dans l’entreprise, etc.) peut servir de base pour mener une analyse statistique simple mettant en relation les salaires moyens et les caractéristiques individuelles. Il pourra indiquer un éventuel désavantage salarial des femmes.

Le tableur permettra de calculer et de visualiser une droite de régression multiple exprimant le salaire en fonction d’une autre variable (l’ancienneté dans l’entreprise par exemple) et le sexe.

L’équation de la droite de régression exprimera le salaire en fonction de l’ancienneté (salaire moyen d’embauche + X euros par année d’ancienneté) et du sexe. Le coefficient attaché à la variable sexe représentera l’écart de salaire moyen entre les hommes et les femmes pour une même ancienneté.

ACCESSIBILITÉ : simple avec des connaissances statistiques de base. Cette technique peut être réalisée avec un tableur standard.

LIMITE : les calculs ne sont valables que pour des volumétries de données suffisantes dans chaque groupe (plusieurs dizaines au moins pour chacun).

MÉTHODE ANOVA

Variante de la régression linéaire multiple, la méthode de l’analyse de la variance (Anova) peut contourner l’écueil des effectifs de sous-groupes faibles. Là encore il s’agit d’expliquer une variable quantitative (le salaire) à l’aide de facteurs explicatifs. Comme précédemment, la méthode permet d’introduire des facteurs explicatifs : la catégorie d’emploi, la classification, le niveau d’études… et, bien sûr, le sexe.

L’Anova va à la fois valider une relation a priori entre le salaire et les variables supposément explicatives et, à chaque fois, calculer la contribution d’une variable explicative à la reconstitution de la variable expliquée, le salaire.

Chaque variable explicative va être testée et sera acceptée (affectée d’un coefficient, elle permet d’expliquer une part du salaire) ou non (elle est alors rejetée de la base de données). Comme les autres variables explicatives, la caractéristique homme ou femme va être testée et pourra donc éventuellement permettre d’expliquer un différentiel de salaire.

ACCESSIBILITÉ : méthode un peu plus complexe, qui demande des bases en économétrie. C’est un bon sujet de stage pour un étudiant en économie appliquée, pourvu qu’il dispose d’un logiciel comme XL Stat, R (gratuit) ou Stata.

MÉTHODE OAXACA-BLINDER

Très largement utilisée par les économistes du travail, la méthode dite de décomposition Oaxaca-Blinder (1973) permet d’estimer les constituants des différences observées entre deux groupes distincts. Elle a été utilisée largement pour l’étude des différences de salaire entre les hommes et les femmes dans l’entreprise ou l’économie tout entière. Cette technique repose sur l’hypothèse que l’écart salarial entre deux groupes d’individus s’explique par des caractéristiques personnelles (âge, niveau d’étude…) et que le résidu inexpliqué par ces facteurs est potentiellement dû à de la discrimination entre hommes et femmes.

En pratique, on commence par modéliser le salaire chez les hommes et le salaire chez les femmes avec une régression multiple. Ensuite, on décompose l’écart de salaire moyen entre les deux groupes en une partie imputable aux différences structurelles (âges, niveaux d’études…) et une partie correspondant à des écarts de rendement des caractéristiques (par exemple, une année supplémentaire d’ancienneté peut rapporter davantage aux hommes qu’aux femmes s’ils bénéficient d’un avancement plus rapide).

ACCESSIBILITÉ : assez complexe. Cette méthode prolonge la précédente. Elle est réalisable par un stagiaire en master d’économie appliquée ou d’économétrie. Elle demande un peu de prudence dans les interprétations, et un choix raisonné des facteurs à prendre en compte. En effet, certaines différences structurelles (par exemple les écarts dans les qualifications) expliquent les différences de salaires et diminuent la part inexpliquée mais elles peuvent provenir de pratiques discriminatoires si les femmes accèdent moins facilement que les hommes aux échelons supérieurs, à compétences égales.

Auteur

  • SÉVERINE CHARON