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MERYEM LE SAGET CONSEIL EN ENTREPRISE

La chronique | publié le : 03.02.2015 |

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MERYEM LE SAGET CONSEIL EN ENTREPRISE

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La souffrance du travail mal fait

La plupart des salariés sont attachés à leur travail, ils aiment ce qu’ils font et apprécient d’accomplir leurs tâches tel qu’un praticien de leur métier le ferait : correctement. La “logique de l’honneur”, révélée il y a plus de vingt ans par les travaux du sociologue Philippe d’Iribarne, est très présente dans les entreprises françaises, les personnes sont animées d’une forte conscience professionnelle et ont la fierté du “travail bien fait”.

L’ennui est qu’elles peuvent rarement faire du bon travail. Les conditions appropriées sont de moins en moins réunies : tout doit aller vite, on a moins de personnel et pas davantage de budget. Souvent, également, on n’a pas les informations nécessaires pour bien décider, ou bien, symptôme dramatique du nouveau taylorisme, chacun est spécialisé sur sa partie sans savoir ce que font les autres, seuls quelques privilégiés ont la vue d’ensemble.

Mesure-t-on la souffrance de ceux qui voudraient simplement bien faire leur travail et qui s’en sentent empêchés ? On leur répond : « Soyons agile, il faut apprendre à conduire la voiture tout en réparant la roue. » Belle pirouette de vocabulaire, mais qui ignore la montée du désarroi face à la perte de qualité et le stress de la performance.

À ce jeu, vous obtenez finalement deux types de réponses : il y a ceux qui essaient de préserver leur sens du métier, qui veulent produire de la qualité et traiter les clients correctement. Malgré le manque de moyens, ils compensent les insuffisances du système en travaillant deux fois plus. Immanquablement, ils deviennent d’excellents candidats au burn out. Et il y a ceux qui voient qu’ils n’y arriveront pas. « Malgré nos alertes répétées, la direction ne veut rien entendre. Le travail n’est ni fait ni à faire, alors je ne vais pas y laisser ma peau. » Ils prennent du recul, ils se désengagent.

Imaginez un cuisinier de talent à qui vous demandez de faire un plat élaboré pour vos invités. Mais 30 minutes avant la fin du temps de cuisson prévu, vous débarquez dans les cuisines en disant « on sert maintenant ! ». S’il n’arrive pas à vous raisonner, il y a fort à parier qu’il vous rende son tablier. Logique de l’honneur : quand on est cuisinier, on ne fait pas n’importe quoi. Dans les entreprises, combien de situations similaires se répètent chaque jour sous le stress de l’action ! Mais les personnes n’ont pas le loisir de rendre leur tablier…

Ailleurs, on clame facilement que les salariés heureux font les clients heureux. Il doit bien y avoir d’autres façons d’agir ? En fait, les solutions durables sont construites sur quatre principes de “qualité partagée” : une vision commune de ce que l’on cherche à atteindre ; un dialogue continu entre managers et collaborateurs pour prendre les difficultés à bras-le-corps, s’écouter mutuellement, confronter des logiques de raisonnement différentes, trouver des accords ; une autonomie d’action pour que chacun puisse agir intelligemment et prendre de bonnes décisions ; un cadrage clair des projets, car la liberté s’exprime d’autant mieux que chacun sait quel est le cadre, où sont les marges de manœuvre et les responsabilités réciproques. Réintroduire de la qualité et du plaisir au travail, c’est possible.