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DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Chronique | publié le : 03.02.2015 | DENIS MONNEUSE

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DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Crédit photo DENIS MONNEUSE

LE MANAGEMENT des robots

Parmi les grandes questions que je me pose sans y trouver une réponse, il y a la suivante : comment les DRH peuvent-ils (encore) dépenser tant d’énergie et d’argent à faire de la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences) ? Que les cabinets de conseil en RH fassent leur sel de ce genre de longues missions, extrêmement lucratives, visant notamment à bâtir des référentiels métiers (déjà partiellement obsolètes le jour de leur publication et dont l’intérêt reste à démontrer) est fort compréhensible. Mais pourquoi les DRH prennent-ils goût à se lancer dans de telles usines à gaz ? Est-ce pour se faire croire qu’ils anticipent l’avenir ?

Si telle était leur ambition, ils devraient plutôt porter leur attention sur autre chose, par exemple sur le management des robots. L’avenir est en effet à une cohabitation croissante dans les entreprises entre les êtres humains et les robots. Or, se désole Jodi Forlizzi, professeur à l’université Carnegie Mellon, on en sait encore très peu sur la façon dont les robots et les salariés vont être amenés à interagir sur le lieu de travail(1). Pourquoi ? Parce ce qu’on se focalise trop sur la capacité des robots à faire disparaître certains postes et pas assez sur la façon de travailler avec eux.

Si les robots éveillent encore peu l’intérêt des DRH, c’est parce que ces derniers imaginent généralement que seules des questions techniques sont en jeu. Ils laissent alors les experts en technologie et les responsables de production s’emparer seuls du sujet. Il s’agit toutefois d’une erreur, comme le révèle une étude sur les effets de la mise en place d’un “snackrobot”, c’est-à-dire d’un robot qui fait office de serveur dans une cafétéria(2). L’expérience montre en effet que les robots influencent les comportements de leurs collègues humains présents autour d’eux.

Avec le temps, le robot est de plus en plus intégré au collectif : les interactions sociales avec lui se multiplient. On observe même des comportements de protection, comme si le robot était non seulement un collègue mais aussi un ami. Le personnel se compare d’ailleurs avec le robot et celui-ci suscite parfois envie et jalousie. Un homme va même jusqu’à se demander si le robot n’essaye pas de… flirter avec une de ses collègues !

La présence de robots dans l’espace de travail est donc loin d’être neutre. Ils ne sont pas considérés comme de simples machines mais comme de quasi-êtres humains. Les DRH devraient s’emparer de cette problématique pour avoir leur mot à dire en tant que parties prenantes, à côté des designers et des ingénieurs notamment. À quand un cours sur le management des robots dans les masters RH ? Et à quand une réunion de l’ANDRH autour du témoignage d’un robot ?

Avec le temps, le robot est de plus en plus intégré au collectif : les interactions sociales avec lui se multiplient.

1) J. Forlizzi, How robots will work with us isn’t only a technological question, in Harvard Business Review, 20 mars 2014.

2) M. Kyung Lee, S. Kiesler, J. Forlizzi, P. Rybski, Ripple effects of an embedded social agent : a field study of a social robot in the workplace, Proceedings of the Sigchi Conference on Human Factors in Computing systems, 2012.

Auteur

  • DENIS MONNEUSE