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relations interpersonnelles. COMMENT MENER une équipe intergénérationnelle

Les clés | publié le : 20.01.2015 | Domitille Arrivet

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relations interpersonnelles. COMMENT MENER une équipe intergénérationnelle

Crédit photo Domitille Arrivet

Les jeunes d’aujourd’hui ne sont plus comme ceux d’avant. Quant aux plus vieux, ils sont dépassés. Ces clichés font de la résistance, y compris dans des entreprises qui veillent à ce que la cohabitation entre les générations soit bénéfique à chacun. Une telle déclinaison du management de la diversité implique un savoir-faire.

« La querelle des anciens et des modernes est une constante des sujets de management. Aujourd’hui, elle provient du fait que les entreprises, pensées par les générations précédentes, ne sont plus comprises par des jeunes qui préféreraient notamment avoir une organisation en râteau, une hiérarchie plate », constate David Kirchhoffer, à la tête d’une division de 600 collaborateurs à CGI, spécialiste de l’ingénierie de l’information. Ce manager de 42 ans, qui recrute une centaine de nouveaux collaborateurs chaque année, veut faire aux nouveaux entrants une place qui leur permettra d’être à la fois satisfaits et performants.

Et, selon lui, les dispositifs déjà mis en place tels que le parrainage à l’entrée dans l’entreprise ou le mentorat ne sont pas suffisants. « Si on se coupe des idées des jeunes dans l’entreprise, cela ne peut pas marcher. La solution, c’est l’écoute et l’explication », estime-t-il. Pour faire émerger au mieux toute la matière grise et l’innovation dont les plus jeunes sont porteurs tout en créant du lien entre les collaborateurs de tous âges, David Kirchhoffer a expérimenté les rencontres “afterwork”. À échéance régulière, tous les membres de son équipe sont invités à se retrouver le soir dans un bar de façon informelle. « Ces rencontres dans une atmosphère “bureau des élèves” ont créé une facilité de parole entre tous, c’est un espace d’échange libre qui s’affranchit des galons. Même les plus anciens viennent », se félicite-t-il.

respect, partage et intelligence collective

Soucieux lui aussi de faire aux jeunes générations une juste place aux côtés de leurs aînés, le géant informatique IBM a déployé en France et dans le monde un programme d’intégration de deux années, au cours desquelles, outre le mentoring avec un collaborateur senior et sans lien hiérarchique, a été mise en place pour chacun une journée de travail avec un des dirigeants afin de découvrir d’autres enjeux de l’entreprise… et de se faire connaître. « Le management intergénérationnel repose aujourd’hui moins sur des formes d’autorité et davantage sur des notions de respect, de partage et d’intelligence collective. Avec, fait nouveau, de plus en plus de jeunes qui sont amenés à diriger des collaborateurs plus âgés qu’eux », souligne Anne Bocquet, à la fois manager d’équipes missionnées chez les clients et responsable de l’intégration des jeunes à IBM Global Business Services. Selon elle, cette nouvelle forme de management porte ses fruits : « Lorsqu’on fonctionne en réseau, on sait échanger les informations, aller chercher les personnes compétentes en fonction des sujets, on est habitué à demander de l’aide au copain du copain, comme sur les réseaux sociaux. C’est ainsi que les jeunes ont grandi, dans l’échange. Et ça marche bien. »

Des relations collaboratives et de proximité qui apparaissent comme essentielles dans l’étude que vient de publier l’Edhec Business School à propos des aspirations de 1 500 ingénieurs et managers à leur entrée en entreprise. « Les jeunes diplômés réclament massivement un management transparent et honnête. Plus que des entretiens annuels par exemple, ils demandent des points fréquents avec leur supérieur hiérarchique. De même, désireux de continuer à apprendre tout en exerçant leur activité professionnelle, ils attendent que leur hiérarchie se soucie de développer leurs compétences. Enfin, l’étude indique que les jeunes réclament fortement des relations interpersonnelles. Ils ne veulent pas être managés par du digital ! », détaille Manuelle Malot, responsable du NewGen Talent Centre de l’Edhec.

Transmission du savoir

Tirer le meilleur de la cohabitation entre les différentes cohortes se caractérise aussi, dans l’industrie notamment, par un souci de transmission du savoir. C’est le cas à DCNS, constructeur naval de la Défense, qui a toujours misé sur le compagnonnage pour faire passer aux plus jeunes tout le savoir-faire des générations précédentes. Chaudronnier-formeur depuis trente ans dans l’usine de Cherbourg, Jean-Pierre Sasin s’est ainsi fait une spécialité d’initier des intérimaires ou des alternants aux secrets de son savoir-faire. « Façonner des tôles pour sous-marins de 12 000 tonnes, cela ne peut pas s’apprendre à l’école. Même s’il est dur physiquement, j’aime mon métier et j’aime le transmettre. C’est indispensable si on veut continuer de construire des sous-marins à Cherbourg pendant quelques décennies », confie cet ouvrier de 47 ans, impressionné lorsque ses jeunes élèves l’appellent monsieur. En effet, pour DCNS, la gestion des emplois et des compétences est éminemment stratégique : « Il faut huit ans pour construire un sous-marin qui vivra ensuite cinquante ans. Pour maintenir ces navires, il est indispensable que les savoir-faire soient transmis », explique Didier Baichère, le DRH du groupe, qui a dans cette optique constitué un réseau de 4 000 tuteurs et une université interne qui dispensent aux apprentis 39 jours de formation durant leur première année. « Pour nous, le management intergénérationnel ne se décrète pas, il fonctionne parce que la transmission des compétences se trouve au cœur du dispositif », relève-t-il. Question de survie.

MARC RAYNAUD

Fondateur de l’Observatoire du management intergénérationnel (Omig)

LES CONSEILS DU COACH

– 1 –

Définir les enjeux de gestion des emplois et des compétences

La première étape du management intergénérationnel est de définir précisément les enjeux de la gestion des emplois et des compétences, que ce soit pour toute une entreprise ou à l’échelle d’un métier, d’un site… Sans cela, rien de sérieux ne peut être fait et toute tentative de créer des événements sympathiques qui voudraient rassembler est vaine.

– 2 –

Aider les collaborateurs à repérer les a priori sur les âges

Sans nier qu’il existe des différences entre les générations, il faut éviter le piège des jugements a priori. Pour cela, il faut accompagner les collaborateurs en les incitant à exprimer ce qu’ils perçoivent des différentes générations, ne pas leur imposer des idées toutes faites. C’est en identifiant elles-mêmes les particularités des différentes générations que les équipes apprendront comment en tirer parti. Ce qui paraîtra au début très opposé s’avérera l’être assez peu.

– 3 –

Instituer des systèmes de partage

Managers, sachez aussi retenir les jeunes qui ont envie de bouger, apprenez-leur à transmettre à leurs successeurs avant de prétendre évoluer. Laissez agir le regard des générations entrantes et permettez-leur de partager leur propre perception de l’organisation. Lorsque diverses générations cohabitent dans les équipes, constituez des binômes entre jeunes et seniors ; entre équipes différentes, établissez des systèmes de parrainage et de contrôle mutuels. Ce mode de fonctionnement collaboratif, où les échanges se font à l’abri du regard du patron, est bien dans notre époque !

Auteur

  • Domitille Arrivet