Le travail à distance quatre jours sur cinq, mis en place depuis cinq ans chez l’assureur en Rhône-Alpes Auvergne, se développe régulièrement. L’accord vient d’être renouvelé.
Croupama Rhône-Alpes Auvergne (2 000 salariés) a signé, début décembre, avec quatre des cinq syndicats, son deuxième accord triennal sur le télétravail alterné, jusqu’à quatre jours à domicile et une journée sur site. Lancé avec 8 personnes en 2010, ce système en concerne 68 en 2014. Cette caisse de Croupama couvrant un territoire assez rural, les trajets domicile-travail des salariés sont souvent longs. En 2009, une demande récurrente de certains d’entre eux a fini par trouver écho auprès de la direction. Un test de deux ans ayant été positif, le premier accord – qui reste la base du second – a été signé en décembre 2011.
Il reprend les obligations légales – volontariat et réversibilité – et introduit un processus de sélection. À l’aide d’une grille d’entretien, le manager évalue si le salarié dispose, à son domicile, des conditions matérielles nécessaires, s’il maîtrise la visioconférence et autre chat, et aussi sa motivation et sa capacité d’autonomie. « Une certaine ancienneté donne une maîtrise suffisante des missions et des ressources relationnelles », cite Blaise Barbance, chargé du développement RH. Sa demande acceptée, la personne est formée pendant une journée aux principes du dispositif et aux outils informatiques installés chez elle, et son manager, au management à distance. Selon le DRH, très peu de candidatures sont refusées. Tous les métiers sont concernés, sauf les commerciaux, les techniciens s’occupant du matériel et les managers.
Seuls deux syndicats (FO et Unsa 2A) sur huit n’ont pas signé l’accord de 2011, mais la direction a quand même procédé à une évaluation avant son renouvellement, pour « objectiver le débat ». Des outils de suivi du nombre d’appels clients, de leur durée, etc., révèlent que la productivité des télétravailleurs est supérieure de 5 % à celle qu’ils avaient auparavant. « L’absentéisme semble moindre, ajoute Blaise Barbance, mais nous ne pouvons pas encore l’évaluer précisément. » La souplesse d’organisation est très appréciée : « Si la moitié de mes plages horaires me sont imposées, et changent chaque semaine, je peux organiser l’autre moitié à mon gré, témoigne Céline Am-blard, gestionnaire sinistres à Chambéry (Savoie), en télétravail depuis quatre ans. Certains jours, mes enfants peuvent manger avec moi. » Travaillant au calme, elle est moins fatiguée.
Au niveau des équipes, la mise en place nécessite une préparation : « Il faut être prudent à l’égard des managers, car c’est un facteur de complexité », reconnaît le DRH. Le manager de Céline Amblard impose un même jour de retour sur site, pour les réunions éventuelles. Cependant, « cela favorise la responsabilisation des salariés, grâce à un management par objectifs plus que par consignes », rapporte le DRH. Le travail étant en outre « plus normé et plus piloté », les délais sont mieux respectés.
Au niveau global, l’entreprise commence à mettre en regard les coûts du télétravail (environ 1 000 euros de matériel par télétravailleur, auxquels s’ajoute le temps passé pour la mise en place) et les gains sur l’immobilier : à Bourg-en-Bresse (Ain), 11 personnes sur 15 télétravaillant, les bureaux ont été vendus et une simple salle de réunion louée. « Enfin, assure Blaise Barbance, ce projet a développé la culture du travail collaboratif et une conception plus souple de l’organisation. C’est une évolution culturelle. »
Reste que le risque d’isolement des télétravailleurs, crainte des syndicats non signataires, existe : « Les contacts manquent un peu, admet Céline Amblard. Le jour sur site est important pour retrouver sa place dans l’équipe, et même pour se sentir appartenir à l’entreprise. » Autre difficulté : « On a tendance à faire plus d’heures. » Le nouvel accord met donc en place un « pointage » sur écran et donne la même possibilité qu’aux autres salariés d’un « crédit report » (rattrapage des heures supplémentaires). Par ailleurs, l’indemnité forfaitaire pour coûts supplémentaires (chauffage, espace, etc.) est portée de 20 à 25 euros.
Une expérience dont s’est inspirée, dès 2011, la caisse Croupama Loire Bretagne, puis la filiale Mu-tuaide de Bry-sur-Marne, qui y trouve une alternative au déménagement dans des locaux plus grands.