Apparu avec la grande industrie, le management est une construction intellectuelle relativement récente, née de l’exigence des ingénieurs formés à la culture scientifique et technique d’inspiration mécaniste pour obtenir la conformité des produits et des services. En clair, le salarié efficace, quasi robotisé, est celui qui n’est pas perturbé par ses désirs ni ses affects et qui a laissé sa vie privée à la maison.

Après la contestation des cadences du travail à la chaîne dans les années 1970 et le passage à des formes de management par la qualité prétendant s’appuyer sur la motivation intrinsèque du travailleur, l’essoufflement de cette servitude volontaire remet en cause les théories du management fordiste, toyotiste, par la qualité, les objectifs, etc. Dans le même temps, la montée des risques psychosociaux en entreprise et la part toujours plus essentielle de la compétence et du savoir-être dans une économie de la connaissance obligent à réactualiser l’antienne serinée depuis Bodin mais restée lettre morte qu’il n’est de richesse que d’hommes. Pour l’auteur, expert en RSE, les temps changent, le capitalisme financier a porté au-delà du soutenable la logique d’exploitation du capital humain ; il faut changer de paradigme et considérer enfin les hommes non comme une ressource à exploiter mais comme un patrimoine à faire fructifier. Il est temps d’oser le bien-être au travail, de conjuguer le leadership et l’humanité, de promouvoir une gouvernance qui favorise l’innovation au service de l’utilité, non seulement économique mais aussi sociale.