Le recrutement ne se réduit pas à un enjeu marchand
Le recrutement n’est pas seulement une transaction économique ponctuelle de mise en relation de l’offre et de la demande d’emploi : il doit être envisagé comme un processus de sélection inscrit sur le long cours. Outre les acteurs économiques, il met en jeu les acteurs de la formation, les valeurs d’une société et la manière dont se construit le jugement sur une personne, en l’occurrence le candidat à l’emploi. Notamment, les intermédiaires publics de l’emploi sont pris en tenaille entre une logique de calibrage selon des compétences supposées stables, préétablies et mesurables, et une logique de négociation pour faire admettre aux employeurs l’idée que les compétences sont évolutives. La deuxième option, destinée à éviter la discrimination par le diplôme et l’expérience professionnelle antérieure, suppose de tester par simulation la capacité d’un candidat à occuper un poste. Cependant, à défaut d’être profilées par les compétences, les personnes ne le sont-elles pas, elles-mêmes, selon une logique normalisatrice de promotion de la diversité ?
Ce numéro, dont le dossier a été coordonné par deux enseignantes, respectivement à l’université Paris Ouest et à l’université de Strasbourg, montre que le recrutement est un enjeu charnière, de nature économique mais aussi sociale et politique, tant la coïncidence de ces deux entités hétérogènes que sont le poste, d’une part, et le candidat, de l’autre, implique l’interférence de jugements de valeurs.