L’entreprise n’appartient pas aux actionnaires
Tout le monde tient les actionnaires pour les propriétaires des grandes entreprises. Or, d’un point de vue juridique, une société n’a pas de propriétaires. Les actionnaires sont certes propriétaires, mais pas de la société, simplement de titres de capital émis par ladite société. Leur responsabilité est limitée à la valeur de leur apport. Pourquoi leurs droits prévaudraient-ils sur ceux de la collectivité des parties prenantes que sont aussi les collectifs de travail de l’entreprise ?
Avec cette distinction, l’objectif de l’auteur, professeur de sciences économiques à l’université Paris-Ouest Nanterre, est de remettre en cause ce supposé droit de propriétaire des actionnaires qui prévaut aujourd’hui et qui est cause, selon lui, de la crise actuelle de l’entreprise, c’est-à-dire de la dérive vers la financiarisation et du mal-être croissant des salariés. Pour sortir de ce qu’il appelle « la grande déformation », il faut prendre conscience de la dimension politique du sujet afin de refonder les pouvoirs de l’entreprise. Nul n’étant son propriétaire, c’est sur des règles de responsabilité non dérivées du droit de propriété qu’il faut repenser l’entreprise pour dégager de nouvelles sources de légitimité et de nouveaux facteurs d’efficacité collective. Il s’agit donc, pour l’auteur, de restaurer l’autorité des dirigeants (vs les actionnaires), de reconstruire les droits, mais aussi les devoirs des actionnaires durables et de responsabiliser les entreprises par rapport aux États, aux salariés et aux porteurs d’intérêts universels. Une réflexion à contre-courant, vraiment originale.