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L’enquête

CHU DINANT MONT-GODINNE : LES SYNDICATS RESTENT VIGILANTS

L’enquête | publié le : 21.10.2014 | C. C.-C.

En Belgique, le CHU Mont-Godinne est l’un des plus avancés dans la démarche lean en Europe. Les syndicats qui ont accompagné le processus réclament le respect de la « philosophie lean ».

« La présentation du lean en 2009 était du marketing d’adhésion. La finalité était d’uniformiser les pratiques sans diminuer la qualité, en plaçant le patient au centre de la démarche, et en associant systématiquement la base, explique Vinciane Crucifix, infirmière et déléguée du Centre national des employés (CNE), premier syndicat du CHU Mont-Godinne (Yvoir, Belgique). Notre syndicat s’est dit: voyons voir! Je me suis même portée volontaire aux ateliers. Mais, au fur et à mesure, l’optimisme est retombé. »

Cet important centre hospitalier situé en région wallonne, entre Namur et Dinant en Belgique, est l’un des établissements européens les plus avancés dans la démarche lean. Elle s’est déployée aux urgences, dans toutes les unités de soins, les blocs opératoires, mais aussi les archives, la comptabilité, les ressources humaines… « Nous avons réaménagé les espaces de travail, revu la gestion des stocks, diminué les temps d’attente, créé dans les unités de soins des fonctions “électron libre” qui se chargent de toutes les tâches qui interrompaient sans cesse le travail des soignants », énumère Ariane Bouzette, directrice de l’amélioration continue au CHU.

Le CHU entre aujourd’hui dans une nouvelle phase, avec un ambitieux programme de formation des cadres de l’hôpital aux techniques de management du lean : « Si le n – 1 a des objectifs à atteindre, son n + 1 doit être en capacité de l’aider à y parvenir, dans une position qui se rapproche du coaching », raconte Didier Cloquet, le DRH du CHU. Ce programme très ambitieux va être conduit pendant deux ans et demi: « Nous nous attendons à une véritable révolution lean », assure-t-il.

« Tout n’est pas mauvais, admet Vinciane Crucifix. La gestion des stocks, inspirée de l’industrie, permet un réassort automatique, qui décharge les soignants de cette tâche. On a rendu les tableaux de communication plus lisibles, en hiérarchisant les informations. » Mais les syndicats assistent aussi à une uniformisation des tâches, en particulier de la logistique, pas toujours avec l’aval du personnel. Par exemple, les brancardiers sont désormais équipés d’un téléphone portable avec GPS, qui leur indique le plus court chemin d’un endroit à l’autre. « Mais il permet surtout de les géolocaliser pour faire appel au brancardier le plus proche. S’il va aux toilettes, il doit indiquer qu’il est indisponible. C’est de l’espionnage! », s’indigne la déléguée du CNE.

CADRES DÉSTABILISÉS

Ariane Bouzette reconnaît elle aussi des limites à la démarche lean : « On a commis des erreurs au départ. On a constaté que les améliorations ne duraient pas, que les cadres étaient déstabilisés par l’importance que l’on donnait aux acteurs de terrain. Il y avait une résistance au changement. Nous avions faux en voulant appliquer strictement le processus lean. La priorité doit être le développement des personnes. » Message parfaitement reçu par la CNE : si les réorganisations conduisent à « modifier les horaires de travail ou à déplacer les gens comme des pions », Vinciane Crucifix suggère à la direction, « de revoir sa philosophie lean ». Mais direction et syndicats ne sont pas si éloignés dans leur diagnostic de la démarche lean : « Elle est pérennisée. On n’y reviendra pas, admet Vinciane Crucifix. Elle est entrée dans les têtes, les habitudes. Mais elle doit être sans cesse critiquée. On n’est pas Toyota, tout ne peut pas être uniformisé. »

REPÈRES

Activité

Établissement pluridisciplinaire de 630 lits.

Effectif

2 000 salariés.

Chiffre d’affaires

233 millions d’euros en 2013, exercice à l’équilibre.

Auteur

  • C. C.-C.