La seule évaluation officielle du CV anonyme a été menée par le Centre de recherche en économie et statistique (Crest) et par le cabinet Amnyos sous l’égide de Pôle emploi. Elle a été réalisée en 2009 et 2010 auprès de 1000 recruteurs volontaires. Il s’agissait de comparer les résultats d’un groupe “CV anonyme” à ceux d’un groupe “CV nominatif”. L’étude faisait trois constats principaux. Primo, le recours au CV anonyme n’a pas d’effets sur les coûts de recrutement des entreprises : même temps consacré par les recruteurs à leurs tâches, mêmes délais de recrutement, même qualité du recrutement. L’investissement de Pôle emploi n’était toutefois pas pris en compte. Secundo, « le recours au CV anonyme agit contre la tendance des recruteurs à privilégier des candidats du même genre qu’eux-mêmes », relevait Pôle emploi.

Mais, tertio, l’étude concluait à un « effet défavorable du CV anonyme sur les chances d’accès à l’entretien des candidats immigrés et/ou résidant » en zones urbaines sensibles. Pour ces candidats, la probabilité d’accéder à l’entretien passait de 9,6 % avec un CV nominatif à 4,6 % avec un CV anonyme. Cette conclusion a fait couler beaucoup d’encre. Comment un outil censé lutter contre les discriminations liées à l’origine pouvait-il défavoriser les candidats immigrés ? À l’instar d’Inès Dauvergne, d’IMS-Entreprendre pour la cité, tous les observateurs s’accordent pour dire que les entreprises du panel de Pôle emploi « avaient tendance à favoriser les personnes issues de l’immigration ». Elles auraient fait preuve de davantage d’indulgence vis-à-vis de CV peu attractifs dès lors qu’elles connaissaient l’origine du candidat. Autrement dit, elles faisaient de la discrimination positive. Avec le CV anonyme, cette discrimination n’était plus possible. Conclusion de Pôle Emploi : le CV anonyme est « une entrave pour certaines entreprises à la recherche de diversité ».