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L’enquête

JEAN-FRANÇOIS AMADIEU PROFESSEUR À PARIS 1, DIRECTEUR DE L’OBSERVATOIRE DES DISCRIMINATIONS

L’enquête | DÉBAT | publié le : 14.10.2014 | PAR E. F.

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JEAN-FRANÇOIS AMADIEU PROFESSEUR À PARIS 1, DIRECTEUR DE L’OBSERVATOIRE DES DISCRIMINATIONS

Crédit photo PAR E. F.

« Il faut voter une loi avec un seuil de salariés plus élevé »

Faut-il publier le décret généralisant le CV anonyme ?

Généraliser le CV anonyme dans toutes les entreprises employant plus de 50 salariés n’aurait pas beaucoup de sens. Le gouvernement a conscience que la loi n’est pas applicable en l’état.

La grande erreur du législateur, en 2006, est d’avoir fixé un seuil si bas. Il aurait fallu commencer par les grandes entreprises. À l’époque, certaines étaient d’accord et équipées pour utiliser le CV anonyme. La solution serait de voter une loi avec un seuil plus élevé, par exemple 5000 salariés. Mais le patronat refuserait. En outre, les syndicats, les associations, les consultants RH n’y sont pas favorables.

À l’époque des réseaux sociaux, les candidats à l’embauche sont-ils demandeurs ?

Mais ces réseaux existent depuis toujours : ce sont la famille, les amis, les anciens d’écoles. Hier comme aujourd’hui, la question est de savoir comment obtenir davantage d’équité et de qualité dans le recrutement. Quant au phénomène des réseaux sociaux sur Internet, je me demande quelle part des embauches se fait effectivement par cette voie. Nous n’avons aucune visibilité. Je soutiens au contraire que les candidats sont demandeurs de méthodes de recrutement impersonnelles.

Le CV anonyme est-il efficace contre les discriminations ?

Plusieurs recherches en Suède, en Allemagne et aux Pays-Bas le confirment. En France, l’étude du Crest de 2011 démontre un effet positif du CV anonyme sur les chances d’embauche des femmes et des candidats âgés, car il réduit l’incidence de l’homophilie – un recruteur homme avantage un candidat homme. En revanche, la même étude conclut à un effet négatif pour les candidats issus de l’immigration.

Cela démontre soit un biais de l’échantillon – les entreprises testées ont joué les bons élèves –, soit qu’elles pratiquaient la discrimination positive en donnant un avantage à un CV moins attractif dès lors qu’elles connaissaient l’origine du candidat. Ce qui n’est pas normal non plus. Et pourtant, le gouvernement s’est, à l’époque, basé sur cette étude pour enterrer le CV anonyme.

Auteur

  • PAR E. F.