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LES VERTUS RH du mécénat de compétences

ZOOM | publié le : 07.10.2014 | Rozenn Le Saint

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LES VERTUS RH du mécénat de compétences

Crédit photo Rozenn Le Saint

Selon une récente étude, près de la moitié des entreprises pratiquant le prêt de main-d’œuvre bénévole à des associations le font avant tout pour des raisons de GRH.Valorisante pour les salariés volontaires, qui se voient donner l’occasion de transmettre leur savoir-faire, la pratique fait de plus en plus d’adeptes.

Construire une aile d’hôpital, former à la comptabilité un responsable d’association, enseigner à des jeunes comment rédiger un CV… Autant de formes que peut prendre le mécénat de compétences. Le but ? Permettre aux collaborateurs de transmettre leurs savoir-faire à des associations sur leur temps de travail.

Une étude, présentée le 4 septembre par des associations de promotion du mécénat de compétences, Admical et Pro Bono Lab, montre qu’il est de plus en plus proposé par les entreprises. Dans un but évident de communication externe, certes, mais l’intérêt pour les retombées RH de cette mise à disposition gracieuse du personnel va croissant. Selon cette enquête, 45 % des entreprises “pratiquantes” le font dans le but de fédérer, ou de développer l’engagement de leurs collaborateurs.

Convaincre les managers

Avant de parvenir à mobiliser des volontaires, encore faut-il convaincre les n + 1 de se priver momentanément d’un membre de leur équipe pour que celui-ci puisse transmettre ses compétences à des associations au lieu de faire avancer sa mission. « Nous avons eu du mal à faire comprendre aux managers que ce n’était pas du temps de perdu », admet Benoît Forest, responsable du développement RH de Bouygues Construction.

L’entreprise a participé, ces trois dernières années, au Campus Probono, qui vise à sensibiliser les étudiants et jeunes diplômés à la démarche en favorisant la rencontre de responsables d’associations étudiantes et d’entreprises pour un échange de connaissances, comme la formation de trésoriers à un business modèle. La première année, le constructeur a mobilisé son staff RH, la deuxième, le service communication et la troisième, le pôle stratégie… Des domaines éloignés de son cœur de métier. « L’un de nos objectifs était de montrer aux étudiants que nous ne sommes pas que des “bétonneux”, que nous cherchons aussi des profils issus d’écoles de commerce », explique le responsable. De quoi valoriser sa marque employeur.

Avec Axa, Accenture a été précurseur sur le sujet en France en mettant en place le mécénat de compétences il y a une dizaine d’années déjà. « Notre activité de conseil consiste à transmettre nos compétences à nos clients, cela s’est fait naturellement aussi avec les associations », témoigne Ericka Cogne, déléguée générale de la fondation Accenture. Rien qu’en 2013, près de 500 salariés sur un effectif de 5 500 se sont engagés, totalisant 6 000 journées de travail offertes aux associations. Surtout, la totalité du mécénat de compétences organisé par Accenture se fait en mobilisant les savoir-faire spécifiques de l’entreprise.

Un modèle en la matière, selon Pro Bono Lab, pour qui les salariés volontaires doivent donner de leur temps de la manière la plus utile possible, en transmettant leur savoir-faire propre. « Si un comptable passe deux heures à repeindre le mur d’une association, la valeur de son travail est égale à un smic horaire. S’il utilise ce temps pour organiser les comptes de cette même structure, la valeur de son travail équivaut plutôt à 150 euros, le don est plus important », souligne Yoann Kassi-Vivier, cofondateur de Pro Bono Lab.

Transposer les compétences aux besoins

L’année dernière, la Société générale s’est associée à Crésus, association de lutte contre le surendettement, afin de dispenser des cours d’éducation financière dans des centres de formation pour apprentis. « Plus de 100 collaborateurs sont intervenus auprès de jeunes apprentis dans plusieurs régions pour leur donner des notions de gestion de budget », raconte Cécile Jouenne-Lanne, directrice de la citoyenneté de la banque.

Parmi les 150 métiers exercés à la SNCF, la ressource abonde. Ainsi, un mécanicien a contribué à la maintenance de fauteuils roulants pour une association de personnes handicapées. Une équipe d’ingénieurs s’est occupée du diagnostic énergétique du bâtiment d’une association. Et des informaticiens lui ont créé un site Internet. Pour autant, sur des métiers bien spécifiques, il n’est pas toujours aisé de transposer les compétences aux besoins du secteur associatif. « Un conducteur de train ne va pas conduire un train… S’il est volontaire, nous l’envoyons sur une autre mission où il peut, par exemple, mettre en valeur ses qualités relationnelles », assure Marianne Eshet, déléguée générale de la Fondation SNCF.

Reste que, selon l’étude, la majorité des aides offertes ne mobilisent pas les compétences propres des collaborateurs. « Les entreprises perçoivent le mécénat de compétences avant tout comme du team building, estime Anne Bory, sociologue de l’économie sociale et des associations et maître de conférence à l’université de Lille 1. Cela coûte moins cher que de les envoyer à l’autre bout de la France pratiquer une activité quelconque, et cela permet de mélanger les niveaux hiérarchiques. »

Valorisation du travail et de l’entreprise

Autres vertus RH soulignées : le renforcement de la motivation de l’intéressé, une valorisation de son travail et de son entreprise. Dans 90 % des cas, les salariés d’Accenture seraient plus fiers de travailler pour la société de conseil après avoir participé à un mécénat de compétences. Et Marianne Eshet de conclure : « Cela permet de voir le fruit de son travail et d’être reconnu pour sa compétence professionnelle. D’habitude, nous sommes simplement payés pour cela, et nous sommes seulement le maillon d’une chaîne. »

ÉTUDE ADMICAL ET PRO BONO LAB : Des missions plutôt courtes

L’étude réalisée par Admical et Pro Bono Lab n’est pas représentative de l’ensemble des entreprises, car elle est basée sur 98 répondants (contactés du 20 juin au 31 juillet), la plupart issus de leur réseau, et donc déjà intéressés par la question. Elle permet toutefois d’évaluer l’intérêt récent des entreprises pour cette démarche : la moitié de celles qui pratiquent le mécénat de compétences l’ont mis en place au cours des trois dernières années, un quart, au cours des douze derniers mois.

31 % des entreprises pratiquantes accordent moins de deux jours par collaborateur et par an, 29 %, entre trois et six jours et 38 %, plus d’une semaine. Le manque de temps des collaborateurs étant le premier frein au développement de la pratique, on observe une tendance qui privilégie les missions ponctuelles et de courte durée, davantage compatibles avec l’activité professionnelle.

Il n’y a pas de limite légale à ne pas dépasser. La durée d’engagement maximale est souvent fixée par une convention d’entreprise. L’entreprise mécène bénéficie d’une réduction d’impôt égale à 26,67 % du coût salarial, plafonnée à hauteur de 0,5 % du chiffre d’affaires.

Auteur

  • Rozenn Le Saint