logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les clés

vie au travail : QUAND LE dress code s’impose

Les clés | publié le : 07.10.2014 | Laurent Poillot

Image

vie au travail : QUAND LE dress code s’impose

Crédit photo Laurent Poillot

Cravate, costume sombre, ou uniforme : au nom du standing de l’entreprise ou de la sécurité au travail, l’employeur peut restreindre la liberté de s’habiller à sa guise. À condition de justifier ces restrictions et d’aider les managers qui ont la tâche, parfois délicate, de faire respecter la consigne.

Il se souvient de cet entretien récent au siège d’une entreprise d’e-commerce. Le directeur général l’avait reçu en t-shirt et bermuda. L’anticonformisme de son client, ingénieur de formation, avait fait sourire Sébastien Bompard, président de l’association des recruteurs responsables À Compétence égale : « Les codes vestimentaires s’ouvrent de plus en plus, considère ce spécialiste du recrutement (cabinet Taste). Après les managers intermédiaires puis l’encadrement, on voit aujourd’hui des cadres dirigeants venir au bureau la chemise ouverte. »

Formalisme

Il reste que certains univers professionnels sont plus formalistes que d’autres. Exemple à Disneyland, dont le “Disney look” affirme « que chaque détail compte ». Au nom du détail, l’employeur proscrit tout ce qui pourrait perturber une certaine conception de la famille : transformations corporelles interdites, cheveux courts recommandés pour les hommes, etc. Pas de quoi fouetter un chat, selon ce manager, vingt-deux ans d’ancienneté à Disneyland Paris : « L’un de mes formateurs a les cheveux longs ; il les dissimule sous l’un des couvre-chefs dont nous nous servons sur notre “land”. » Il poursuit : « Je n’impose rien, mais je demande que l’on soit présentable. Je n’ai jamais eu de mal à l’expliquer ; c’est évident, dans les métiers de service. » Il dit n’avoir jamais sanctionné un salarié pour des questions d’étiquette : « Le management, professe-t-il, c’est de la communication. »

Plus l’exposition de l’image de l’entreprise, ou d’une profession, est déterminante dans la production d’une prestation, plus le poids du code vestimentaire sera fort. Idem s’agissant des prescriptions de sécurité au travail. Ce sont là les deux motifs sur lesquels l’employeur se fonde pour imposer des restrictions de liberté au personnel. En dehors de ces cas, la jurisprudence a fait aussi référence à la notion de “trouble”, dans le fonctionnement de l’entreprise, qu’avaient pu causer, par exemple, les chemisiers transparents que persistait à porter telle comptable, ou encore le bermuda sous la blouse d’un technicien de l’industrie.

Mais le code ne se limite pas qu’aux vêtements. En 2010, UBS avait poussé la précision très loin, en demandant par exemple aux salariées de porter un soutien-gorge de couleur chair sous leur indispensable chemisier blanc, et aux hommes d’utiliser une crème de soin composée d’actifs nourrissants et apaisants.

La tâche du manager se complique si le dress code ne s’impose pas à tous. « Les managers du siège prononcent des sanctions au sujet d’un dress code qu’ils n’ont pas eux-mêmes à vivre au quotidien », raconte cette chef de cabine de la British Airways, qui juge « infantilisantes » les remarques consignées sur la taille des bijoux ou la coupe de cheveux. « Nous veillons les uns sur les autres pour échapper à cette “fashion police”. » Dans cette compagnie, trois commentaires portés sur le dossier du salarié entraînent l’entretien préalable de licenciement. « Tout ce qui se passe à bord est consigné sur iPad, poursuit-elle. Depuis les grèves de 2010, au cours desquelles des stewards avaient enlevé leur cravate en signe de protestation, tout manquement au dress code, même sur un point de détail, passe pour un affront fait à la compagnie. »

à consigner dans le Règlement intérieur

L’encadrement ne peut imposer de restrictions que si celles-ci sont consignées dans le règlement intérieur de l’entreprise, ainsi que les sanctions prévues. « Ce n’est pas le cas chez nous, soupire ce cadre des Galeries Lafayette, où le noir est de rigueur. L’entreprise a changé son règlement intérieur il y a un an et demi. Elle a indiqué qu’elle pouvait imposer le code vestimentaire de son choix, sans préciser lequel, pour s’éviter de financer les tenues de travail. » Conséquence, selon lui : « La direction fait reposer sur nous sa responsabilité d’imposer le dress code. La plupart de mes collaborateurs touchent 1 400 euros brut, plus une prime mensuelle d’environ 120 euros. Ils ne peuvent pas, avec ce salaire, se constituer la garde-robe demandée… sachant que le noir défraîchi, ici, ça ne passe pas. »

Ce manager ne sanctionne jamais sur ce chapitre pour garder la confiance de son équipe : « Je préfère la pédagogie. Je passe le message de préparer les soldes et je donne du temps aux gens qui n’ont pas les moyens de se racheter des vêtements. » Durant ses congés d’été, un manager très directif l’avait remplacé. Du jour au lendemain, les salariés avaient réagi en sortant les couleurs.

LES CONSEILS DU COACH

SÉBASTIEN BOMPARD

Associé du cabinet Taste, conseil en recrutement. Président de l’association des recruteurs responsables À Compétence égale.

- 1 -

Des règles à respecter

Vous pouvez imposer une tenue vestimentaire si cette mesure se justifie par la nature des fonctions que les salariés occupent : pour des fins commerciales ou d’hygiène et de sécurité. Des restrictions sont également envisageables pour les mêmes motifs. Faites attention que cette obligation soit bien proportionnée au but recherché (Code du travail, art. L . 1121-1). Vérifiez avec la direction que l’imposition d’un code vestimentaire donne bien lieu à la fourniture d’un uniforme.

- 2 -

Justifier ce choix auprès des salariés

Même si l’entreprise n’a pas formalisé de dress code, il est bon de ne jamais se décorréler de sa clientèle. Pour que vos salariés en soient convaincus, faites passer des messages comme celui-ci : « Nous assurons des prestations de qualité ; cela justifie une présentation de soi respectueuse du client. » Ne prononcez pas de jugements sur la coupe, le coloris ou la qualité du vêtement des salariés.

- 3 -

Convaincre avant de sanctionner

Si vous devez intervenir auprès d’une personne, efforcez-vous de lui faire prendre conscience qu’elle gagnera une meilleure qualité de relation avec ses clients et ses collègues. C’est toujours bénéfique pour la performance de l’équipe. Si vous devez prononcer une sanction en rapport avec la présentation du salarié, n’exprimez pas de justification discriminante. Rappelez-vous qu’aucun salarié ne peut être licencié en raison de son genre, de son orientation sexuelle supposée ou de son apparence physique.

Auteur

  • Laurent Poillot