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ALLEMAGNE : entre Amazon et Ver.di, un problème de culture

Sur le terrain | INTERNATIONAL | publié le : 16.09.2014 | MARION LEO

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ALLEMAGNE : entre Amazon et Ver.di, un problème de culture

Crédit photo MARION LEO

Un conflit d’envergure oppose depuis 2013 le champion américain du commerce en ligne Amazon et le syndicat allemand des services Ver.di sur les conditions de travail, les rémunérations et, surtout, les relations sociales. Cet été, Ver.di a rassemblé les syndicats de quatre autres pays pour définir une stratégie commune.

Début juillet, une réunion peu ordinaire s’est tenue au siège du syndicat allemand des services Ver.di à Berlin. Pendant deux jours, des représentants de Ver.di et de syndicats de quatre pays (Pologne, République tchèque, Grande-Bretagne et États-Unis) ont étudié les possibilités de définir une stratégie commune et de mener des actions concertées face au géant américain de la vente en ligne, Amazon.

« Amazon est en pleine expansion dans le monde entier et les conflits se ressemblent », a expliqué Alke Bössiger, une responsable de l’organisation syndicale internationale Uni Global Union. Ils concernent les salaires et le refus de négocier. Pour Ver.di, il s’agit de lancer un « signal fort » à Amazon : face à une entreprise multinationale, qui fixe ses propres règles, les travailleurs sont eux aussi prêts à se fédérer. En mars 2014, une délégation de salariés allemands du site d’Amazon à Bad Hersfeld, en Hesse, s’était par exemple rendue au centre logistique de Chalon-sur-Saône (71) pour y soutenir ses collègues français en grève. À l’avenir, des mouvements de grève pourraient bien être lancés au même moment sur différents sites d’Amazon dans le monde. Cette coopération internationale constitue une nouvelle étape dans le conflit opposant Ver.di et Amazon outre-Rhin. Depuis début 2013, le syndicat allemand essaie, par le biais de grèves à répétition, d’amener Amazon à accéder à ses demandes, en vain jusqu’à présent. Ver.di reproche à l’entreprise américaine, qui emploie environ 9 000 salariés dans huit centres logistiques en Allemagne, de favoriser les CDD et de refuser de signer tout accord collectif. « Nous voulons qu’Amazon adhère aux accords collectifs régionaux en vigueur dans le commerce de détail », explique une porte-parole du syndicat. Selon Ver.di, Amazon dispose de son propre système de rémunération prévoyant des salaires inférieurs à ceux fixés dans les conventions collectives. À Leipzig, en ex-RDA, le salaire de base s’élevait, en mai 2013, chez Amazon à 9,30 euros de l’heure, contre 10,66 euros dans la convention régionale du commerce. En Hesse, la différence est plus marquée : 9,38 euros de l’heure contre 12,18 euros dans l’accord collectif.

Au siège d’Amazon, on rétorque que les centres d’envoi sont des entreprises du secteur de la logistique, et que le niveau des remunérations des collaborateurs se situe en haut de l’échelle des salaires versés dans cette branche. Ver.di ne veut pas entendre cet argument, dans la mesure où les concurrents allemands Otto Versand et Neckermann, respectivement n° 2 et n° 3 du secteur, reconnaissent les accords collectifs du commerce et paient en conséquence.

AMÉRICANISATION DES RELATIONS

En réalité, Ver.di ne reproche pas tant à Amazon le niveau des rémunérations que son refus de signer tout accord collectif et sa pratique de salaires fixés librement. « Amazon veut américaniser les relations de travail dans notre pays. Ils se croient au Far West », a ainsi dénoncé Frank Bsirske, président de Ver.di, qui ajoute : « Il s’agit d’un conflit culturel. À quoi ressemblera le monde du travail de demain dans notre pays ? Sera-t-il marqué par les résultats des négociations collectives entre employeurs et syndicats, ou les employeurs feront-ils ce qu’ils voudront ? Amazon entend régler les choses à sa guise. C’est un manque de culture que nous ne pouvons tolérer. »

L’enjeu du conflit explique la forte détermination de Ver.di. « Nous sommes décidés à nous battre jusqu’au bout », explique la porte-parole du syndicat, qui compte à présent aussi sur le soutien des collègues internationaux pour faire entendre raison à Amazon.

DANS LES MÉDIAS

DIE WELT Heures sup… sans supplément

De tous les salariés des 17 pays de la zone euro, les Allemands effectuent le plus grand nombre d’heures supplémentaires. […] Selon des études de l’UE, la durée du temps de travail hebdomadaire fixée dans le cadre des conventions collectives en Allemagne s’élève à 37,7 heures. Mais en réalité, les salariés travaillent 40,5 heures par semaine. […] À noter : la majorité de ces heures n’est pas rémunérée. 8 septembre 2014. Die Welt, quotidien conservateur.

SÜDDEUTSCHE ZEITUNG Bras de fer intersyndical à Deutsche Bahn

Le syndicat des conducteurs de locomotives GDL et le syndicat majoritaire des cheminots EVG se livrent une lutte de pouvoir au sein de la compagnie des chemins de fer Deutsche Bahn. La GDL négocie jusqu’à présent les accords collectifs pour les 20 000 conducteurs de train. La EVG est en charge des 140 000 autres salariés de Deutsche Bahn. Mais la GDL entend défendre également les intérêts du personnel roulant et des agents de conduite des dépôts. La EVG veut, quant à elle, représenter l’ensemble du personnel de la compagnie ferroviaire. 6 septembre 2014. Süddeutsche Zeitung, quotidien de centre gauche.

Auteur

  • MARION LEO