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Les préretraites maison gardent la cote

Actualités | publié le : 02.09.2014 | HÉLÈNE TRUFFAUT

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Les préretraites maison gardent la cote

Crédit photo HÉLÈNE TRUFFAUT

Les salariés en redemandent.Les employeurs y voient une source de paix sociale, notamment lorsqu’ils doivent réduire la voilure ou gérer la pénibilité. Une enquête de la Dares montre que la cessation anticipée d’activité intégralement financée par l’employeur, même fortement taxée, a toujours ses adeptes.

Travailler plus longtemps ? L’injonction des politiques publiques ne vaut pas pour tous ! Les préretraites d’entreprise ont toujours la cote, confirme la Dares, qui a publié en août une enquête réalisée l’année dernière auprès d’une vingtaine d’entreprises ayant recouru à ce type de plan. Des dispositifs qui, précise l’organisme, « échappent très largement au suivi statistique », mais servent à coup sûr l’image sociale de l’employeur qui les met en œuvre.

De Hewlett-Packard à PSA en passant par La Redoute, les exemples récents d’entreprises ayant choisi de diminuer leurs effectifs par ce biais ne manquent pas (lire Entreprise & Carrières n° 1199). Le 18 avril dernier, l’éditeur informatique Oracle, dans le cadre d’une série d’accords visant à accompagner la transformation de l’entreprise, en concluait aussi un sur la cessation anticipée d’activité.

60 % à 70 % du salaire antérieur

Généralement, ces préretraites maison permettent à des seniors âgés d’au moins 55 ans de mettre un terme à leur vie professionnelle, parfois de manière progressive, en touchant jusqu’à leur retraite une rente dont le montant se situe entre 60 % et 70 % du salaire antérieur brut. Le tout intégralement financé par l’employeur, qui a le choix entre deux formules de séparation ayant différentes implications sociales et fiscales : la rupture ou la simple suspension du contrat de travail (lire l’encadré).

Chez PSA, les volontaires se sont bousculés à certains guichets du « congé seniors » ouvert en janvier dans le cadre des mesures intergénérationnelles du constructeur. Au menu de ce plan avec suspension (encore amélioré sur le site de Rennes) : une éligibilité à 24 mois de la date de départ à taux plein – 36 mois pour les métiers pénibles –, un travail à mi-temps suivi d’une dispense d’activité associée à 70 % du salaire brut avec un plancher de 1 800 euros et des cotisations sociales payées à 100 % sur cette base.

Selon les courtiers, assureurs et cabinets de conseil interrogés dans le cadre de l’étude, « la résorption des sureffectifs générés par la crise économique et les restructurations sont devenues aujourd’hui le principal motif de recours à la préretraite ». Mais celle-ci peut être aussi « une réponse à la pénibilité de certains métiers », notamment dans de grandes entreprises du secteur industriel pratiquant le travail posté, où elle fait partie intégrante de la GRH et de la culture d’entreprise.

De manière plus marginale, elle peut s’inscrire en dispositif « d’appoint », sous une autre appellation (transition activité-retraite, par exemple), dans une politique globale de maintien des seniors dans l’emploi ; être une survivance d’un dispositif datant parfois des années 1970 auquel les salariés sont très attachés; ou encore figurer dans un accord de GPEC comme « une forme de mobilité externe ». Coût d’un tel programme oblige, le motif historique de rajeunissement de la pyramide des âges, entre les années 1970 et 1980, est passé au second plan.

Perçus par les salariés comme un avantage acquis, ces départs anticipés ont, certes, fait les frais du doublement de la taxe sur les préretraites avec rupture du contrat de travail, ainsi que des difficultés économiques de certaines entreprises. Lesquelles en ont, du coup, réduit le périmètre à l’issue de négociations qualifiées d’« âpres ». Pourtant, la préretraite demeure « un dispositif consensuel », souligne l’étude. Pour preuve, sur les 21 entreprises et l’union professionnelle rencontrées, « 13 accords ont été signés par l’ensemble des organisations syndicales et 7 par les syndicats majoritaires, malgré des possibilités d’accès plus réduites ».

Pour les entreprises qui en ont les moyens, le bénéfice des plans de préretraite n’est pas négligeable. Mode de séparation « en douceur » des seniors, ils permettent « d’assurer un climat social favorable » et constituent, selon la Dares, la « vitrine éthique » des PSE. En donnant aux entreprises « le sentiment d’être vertueuses », puisqu’elles prennent tout à leur charge.

Deux formules

Au cours des années 2000, la forte majoration de la taxe sur les préretraites avec rupture a incité certaines entreprises à passer sur une formule de suspension, également appréciée pour sa flexibilité et la possibilité, pour le salarié, de continuer à bénéficier de certains avantages, dont la complémentaire santé.

La Dares a complété son étude par l’élaboration d’un cas type (voir le tableau ci-dessous) pour un senior touchant 3 016 euros brut par mois. Il permet de comparer, tant pour l’employeur que pour le salarié – en intégrant les indemnités conventionnelles – les coûts et avantages des deux types de préretraite maison associées à une rente de 70 % du salaire brut, par rapport à d’autres fins de carrière, dont la rupture conventionnelle (suivie, elle, d’une indemnisation par l’assurance chômage) et le passage au régime d’invalidité (encadré par le Code de la Sécurité sociale).

Mais, si l’exemple montre que la préretraite avec rupture est 1,3 fois plus coûteuse pour l’entreprise que celle avec suspension, la première demeure cependant majoritaire, observent les professionnels du secteur. Une façon de contenter les actionnaires ou de prévenir les risques liés à une énième réforme des retraites.

RUPTURE OU SUSPENSION DU CONTRAT DE TRAVAIL

Les préretraites d’entreprise sont mises en place par accord collectif, par proposition de l’employeur soumise à la majorité des salariés ou par décision unilatérale. Le contrat de travail du salarié volontaire et répondant aux critères d’éligibilité peut être soit rompu, soit suspendu, rappelle la Dares.

Dans le premier cas, quelle que soit la qualification de la rupture, le préretraité n’est plus comptabilisé dans les effectifs et perçoit une rente non assimilable à un salaire. Le maintien de la protection sociale et le partage de son financement entre l’employeur et le salarié dépendent du plan établi par l’entreprise. À l’exception de celles mises en place dans le cadre d’un PSE (impliquant toujours une rupture du contrat), les préretraites avec rupture sont soumises depuis 2003, à une contribution patronale sur les montants versés, dont le taux atteint 50 % pour les départs ultérieurs au 11 octobre 2007. En cas de suspension de son contrat de travail, le senior reste dans les effectifs de l’entreprise, les sommes qu’il perçoit sont assimilées à un salaire, l’employeur continuant de payer les cotisations sociales afférentes.

À noter qu’en cas de rupture du contrat de travail, l’entreprise peut recourir à une gestion externalisée des préretraites.

Bilan financier pour le salarié et l’entreprise selon les différents scénarios*

Cas d’un salarié non cadre né en 1955, qui a commencé à travailler en 1975. Il touche un salaire mensuel brut de 3 016 euros (2 313 euros net) dans une entreprise de 150 salariés et bénéficie d’un régime de prévoyance conventionnel de 100 euros par mois, dont 50 % à la charge de l’employeur. Les situations décrites prennent effet le 1er janvier 2013 – le senior a 57 ans et 9 mois – et s’achèvent le 1er mai 2017 (avant pour l’invalidité).

Auteur

  • HÉLÈNE TRUFFAUT