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Enquête

« En matière de santé, les intérimaires ne sont pas une variable d’ajustement »

Enquête | publié le : 29.04.2014 | V. L.

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« En matière de santé, les intérimaires ne sont pas une variable d’ajustement »

Crédit photo V. L.

E & C : Quels ont été l’objectif et les premières réalisations du plan national d’actions coordonnées 2009-2012 dédié à l’intérim ?

P. B. : L’objectif de ce plan d’actions était d’améliorer la prévention des risques professionnels dans les agences d’emploi et les entreprises utilisatrices et d’arriver à diffuser des bonnes pratiques pour faire baisser la sinistralité. Dès 2007, la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles avait émis des recommandations sur le sujet autour de la nécessité d’un meilleur accueil de l’intérimaire et de la formation au poste de travail. La signature de la convention d’objectifs et de gestion 2009-2012 avec l’État a donné encore plus de poids à cette priorité. Nous avons lancé un groupe de travail avec Prism’emploi et décidé de réaliser une enquête afin d’avoir une vision objective de la situation: 2 500 agences et 5 400 entreprises utilisatrices ont été visitées. Et 4 800 dossiers d’accidents du travail ont été analysés. Il en est ressorti que les permanents des ETT n’étaient pas formés pour traiter correctement des risques professionnels dans le contrat de délégation; les contrats de mise à disposition ne mettaient pas en évidence les risques aux postes de travail, et a fortiori les risques pour les postes qualifiés de “postes à risques particuliers”, alors que la loi l’exige. Le suivi des accidents du travail avec les entreprises utilisatrices pour en tirer les leçons n’était pas fait.

E & C : Quelles actions ont-elles alors été préconisées ?

P. B. : Nous avons engagé trois thèmes d’actions prioritaires : la formation des permanents des ETT ; le recueil des caractéristiques précises des postes de travail et des risques encourus dans des fiches de liaison; et l’analyse des accidents du travail. Nous avons construit un référentiel de compétences pour les permanents, validé par Prism’emploi, qui détaille les étapes de la délégation depuis le recueil des informations auprès du client jusqu’au traitement des accidents du travail. Mais le référentiel de formation n’est pas encore validé, notamment en raison de la durée des formations, que nous préconisons sur deux jours. Les agences qui ont commencé à former leurs permanents le font en suivant des modules d’une journée, ce qui nous semble trop dense au regard des concepts à transférer. S’agissant de la fiche de liaison, elle se diffuse un peu partout, même si nous savons que son utilisation n’est pas encore généralisée. Notamment pour les missions confiées du jour au lendemain.

E & C : Quels freins principaux demeurent pour faire avancer la prévention ?

P. B. : La difficulté essentielle reste la façon dont les entreprises utilisatrices gèrent le personnel intérimaire: si, dans l’adéquation entre charge et capacité, les intérimaires sont considérés comme des variables d’ajustement, il ne peut en être question en matière de santé au travail, car cela reviendrait à admettre que les intérimaires ne sont pas des salariés comme les autres… Les intérimaires sont largement plus accidentés lorsqu’ils interviennent dans les entreprises les plus “accidentogènes”. Mais si une entreprise fait de la prévention des risques professionnels une priorité pour ses salariés permanents, elle s’intéressera aussi à la protection des intérimaires et elle les intégrera mieux. Les agences et les intérimaires ne sont toutefois pas exempts de responsabilité.

La méconnaissance des conditions réelles de travail des salariés intérimaires alliée à une volonté de ces derniers d’accepter les demandes de l’entreprise utilisatrice conduisent à une augmentation potentielle du risque.

Auteur

  • V. L.