logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Enquête

L’ÉVOLUTION DES MÉTIERS ACCOMPAGNÉE SUR LE TERRAIN

Enquête | publié le : 18.03.2014 | CAROLINE COQ-CHODORGE

La MGEN mène un plan social dans ses centres de santé, lourdement déficitaires. Le groupe mutualiste a pris la mesure de l’importance des risques psychosociaux et a engagé une consultante.

Quarante lettres de licenciement sont parties le 10 février ; le groupe mutualiste MGEN boucle un plan social douloureux dans ses cinq centres de santé de Paris, Strasbourg, Nancy, Lyon et Nice. Fin août 2012, ils employaient 482 salariés, dont 252 médecins.

Outre les quarante personnels non médicaux licenciés, d’autres ont été reclassés dans le groupe, ont accepté une mobilité, ont profité d’une formation ou sont partis à la retraite. Quant aux médecins, une centaine d’entre eux (40 %) quittent la MGEN. Depuis le plan social, les cinq centres comptent 187 salariés de moins. En déficit depuis une dizaine d’années, les cinq établissements de soin accusaient en 2012 une perte qui s’élevait à 7,8 millions d’euros.

Recherche d’une situation d’équilibre

« C’est une situation qui ne pouvait pas perdurer car elle pèse sur les cotisations des adhérents, explique Émilie Anstett, responsable du pôle centres de santé à la direction des établissements de la MGEN. Notre objectif n’est pas de parvenir à une situation excédentaire, mais à un équilibre ou à un déficit maîtrisé. Nous prévoyons aussi de développer de nouvelles activités. »

Pour le syndicat majoritaire CFE-CGC, « l’employeur a une large responsabilité dans cette situation, il a laissé pourrir la situation, regrette le délégué central Jean-Paul Zerbib. Depuis des années, nous réclamons le développement d’activités plus rentables, comme le dentaire ou l’optique. Depuis un ou deux ans, ces choix sont faits, mais au prix d’un plan social qui aurait pu être évité ».

En parallèle, une réorganisation du travail est engagée. « Cela crée une multitude d’insécurités, les risques psychosociaux sont importants », reconnaît Émilie Anstett. Ce qui est confirmé par Jean-Paul Zerbib : « Je vois défiler des gens qui viennent pleurer dans mon bureau. »

Début 2013, la MGEN décide de faire appel à Valérie Estournès, consultante indépendante en organisation du travail, santé et ressources humaines, chargée d’accompagner ce plan social. Depuis le mois de septembre, elle sillonne la France et elle découvre des équipes avec « une très forte ancienneté, très attachées à leurs modes de fonctionnements, avec d’un côté des médecins, plutôt des hommes, et de l’autre des secrétaires médicales, des femmes. »

La consultante prévient les directions, les cadres intermédiaires : « Attention, nous entrons dans une période difficile et vous êtes en première ligne, soyez attentifs ! » Même les directions des centres sont concernées : dans la tradition mutualiste, elles sont constituées de militants, d’anciens enseignants ou chefs d’établissements scolaires. La MGEN souhaite les « professionnaliser ». Sont par exemple mises sur pied des réunions de coordination des directeurs, pour diffuser une culture commune et des bonnes pratiques.

Mais la situation la plus difficile est celle des secrétaires médicales. « Elles avaient une proximité très forte avec les médecins, raconte Valérie Estournès : elles apportaient aux médecins leur blouse, remettaient du papier dans les imprimantes. » Elles sont désormais moins nombreuses et doivent se concentrer sur un travail uniquement administratif : la prise des rendez-vous, l’accueil des patients, la gestion des remboursements, etc. « Il faut qu’elles trouvent de nouveaux modes de relation avec les médecins, qu’elles retrouvent une identité professionnelle », estime Valérie Estournès.

Des médecins en désaccord avec la convention

La situation des médecins est différente. Une centaine font le choix de quitter les centres de santé parce qu’ils sont en désaccord avec la nouvelle convention collective, signée en novembre 2012, qui leur impose une plus grande productivité : ils ne sont plus rémunérés au forfait, mais à l’acte, avec une part forfaitaire. « Nous avons refusé de la signer, explique Jean-Paul Zerbib, de la CFE-CGC. Pour beaucoup de médecins, c’est un changement d’époque. Les logiques gestionnaires s’imposent. » Le plan social reste ouvert pendant dix-huit mois, donc de nouveaux départs de médecins sont possibles. La MGEN souhaite les garder, car ils sont déjà trop nombreux à être partis.

« Le climat est triste, explique Jean-Paul Zerbib, de la CFE-CGC, mais il faut aller de l’avant. Nous étions en désaccord avec l’employeur sur ce plan social, mais dans ses modalités, la MGEN a été loyale : toutes les solutions de reclassement en interne ont été cherchées, des formations ont été proposées. On essaie d’être positifs, on espère qu’ils ne se sont pas trompés et que cette restructuration est la bonne. Mais le niveau de confiance est encore limité. »

CENTRES DE SANTÉ DE LA MGEN

• Activité : consultations médicales et soins.

• Effectif : 295 salariés.

• Chiffre d’affaires : 27 millions d’euros.

Auteur

  • CAROLINE COQ-CHODORGE