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Enquête

DES OUTILS DE PRÉVENTION INSUFFISAMMENT EXPLOITÉS

Enquête | publié le : 18.03.2014 | ROZENN LE SAINT

La crise des suicides qu’ont connue France télécom et Renault a incité l’équipementier automobile à s’intéresser au bien-être dans l’entreprise. Mais les initiatives prises ne sont pas suffisamment suivies d’effets, et la charge de travail continue d’augmenter depuis les restructurations de 2009 et 2011.

Alors qu’une vague de suicides déferle sur Renault et sur France télécom, l’industrie automobile subit la crise de plein fouet. Valeo engage une restructuration fin 2009 et supprime 1 640 postes. Craignant d’être « à risque », le sous-traitant automobile se penche sur la problématique des risques psychosociaux.

« Nous sommes partis de l’idée que le développement du mieux-être allait au-delà de la simple prévention des RPS » souligne José Schoumaker, directeur des relations du travail de Valeo.

À partir de 2009, lors de chaque entretien annuel d’évaluation, les salariés se sont vu demander si, selon eux, leur charge de travail était bien répartie, si elle altérait leur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle et, si oui, comment y remédier.

Un salarié sur deux, principalement parmi ceux travaillant dans les bureaux (personnel qui représente la moitié des effectifs, l’autre moitié étant constituée des opérateurs en usine) ont répondu. Parmi eux, un tiers a exprimé un désagrément s’agissant de sa charge de travail et la moitié un souhait d’amélioration. Pour y remédier, la direction évoque des réorganisations dans les équipes, une meilleure répartition de la charge de travail, des formations destinées à améliorer la productivité et l’embauche d’intérimaires si la surcharge est à durée déterminée. Puis la démarche a été systématisée chaque année.

Moins d’opérateurs pour produire plus

Les syndicats, eux, n’ont remarqué aucune suite à ces questionnaires, censés faire l’objet d’une commission de contrôle chaque année. « Aucun point critique dans les réponses n’a été mis en évidence », se défend José Schoumaker. Les objectifs de productivité ont continué d’augmenter. Alors, sur les lignes de fabrication, les opérateurs tirent la langue. À l’usine d’Issoire (Puy-de-Dôme), où travaille le représentant CGT Fabrice Fargheot, « on produit presque autant de pièces qu’il y a dix ans alors que nous sommes moitié moins. Cela se répercute forcément sur la santé au travail. »

Sur les 350 ouvriers de l’usine, 68 ont au moins une restriction médicale et près de 25 sont atteints d’une maladie professionnelle. La direction, elle, met en avant une diminution des accidents du travail pour toute l’entreprise : le taux de fréquence est passé de 5,5 % en 2007 à 2,64 % en 2012. Valeo a également mis en place des plans de formation pour les managers et les salariés ; les postes ont été analysés de façon à alléger la mobilisation musculaire ; la possibilité de tourner sur des postes différents est offerte. « Il ne suffit pas d’améliorer l’ergonomie de chaque poste. Si les cadences sont insoutenables, les salariés souffriront quoi qu’il en soit », rétorque Fabrice Fargheot.

350 postes supprimés en 2011

En 2011, l’entreprise a entamé une nouvelle réorganisation qui touchait les cadres supérieurs et les techniciens : 350 postes ont été supprimés et, surtout, l’ensemble de la structure a été modifié. Dans le but d’éviter que ne se développent les RPS, l’entreprise a embauché des intérimaires pour faire face à la surcharge de travail.

Et puis Valeo avait anticipé en concluant un accord groupe de mieux-être au travail en octobre 2010, que seule la CGT a refusé de signer. Mais trois ans plus tard, à l’heure de la renégociation de l’accord, la CFDT exprime sa déception par la voix de Marie-Paule Vachon : « Cela n’a pas été suivi d’effets. Pour que nous signions à nouveau, le b.a.-ba sera qu’il y ait des obligations de résultats ». Comme action concrète, la direction évoque simplement la formation d’une journée des 4 000 managers et des responsables RH à la prévention des RPS. Elle met en avant un faible turnover de ses cadres et de ses ingénieurs, qui tourne autour de 3,5 %, ainsi que leur absentéisme bas, égal à 2,8 %.

Mais les arrêts maladies sont beaucoup plus importants sur les sites de production : autour de 3 % à Châtellerault et Blois, le taux monte à 6,5 % à Sainte-Florine.

VALEO

• Activité : automobile.

• Effectif : 14 000 salariés en France.

• Chiffre d’affaires : 2,8 milliards d’euros en France.

Auteur

  • ROZENN LE SAINT