logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Pratiques

États-UnisCHEZ PEPSICO, MIEUX VAUT GUÉRIR QUE PRÉVENIR

Pratiques | International | publié le : 11.03.2014 | CAROLINE CROSDALE

Une étude auprès des salariés du géant du cola l’atteste : les programmes de suivi ciblés sur les malades chroniques ont un retour sur investissement important pour l’entreprise. En revanche, les programmes préventifs sur les modes de vie sains apparaissent peu rentables.

Les résultats ont été publiés en janvier. Et, comme un diagnostic pessimiste, ils ont fait l’effet d’une douche froide dans beaucoup d’entreprises, d’autant plus qu’ils contredisent nombre d’études précédentes : la vaste enquête statistique de Rand Corporation, un organisme à but non lucratif spécialisé dans le domaine de la santé, auprès de 67 000 collaborateurs américains du grou­pe Pepsico, l’un des pionniers dans la gestion de la santé et du bien-être des collaborateurs, conclut en effet à la faible rentabilité des programmes dits de “wellness”. Largement mis en œuvre par les entreprises américaines qui cherchent en permanence à optimiser leur budget de couverture santé, ils visent notamment à promouvoir des modes de vie sains. Or les experts de Rand Corporation ont découvert qu’ils ont un très faible retour sur investissement, « de l’ordre 0,5 dollar pour 1 dollar investi ». à l’inverse, le suivi des salariés malades est rentable : un dollar investi génère d’après eux un retour de 3,78 dollars.

Améliorer le mode de vie

Pour mieux comprendre ce grand écart entre le management de la maladie et celui du bien-être, il faut retourner au b.a.-ba des programmes. Le plan Pepsico, mis en place en 2003, est multiple. Tous les salariés et leurs familles peuvent y participer. On réalise un bilan de santé et des risques encourus. Pepsico promeut dans ses établissements des programmes pour améliorer le mode de vie. Par ailleurs, un programme concerne spécifiquement les malades.

Suivi de maladies chroniques

Dans ce cadre, six maladies chroniques sont surveillées, dont l’asthme, l’hypertension, le diabète, le mal de dos et les maladies de cœur. Les salariés concernés sont mis en contact avec une infirmière, joignable 24 heures sur 24 pendant plusieurs mois. Elle veille à ce que le patient prenne ses médicaments, voit son médecin et réalise les analyses pour bien suivre l’évolution de la maladie. Résultat : les visites aux urgences des hôpitaux se réduisent de 29 % sur une année. Et les experts de Rand Corporation ont calculé que 136 dollars par mois et par participant sont économisés, soient 1 632 dollars par an. Si, en prime, le malade change son mode de vie, les résultats sont encore plus spectaculaires. Lorsqu’il fait davantage de sport, arrête de fumer, mange plus sain… les hospitalisations se réduisent de 66 %. Le patient économise 160 dollars par mois, soit 1 920 dollars par an.

Le contraste avec le bilan du programme bien-être est d’autant plus net. Le coaching au téléphone y est certes aussi de rigueur, complété de campagnes pour arrêter de fumer, pour préférer l’escalier à l’ascenseur, aller à la salle de sport… Mais, observe Soeren Mattke, de Rand Corporation, seul l’absentéisme au bureau se réduit. Et tout juste de 48 minutes par an ! Pas de quoi pavoiser.

Raisons invoquées de ce manque de résultats ? « Le salarié inscrit dans le programme bien-être n’est pas malade, dit-il. S’il est obèse, il risque à long terme une crise cardiaque ou le diabète. » Mais ce risque ne se matérialisera peut être jamais. Et s’il advient, « il sera à la retraite, ou passé chez un concurrent ». Du coup, Pepsico bénéficie rarement de ses efforts de prévention.

Cerner les objectifs

Conclusion prudente de l’étude de Rand Corporation : les entreprises doivent mieux cerner les objectifs recherchés, lors­qu’elles mettent en place ces programmes coûteux. « Si elles veulent réduire leurs dépenses de santé, il faut se concentrer sur les seuls salariés malades », conseille Soeren Mattke. Mais s’il s’agit d’afficher les mêmes “benefits” que les entreprises concurrentes pour cultiver son attractivité, le programme bien-être peut aussi se justifier. Or, selon l’International Foundation of Employee Benefit Plans, rien moins que 7 employeurs américains sur 10 ont proposé en 2012 des initiatives bien-être à leurs troupes.

La direction de Pepsico, dépassée par l’intérêt qu’a suscité cette étude, s’est refusée à tout commentaire. Les différents avantages proposés aux salariés semblent cependant toujours en place.

Auteur

  • CAROLINE CROSDALE