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Un an après, les PME restent difficiles à convaincre

Actualités | publié le : 25.02.2014 | ÉLODIE SARFATI

Les contrats de génération, créés il y a un an par la loi du 1er mars 2013, connaissent une montée en charge progressive, mais loin des objectifs initiaux du gouvernement. Afin d’accélérer le mouvement, celui-ci a revu les règles du jeu pour les entreprises de 50 à 300 salariés, où le contrat de génération peine à s’installer.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Avec 21 000 demandes d’aides enregistrées à la mi-février, on est bien loin des ambitions initiales du gouvernement, qui tablait sur 100 000 contrats de génération par an. « Il faut dire que les objectifs de départ étaient très ambitieux, s’agissant d’un dispositif qui repose, pour une partie des entreprises, sur une négociation préalable, et qui écarte celles de plus de 300 salariés », remarque Annie Jolivet, chercheuse au Centre d’études de l’emploi.

De fait, c’est bien dans les entreprises de 50 à 300 salariés, qui ne peuvent conclure de contrat de génération qu’à la condition d’être couvertes par un accord (d’entreprise ou de branche) ou par un plan d’action, que le bilan est le plus éloquent. À mi-janvier, elles ne représentaient que 20 % des 7 300 accords et plans d’action enregistrés, et seule une vingtaine de branches ont conclu un accord. Du coup, elles n’étaient à cette date, à l’origine que de 11 % des contrats de génération, les 89 % restants émanant des entreprises de moins de 50 salariés, non soumises aux mêmes contraintes.

Difficultés à afficher les intentions d’embauches

Plusieurs facteurs expliquent ce peu d’appétence des PME pour s’engager dans une telle démarche. « Certaines ont déjà le sentiment d’enchaîner les négociations obligatoires sans avoir le temps de mettre en œuvre les accords ou d’en tirer le bilan, note Geneviève Trouiller, chargée de mission à l’Anact. Par ailleurs, afficher des intentions d’embau­ches de jeunes en CDI est beaucoup plus difficile pour les PME que pour les grands groupes, où le turnover est suffisant pour anticiper des recrutements. Même s’il n’y a pas d’obligation de résultat, elles s’engagent vis-à-vis de leurs partenaires en interne. » La conjoncture économique n’aide pas à franchir le pas.

S’y ajoute, avance Annie Jolivet, « l’impression que le système est préformaté, et plus rigide qu’il n’est en réalité. Par exemple, les PME ne savent pas toujours que ce n’est pas forcément le senior concerné par le contrat de génération qui doit transmettre ses connaissances au jeune. La perception qu’il y avait des conditions cumulatives à remplir n’a pas rendu le dispositif incitatif ».

Accès direct à l’aide d’État

Certes, les chiffres font état d’une légère progression, puisque, sur l’ensemble des demandes d’aides, la part des entreprises de 50 à 300 salariés est passée de 5 % en septembre 2013 à 15,5 % en décembre. Mais Michel Sapin veut encore accélérer le mouvement et a ressorti la bonne vieille méthode de la carotte et du bâton. C’est ainsi que ces entreprises auront – dès le vote de la loi sur la formation professionnelle, dont l’examen au Parlement se termine – un accès direct à l’aide d’État, même en l’absence d’accord ou de plan. Mais dans un deuxième temps, elles auront l’obligation de négocier un accord (sauf si elles sont couvertes par un accord de branche) ou de mettre en place un plan d’action dans un délai qui sera précisé par décret. À défaut, elles encourront la même pénalité que les entreprises de plus de 300 salariés.

Cette pénalité incitera-t-elle davantage ces entreprises à se saisir du sujet ? Sans doute, au vu de l’expérience des accords seniors (7 000 accords et 15 000 plans d’action enregistrés sur l’année 2009 dans les entreprises de plus de 50 salariés). Bien sûr, comme avec les accords seniors, le risque existe de produire des textes formels, destinés simplement à se mettre en conformité avec la loi. Toutefois, souligne Annie Jolivet, « la négociation est l’occasion de se mettre autour de la table pour établir un diagnostic et des enjeux communs ». Pour la chercheuse, supprimer la pénalité pour les entreprises de 50 à 300 salariés était une erreur : « Cela a pu stopper des dynamiques enclenchées avec les accords seniors. »

Anticiper la reprise

Reste à savoir dans quelle mesure l’accélération de la négociation entraînera une hausse du volume des contrats de génération. Au ministère du Travail, on se garde bien de faire des projections chiffrées. « Nous savons bien que les contrats de génération ne créent pas ex nihilo des emplois. Mais cela peut être un outil pour inciter à recruter plus vite que prévu et anticiper la reprise. L’enjeu est aussi de pousser les entreprises à proposer aux jeunes des CDI plutôt que des CDD. Le discours des employeurs qui y ont eu recours est très positif. Nous comptons sur le bouche-à-oreille pour aider à l’appropriation du contrat de génération. »

LA MÉTALLURGIE DÉPLOIE SON ACCORD

La métallurgie est l’une des premières branches à avoir négocié un accord sur le contrat de génération. « Dans la continuité des accords seniors et GPEC conclus par la branche, nous avons négocié sur les contrats de génération pour inciter les entreprises à s’inscrire encore plus dans des démarches de gestion des âges, explique Florence Buisson, directrice juridique emploi formation de l’UIMM. Pour nous, l’enjeu est crucial : notre pyramide des âges est très déséquilibrée, avec beaucoup de seniors, et 100 000 recrutements à opérer chaque année jusqu’en 2020. » L’accord prévoit notamment de porter de 12 % à 15 % la part des moins de 26 ans dans les embauches en CDI, et de 24 % à 27 % celle des moins de 30 ans.

« Nous avons en outre commencé à déployer de nouveaux outils, comme un modèle type de livret d’accueil, un guide de transmission des compétences, ou encore un dispositif d’appui-conseil au contrat de génération », poursuit-elle. Ce dernier outil suscite pour l’instant peu de demandes. « Mais nous n’en sommes qu’à la première année d’application, et notre accord, signé en juillet, a été étendu seulement en octobre ».

Florence Buisson reste optimiste : « Si la situation économique s’améliore, le contrat de génération pourrait décoller, car il est adapté aux besoins de nos entreprises. »

Chiffres clés

→ 51,3 % des jeunes embauchés dans le cadre d’un contrat de génération étaient déjà présents dans l’entreprise avant leur embauche, 44 % en contrat d’alternance.

→ 67 % sont des hommes.

→ 59 % ont entre 22 et 25 ans, 37 % ont entre 18 et 21 ans.

→ 57 % ont un niveau inférieur au bac.

* Source : ministère du Travail, à mi-janvier 2014.

Auteur

  • ÉLODIE SARFATI