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Managers et ingénieurs incités à s’imprégner d’une culture santé-sécurité

Pratiques | RETOUR SUR… | publié le : 11.02.2014 | LAURENT POILLOT

Quatre ans après un démarrage discret, le RFFST n’avait pas vraiment fait école. Tout va changer en 2014. À son actif : un référentiel de compétences qui fait autorité et un catalogue d’outils pédagogiques remis à jour, en attendant un “Toefl” de la santé-sécurité au travail.

Octobre 2007. À Paris, la conférence sociale sur les conditions de travail se conclut sur un consensus : il faut encourager tous les ingénieurs et managers français, soit près de 5 millions de personnes, à détenir un socle minimal de connaissances sur les enjeux de la santé-sécurité au travail pour protéger les salariés. Pour faire bonne mesure, on décide d’imprégner les mentalités dès les formations initiales, dans le supérieur comme dans l’enseignement professionnel.

Mise en place

Le ministre du Travail de l’époque, Xavier Bertrand, confie à un professeur du Cnam, William Dab, titulaire de la chaire Hygiène et sécurité au travail, un rapport destiné à faire passer ce beau projet au stade des travaux pratiques. Dans le document qu’il remettra l’année suivante, courant juillet, aux ministres du Travail et de l’Enseignement supérieur, figurent douze “mesures concrètes”, dont la plus emblématique est la mise en place d’un Réseau francophone de formation en santé au travail (RFFST).

L’initiative passe inaperçue. Le scandale des suicides à France Télécom occupe alors tout l’espace médiatique. Le réseau est réellement lancé au cours du deuxième semestre 2009, le temps de réunir les partenaires et d’engager un coordinateur. On y retrouve l’Anact, la Direction générale du travail, la Cnamts et l’INRS. Plus deux autres acteurs moins connus : le Conseil national pour l’enseignement en santé et sécurité au travail (Cnesst) et le Groupe d’échange des préventeurs interentreprises (Gépi), réseau de 100 préventeurs issus des grandes entreprises. Ce comité détermine les thèmes de réflexion dont s’empareront ensuite des groupes de travail de bénévoles dans les domaines managériaux et des risques spécifiques (risque routier, chimique, TMS…).

Quant au coordinateur, il gère le site Internet et s’emploie à faire vivre les groupes de travail. Une trentaine de groupes ont vu le jour et neuf autres sont programmés pour 2014. Leurs contributions sont versées dans un wiki qui agrège les contenus au fil de l’eau. Budget annuel : près de 90 000 euros.

Un réseau sans statut juridique

Quatre ans après, l’influence du RFFST apparaît bien modeste. William Dab, son instigateur, reconnaît que « le réseau n’a pas reçu une adhésion massive, d’emblée. C’est le reflet du système de santé au travail en France, qui est très clivé. L’État pose la règle, l’assurance-maladie assure le risque et l’entreprise exerce sa responsabilité juridique. On a toujours vu une rivalité interdisciplinaire entre ces trois grands acteurs. Les faire coopérer prend du temps. C’est pourquoi j’avais fait le pari de monter un réseau sans statut juridique. Pas de statut, pas de lutte de pouvoir ».

Référentiels des bases essentielles

Le RFFST vise à présent un public plus large que les seuls formateurs en santé-sécurité. Le site Internet en fournit une bonne illustration. Le coordinateur, Thomas Furtado, s’est attelé à un gros travail d’épure pour offrir « un site plus attrayant et plus ergonomique ». William Dab compte sur lui pour inciter les encadrants à le fréquenter : « La priorité, c’est de réoutiller les managers, insiste-il. Il ne faut pas les culpabiliser, ni attendre d’eux qu’ils deviennent des experts – ils existent déjà. Il s’agit de les amener à mieux comprendre leur rôle dans l’organisation du travail. »

Les quatre cabinets ministériels successifs ont tous maintenu leur soutien au réseau. Michel Bridot, responsable du pôle formation initiale à l’INRS, fait observer que le référentiel de compé­tences demandé par le rapport Dab existe et fait autorité. « Le BES&ST* (lire : Best, NDLR), pour “Bases essentielles en santé et sécurité au travail”, avait été élaboré par l’INRS. Il est maintenant considéré comme “la” référence par la commission des titres d’ingénieurs », souligne-t-il.

C’est à cette aune que le Cnam a paramétré ses modules de santé-sécurité, désormais inclus dans tous ses parcours d’ingénieurs. Et qu’il a développé, pour les non-spécialistes, des cours ouverts et en ligne, des “Mooc”, dont l’un d’eux, intitulé Éléments de santé au travail pour les ingénieurs et managers, vient d’être lancé. Il prévoit une heure de travail par semaine durant six semaines. « Dès son lancement, début décembre, nous avons recueilli 5 000 inscrits », se félicite Wiliam Dab.

Autre réalisation attendue : un “Toefl” de la santé-sécurité que devra valider tout futur manager et ingénieur. Le Gépi lui a consacré six réunions depuis le printemps 2013. Il a déjà un nom : le Test on occupational safety and health. Et de grosses ambitions : « Les entreprises s’en serviront, promet Dominique Vacher, le porte-parole du Gépi. Nous ferons en sorte que cet “outil France” soit promu par les grandes entreprises au plan européen, puis mondial. »

* Le BES&ST fixe trois aptitudes, dont chacune renvoie à des ensembles de tâches et de savoirs associés : repérer dans l’entreprise les enjeux (humains, sociaux, économiques et juridiques) de la santé-sécurité, l’intégrer dans la gestion des activités et la conduite des projets, et contribuer à son management dans l’entreprise.

Auteur

  • LAURENT POILLOT