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La loi virtuelle « visant à reconquérir l’économie réelle… »

Enjeux | LA CHRONIQUE JURIDIQUE D’AVOSIAL | publié le : 28.01.2014 | Danièle Chanal

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La loi virtuelle « visant à reconquérir l’économie réelle… »

Crédit photo Danièle Chanal

L’année nouvelle verra-t-elle l’avènement de la loi visant à reconquérir l’économie réelle, adoptée en première lecture le 1er octobre 2013 et supposée applicable au 1er janvier de cette année ?

Dans ce cas, l’article L. 1233-90-1, issu de la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 et visant l’entreprise qui « envisage un projet de licenciement collectif ayant pour conséquence la fermeture d’un établissement », abrogé du même coup, aura eu une existence éphémère. Le nouvel article L. 1233-57-9, quant à lui, s’appliquera à l’entreprise, soumise à l’obligation de proposer un congé de reclassement, qui « envisage la fermeture d’un établissement qui aurait pour conséquence un projet de licenciement collectif ».

L’inversion de la chaîne de causalité entre la fermeture et les licenciements n’est pas anodine : l’information du comité d’entreprise sur le projet de fermeture intervient au plus tard à l’ouverture de la procédure d’information et de consultation prévue à l’article L. 1233-30, c’est-à-dire celle relative au licenciement collectif. Cela ne saurait surprendre, puisque le projet de fermeture constitue le cœur de « l’opération projetée et ses modalités d’application » au sens du texte précité qui renvoie lui-même à l’article L. 2323-15 imposant la saisine du comité d’entreprise « en temps utile des projets de restructuration et de compression des effectifs ». L’innovation est donc ailleurs.

Elle est tout d’abord dans les informations alors transmises au comité d’entreprise, en plus de celles normalement fournies dans le cadre de la consultation préalable aux licenciements collectifs pour motif économique : parmi les plus marquantes, on citera les actions envisagées [par l’entreprise] pour trouver un repreneur, les possibilités pour les salariés de déposer une offre de reprise et les différents modèles de reprise possibles, dont les sociétés co­opératives ouvrières de production et l’information du maire de la commune.

Elle réside ensuite dans l’obligation pour l’entreprise :

– de mettre en œuvre des actes positifs de recherche d’un repreneur, non sans avoir « réalisé sans délai un document de présentation de l’établissement », destiné auxdits repreneurs, le cas échéant « engagé la réalisation du bilan environnemental », qui établit un diagnostic des pollutions dues à l’activité de l’établissement, et « donné accès à toutes informations nécessaires aux entreprises candidates à la reprise » ;

– de rendre compte des résultats de ses démarches et de motiver son choix final, cession ou fermeture, devant le comité d’entreprise.

Elle se traduit enfin par l’intervention du juge commercial désigné arbitre, sur saisine du comité d’entreprise, du respect par l’entreprise des obligations précitées. Il pourra alors se faire assister d’un expert et devra entendre le dirigeant, les représentants du comité d’entreprise, le ministère public, le représentant de l’administration avant d’examiner la demande qui lui est soumise. À ce titre, il appréciera notamment « l’existence d’un motif légitime de refus de cession ».

La sanction du non-respect de ces obligations consistera possiblement dans le versement d’une pénalité, affectée à la Banque publique d’investissement, de vingt fois la valeur du smic par emploi supprimé, plafonnée cependant à 2 % du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise et dans le remboursement des aides publiques perçues dans les deux ans précédant le jugement.

Ainsi, dans le délai de l’article L. 1233-30, soit entre deux et quatre mois selon le nombre de licenciements envisagés, doivent être constatés l’absence d’offre ou le refus par l’entreprise des offres présentées…

Quant aux offres qui seraient susceptibles d’être acceptées, elles donnent lieu à une consultation du comité d’entreprise dans les nouveaux délais de droit commun issus de l’article L. 2323-3 et du décret du 27 décembre 2013, lesquels s’échelonnent entre un et quatre mois, sauf accord avec le comité…

C’est dire si la reconquête du réel s’annonce ardue…

Auteur

  • Danièle Chanal