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La pratique du “fini-parti” abandonnée

Pratiques | RETOUR SUR… | publié le : 21.01.2014 | SOLANGE DE FRÉMINVILLE

Depuis 2012, la Communauté d’agglomération de Perpignan Méditerranée recueille les fruits de la réorganisation de son service de collecte des déchets : forte baisse des accidents du travail, absence de maladies professionnelles, diminution de l’absentéisme.

Rien ne sera plus comme avant. Le service de collecte des déchets de Perpignan Méditerranée a opéré une véritable révolution interne pour améliorer la santé de ses 185 agents et la qualité du service. “Avant”, c’était dans les années 2000. Les accidents du travail se multipliaient : en 2009, le taux de fréquence (147,25) était 2,5 fois supérieur à la moyenne du secteur, et le taux de gravité s’élevait à 2,84. Les troubles musculo-squelettiques progressaient, avec quatre maladies professionnelles reconnues. C’était le temps où les chauffeurs se pressaient de faire leur tournée. Les ripeurs sautaient du camion, couraient prendre les bacs, les levaient à bout de bras pour déverser les déchets dans la benne, puis replaçaient les bacs à la va-vite sur les trottoirs. Les lève-conteneurs ne servaient que pour les grands bacs collectifs. Aussitôt la tournée finie, chacun pouvait rentrer chez lui : c’était le temps du “fini-parti”.

Aujourd’hui, au terme d’une réorganisation complète du travail, le taux de fréquence des accidents est tombé à 81,75 et le taux de gravité à 1,83 en 2012. Aucune nouvelle maladie professionnelle n’a été déclarée. Saluant ces bons résultats, la Carsat Languedoc-Roussillon a décerné un “Challenge de la prévention” à Perpignan Méditerranée le 5 décembre dernier. Comment s’est réalisé ce changement radical ? En premier lieu, en raison d’un engagement fort de la collectivité. Celle-ci a signé une charte, en décembre 2009, avec la Carsat Languedoc-Roussillon, prévoyant la mise en application de la recommandation R 437 de la Cnams, qui précise toutes les mesures nécessaires à la réduction des risques dans le secteur de la collecte des déchets.

Étude en cinq thèmes

Deuxième point fort : la méthode. C’est en mode projet que Nathalie Privat, chef du service Prévention, hygiène et sécurité de Perpignan Méditerranée, a piloté la démarche. Cinq groupes de travail, réunissant des élus de l’agglomération, des délégués syndicaux, des membres du CHS, ainsi que des agents (ripeurs, chauffeurs, agents de maîtrise), ont planché sur cinq thèmes : le donneur d’ordre (ses obligations), les véhicules, le matériel et les équipements, l’organisation du service, les compétences et la formation. « Sur chaque thème, les groupes de travail étudiaient les écarts entre la situation réelle et les exigences de la R 437, qui constitue une référence neutre. Ce n’était pas la direction qui le voulait, mais une recommandation votée de manière paritaire au sein de la Cnam. Cela a permis d’éviter des débats trop passionnés », souligne Nathalie Privat.

Au cours de l’année 2010, les groupes de travail se sont réunis une fois tous les deux mois, mobilisant au total 75 personnes. Le Fonds national de prévention de la CNRACL* a versé une aide de 126 400 euros pour financer le temps passé par les agents dans ces réunions. Au final, le comité de pilotage, associant des cadres de l’agglomération, des délégués syndicaux, le médecin du travail, des représentants de la Carsat et de la CNRACL, a validé un plan d’action de 55 mesures. En 2011, celui-ci a été testé pendant six mois dans un bassin de collecte, puis étendu dès 2012 à l’ensemble du territoire. Premier changement important : le service s’est doté de véhicules neufs, équipés de lève-conteneurs automatiques.

Second bouleversement : la réorganisation des tournées, désormais planifiées, gérées et géolocalisées à l’aide de logiciels selon trois principes : une pause obligatoire de 20 minutes au milieu du service, des collectes, celles-ci ayant lieu de préférence d’un seul côté dans les rues à double sens, et des marches arrières réduites au minimum. « Dans ce contexte, l’abandon du fini-parti s’est imposé de lui-même, sans que les débats se soient cristallisés sur cette mesure », commente Sébastien Le Métayer, ingénieur-conseil à la Carsat Languedoc-Roussillon.

La collectivité a également investi dans la construction d’un nouveau centre technique, réaménagé les locaux réservés aux agents, et confié à un prestataire le nettoyage des tenues de travail. Elle a formé 82 sauveteurs secouristes du travail et 68 personnes à la prévention des risques liés à l’activité physique, et a aussi mis en place une « causerie sécurité » dans chaque bassin, tous les 15 jours, pour faire le point sur les incidents, comme sur les règles à respecter. Aujourd’hui, 82 % de la recommandation R 437 est appliquée.

Travail difficile

Les limites, selon les syndicats, qui se disent globalement très satisfaits : un travail plus monotone, d’après FO; aucune progression de la rémunération, mise à part une petite prime annuelle, selon l’Unsa. Pour Nathalie Privat, « le travail reste difficile, et des agents sont usés ». Elle n’exclut pas l’apparition de nouvelles maladies professionnelles.

* CNRACL : Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.

EFFICACE ET MOINS COÛTEUX

La réorganisation du service de collecte des déchets a permis de faire d’importantes économies. L’optimisation des tournées a eu pour résultat de réduire la fréquence des passages dans quelques secteurs. La casse sur les véhicules et les bacs a nettement diminué, de même que la consommation de carburants. L’absentéisme est passé de 10 % à 7 %, grâce à l’amélioration des conditions de travail et aux périodes de repos (augmentation du nombre de samedis non travaillés, congés garantis).

D’après les élus de l’agglomération, la qualité du service s’est également nettement améliorée.

Auteur

  • SOLANGE DE FRÉMINVILLE