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AllemagneDEUTSCHE TELEKOM TACLE À L’EXTERIEUR SUR SA RSE

Pratiques | International | publié le : 14.01.2014 | MARION LEO

Le syndicat Ver.di et la fédération internationale UNI reprochent à l’opérateur allemand les conditions de travail imposées aux salariés de ses filiales hors d’Allemagne. Et réclament un accord-cadre international.

Comment les salariés travaillant dans une entreprise où Deutsche Telekom (DT) détient une participation, ou dans une filiale de l’opérateur à l’étranger, perçoivent-ils leurs conditions de travail ? Alertée par les plaintes émises depuis déjà une dizaine d’années par les salariés de T-Mobile USA, filiale américaine de la multinationale, la fédération syndicale internationale UNI Global Union a mené pour la premiè­re fois, de mars à mai 2013, avec le syndicat allemand des services Ver.di et d’autres syndicats affiliés, une enquête auprès des salariés du groupe dans sept pays : Croatie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro, Roumanie, Grèce, République tchèque et États-Unis ; 1 800 salariés y ont participé.

Culture de l’intimidation selon les syndicats

Les résultats, rassemblés dans un livre noir, dévoilé le 13 décembre à Bonn, sont préoccupants. Plus de la moitié des collaborateurs interrogés ont déclaré devoir effectuer des tâches menaçant leur santé ou leur sécurité. De nombreux salariés ont indiqué avoir fait l’objet de menaces, de harcèlement ou avoir été témoins de telles pratiques. « Dans notre centre d’appels, on se croirait sur un champ de bataille. Tout le monde a peur », écrit l’un d’eux au Monténégro. Aux États-Unis, 88 % des salariés interrogés ont déclaré que la direction essayait activement d’empêcher le personnel de se syndiquer. « L’enquête a malheureusement confirmé nos craintes : il règne dans les entreprises de Deutsche Telekom une culture de l’intimidation, de la peur, avec des conséquences graves sur la santé », a déploré Philip Jennings, secrétaire général d’UNI.

Reproche principal de Ver.di : la multinationale octroie à ses salariés à l’étranger des droits moins importants qu’en Allemagne. « Deutsche Telekom a une double morale inexplicable. Bien sûr, nous nous disputons aussi en Allemagne. Mais nous avons des conditions qui nous permettent de le faire sans que cela conduise à une remise en cause de l’existence de l’autre. Et nous sommes étonnés que cela soit possible à l’étranger », dénonce Lothar Schröder, membre de la direction de Ver.di et vice-président du conseil de surveillance de DT. Selon Jan Jurczyk, porte-parole de Ver.di, l’enquête n’est certes pas représentative, mais elle indique une tendance claire et confirme un soupçon : « Personne à la direction ne peut ignorer les problèmes. Pire, nous pensons que la direction demande à ses filiales de ne pas réagir tant qu’il n’y a pas de procès. »

70 % de salariés satisfaits selon DT

Au siège de DT à Bonn, les accusations sont réfutées en bloc. « Il s’agit de reproches injustifiés. Nous menons nos propres enquêtes de satisfaction dans le monde entier, une fois, voire deux fois par an. Lors de la dernière enquête, 70 % des 126 000 collaborateurs interrogés ont répondu qu’ils étaient contents de travailler pour DT », a rétorqué une porte-parole du groupe.

Ver.di demande à l’entreprise de conclure un accord-cadre global avec UNI pour garantir le respect des droits des salariés dans toutes les entités du groupe à travers le monde, et de mettre en place un comité d’entreprise mondial. Certes, DT a pris depuis longtemps des engagements sem­blables et revendique un rôle de chef de file en matière de responsabilité sociale. Mais, selon le porte-parole de Ver.di, il s’agit d’engagements volontaires dont le contrôle incombe à la seule entreprise. « Un accord-cadre global a plus de valeur : il implique un partenaire, qui peut veiller à son respect », explique-t-il. De tels textes existent déjà en Allemagne, essentiellement dans l’industrie, notamment chez Volkswagen ou Siemens ; mais pas dans le secteur des services.

Pour l’heure, la direction n’a pas réagi aux revendications. Ver.di espère que le nouveau patron de DT, Timotheus Höttges, qui a succédé le 1er janvier 2014 à René Obermann, se montrera plus sensible aux problèmes de ses salariés à l’étranger. La date de publication du livre noir n’est ainsi pas un hasard. « Il s’agit d’un appel lancé à la future direction », souligne le porte-parole.

Auteur

  • MARION LEO