Le climat de sinistrose qui règne en France participe paradoxalement à la méconnaissance de l’état social de la population française. Tout le monde ou presque semble mécontent de son sort, et des slogans sur le “matraquage fiscal”, par exemple, unifiant la grogne sous une bannière simpliste, participent de ce brouillage général des repères.

Pourtant, la France n’est pas une, mais multiple, et l’édition 2013 du portrait social dressé par l’Insee à partir des chiffres dont elle dispose a le mérite de contribuer à rétablir les faits et de permettre de comprendre les disparités profondes de la société française. Si le revenu salarial moyen a continué d’augmenter de 0,7 % sur la période 1995 et 2011, il a ralenti depuis 2008 et même baissé de 0,2 % en 2011. Mais, surtout, les écarts de revenu salarial sont élevés : le quart des personnes aux salaires les plus élevés perçoivent en moyenne dix fois plus que le quart de ceux qui ont les salaires les plus faibles.

L’espérance de vie et, plus généralement, les conditions de santé sont largement liées aux carrières professionnelles. Les conditions de travail ont tendance à se détériorer pour tous, mais, là encore, avec d’importantes disparités dans l’exposition aux risques psychosociaux. Les différences affectent également le taux d’effort pour se loger, les durées d’emprunt (qui s’allongent pour les jeunes), les conditions de vie, l’éducation, le décrochage scolaire, etc.

Bref, peu de domaines échappent à cette tendance générale à la dispersion d’une société en fonction de critères d’emplois, d’origine sociale et d’âge notamment. Des chiffres qui, plus que jamais, posent la question de la cohésion sociale.

France, portrait social Coordonné par M. Beffy et H. Guedj, collection Insee Références, 280 pages, 19,30 euros.