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Vers un CHSCT-E, “E” pour environnement

Enjeux | LA CHRONIQUE JURIDIQUE D’AVOSIAL | publié le : 19.11.2013 |

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Vers un CHSCT-E, “E” pour environnement

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Le droit de l’environnement, qui devrait bientôt faire son apparition dans notre Code civil par l’intermédiaire d’un article relatif au préjudice écologique, a fait une entrée discrète mais probablement décisive dans le Code du travail cette année. Cette immixtion semble en particulier dessiner les contours d’un futur comité d’hygiène, de sécurité, des conditions de travail et de l’environnement, ou “CHSCTE”.

Alors que le terme “environnement” était inconnu ou presque du Code du travail et de ses 10 000 articles, la loi n° 2013-316 du 16 avril 2013 relative « à l’indépendance de l’expertise en matière de santé et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte » a mis fin à cette situation.

Elle crée en effet un nouveau “droit d’alerte” en matière de santé publique et d’environnement : d’une part, à destination des salariés qui estimeraient « de bonne foi, que les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en œuvre par l’établissement font peser un risque grave sur la santé publique ou l’environnement », d’autre part et surtout à destination des membres du CHSCT.

En effet, si la proposition de loi relative à la création de la Haute Autorité de l’expertise scientifique et de l’alerte en matière de santé et d’environnement, à l’origine de la loi précitée, prévoyait la création d’une cellule d’alerte sanitaire et environnementale dans les entreprises de plus de dix salariés, c’est vers le CHSCT – et donc uniquement vers les entreprises comptant au moins 50 salariés – que le législateur s’est finalement tourné.

Ses membres élus disposent désormais d’un droit d’alerte, énoncé par l’article L. 4133-2 du Code du travail, qui contraint l’employeur à étudier la situation à risque. Par ailleurs, l’article L. 4614-10 du même code dispose que le CHSCT doit être réuni en cas d’événement grave lié à l’activité de l’établissement ayant porté ou ayant pu porter atteinte à l’environnement.

Le choix de l’extension des prérogatives du CHSCT, déjà très conséquentes, au domaine de l’environnement semble avoir la faveur des partenaires sociaux.

Ainsi, dans certaines branches, ces derniers ont clairement confié au CHSCT le traitement des questions environnementales dans l’entreprise.

La branche de l’industrie du pétrole a depuis longtemps affirmé que le CHSCT devait être consulté dans le domaine de l’environnement (accord du 19 juin 1995 relatif à la sécurité au travail). Plus récemment, la convention collective nationale des entreprises du secteur privé du spectacle vivant du 3 février 2012 a prévu, dans son article XV.5, la mise en place d’une commission de configuration afin de travailler à la création d’un CHSCTE (comité d’hygiène et de sécurité aux conditions de travail et à l’environnement) de branche.

Certes, les nouvelles attributions du CHSCT en matière d’environnement, telles qu’elles figurent dans le droit positif, sont à ce jour limitées aux éléments précités. Mais, sauf à ce que les futures conclusions de la mission relative à l’état des lieux et aux perspectives d’évolution du CHSCT, confiée au professeur Verkindt le 17 juillet 2013 par Michel Sapin, conduisent le législateur à freiner l’extension des attributions de cette instance, il est probable que ces nouveaux droits ne constituent qu’une première étape dans la construction d’un volet environnemental dans lequel sa contribution serait entière.

Pour s’en convaincre, au-delà du contenu des négociations entre les partenaires sociaux au niveau de certaines branches, il est intéressant de noter que figuraient, dans les débats parlementaires relatifs à la loi susvisée, une extension des pouvoirs d’enquête du CHSCT aux alertes environnementales, une nouvelle consultation obligatoire du CHSCT en cas de changement des produits ou des procédés de fabrication utilisés dans l’établissement susceptible de faire peser un risque sur l’environnement, ainsi qu’un nouveau cas de recours à un expert en cas d’événement lié à l’activité de l’établissement ayant porté ou ayant pu porter atteinte à l’environnement.

Gageons que de telles propositions, qui ont pour l’heure été écartées, reviendront dans les débats et trouveront un meilleur sort lorsque l’entrée du droit de l’environnement dans le droit du travail aura été “digérée” par les différents acteurs de l’entreprise.

Marie Petit, avocate, et Pierre-Alexis Dumont, avocat associé au cabinet Actance, membre d’Avosial, le syndicat des avocats en droit social.