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Enquête

LES TARIFS AUGMENTENT, MAIS LES FORMALITÉS DIMINUENT

Enquête | publié le : 12.11.2013 | MIREILLE WEINBERG

Les nouvelles règles de maintien de garanties santé et prévoyance pour les salariés quittant l’entreprise vont conduire à des hausses de tarifs variables selon les politiques de ressources humaines mises en œuvre. La gestion administrative est simplifiée.

L’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 et la loi sécurisation de l’emploi du 14 juin ont modifié et élargi les conditions dans lesquelles les salariés qui quittent une entreprise peuvent continuer à bénéficier des garanties complémentaires santé et prévoyance de leur ancien employeur. La « portabilité des droits santé et prévoyance », mise en place en 2008, subit deux changements majeurs : la durée maximale de maintien des droits pour les anciens salariés passe de 9 à 12 mois, et elle devient gratuite pour ceux qui en demandent le bénéfice. L’entrée en vigueur des nouvelles mesures est prévue le 1er juin 2014 pour les garanties santé et un an plus tard, le 1er juin 2015, pour la prévoyance (garanties décès, arrêt de travail et invalidité).

Première conséquence : les tarifs de ces contrats vont augmenter. D’abord parce qu’il faut garantir trois mois de plus et, ensuite, parce qu’il faut que quelqu’un paie pour le maintien de garanties. Si, pour le salarié partant, c’est désormais gratuit, ce sont les employeurs et les salariés actifs qui vont en supporter la charge via une augmentation des cotisations de leur contrat (système dit de la « mutualisation »).

De 1,5 % à 7,8 % d’augmentation

« Selon une étude que nous avons réalisée (1), l’impact global devrait être compris entre 1,5 % et 7,8 %. La santé devrait être plus coûteuse, avec des hausses comprises entre 1,9 % et 8,3 % contre 1,2 % à 6,6 % pour la prévoyance, explique Jean-Philippe Allory, directeur général d’Adding, cabinet d’actuariat et de conseil en protection sociale. Les entreprises à fort turnover ou qui emploient beaucoup de CDD pour des durées plutôt longues, ou encore celles qui ont fait de la rupture conventionnelle du contrat de travail leur étendard, seront davantage impactées que les autres. Outre la politique de ressources humaines menée par les entreprises, l’autre facteur déterminant, mais sur lequel elles n’ont aucune prise, va être l’évolution de la durée du chômage. »

Les tarifs ne vont, dans un premier temps, augmenter que pour les garanties santé, la prévoyance sera traitée plus tard, en 2015. Et ils ne vont pas nécessairement augmenter pour toutes les entreprises. « Celles qui, depuis 2008, avaient déjà opté pour le système de la mutualisation plutôt que pour le financement d’une partie de la prime par le salarié partant, ne subiront, chez nous, aucune hausse de tarif liée à la portabilité, dit Patricia Delaux, directeur de l’activité santé collective à Axa. Pour les autres entreprises, en revanche, celles qui vont devoir passer du cofinancement à la mutualisation, le taux moyen d’augmentation s’établit à 2,75 % au 1er janvier ». Elle précise qu’une autre hausse sera appliquée au 1er janvier 2015 en fonction de l’évolution du taux et de la durée du chômage.

« Les différents assureurs consultés nous ont annoncé une hausse de 4 % pour la portabilité en santé, mais nous attendons les résultats de notre étude personnalisée », fait valoir Jean-Bernard Naffrechoux, directeur de la protection sociale à Veolia Eau (15 000 salariés). Même hausse annoncée dans le groupe Les Mousquetaires (22 000 salariés concernés) ou encore à Accenture (5 200 salariés). Comme presque partout, elle devrait s’y appliquer en plusieurs étapes, avec seulement la moitié des 4 % en 2014.

Au final, « la hausse moyenne appliquée par les assureurs sur une année pleine pourrait être de 5 % à 6 %, mais nous aurons une meilleure vision après au moins deux années d’application », anticipe Yves Trupin, associé et directeur général du cabinet d’actuariat Actense.

Bonne nouvelle cependant pour les entreprises, la gestion des départs va être simplifiée, surtout pour celles qui, depuis 2008, pratiquaient le cofinancement. Ces entreprises devaient prélever auprès du salarié partant sa part de cotisation d’assurance santé et prévoyance en une fois sur son solde de tout compte ou en plusieurs fois avec la mise en place d’un prélèvement automatique. Mais elles devaient surtout vérifier périodiquement que le salarié était toujours au chômage, condition pour bénéficier de la portabilité. Quand ce n’était plus le cas (s’il avait retrouvé du travail, par exemple), elles devaient lui rembourser sa part de prime non consommée, ce qui supposait une gestion assez lourde. « Tout cela est fini, puisque c’est désormais la gratuité qui prédomine. Les formalités pèsent maintenant sur les assureurs, plus sur les entreprises », précise Yves Trupin.

Cette simplification ne sera cependant pleinement effective qu’en 2015, quand les nouvelles règles s’appliqueront aussi à la prévoyance. En attendant, cela risque d’être un peu compliqué pour les entreprises, qui vont devoir se mettre à la mutualisation dès 2014 en santé, mais qui pourront attendre 2015 pour le faire en prévoyance.

« Deux comportements sont possibles : les pratico-pratiques vont, pour se simplifier la vie, basculer en mutualisation dès 2014 pour la santé comme pour la prévoyance, et les jusqu’auboutistes, eux, appliqueront la gratuité en santé, mais conserveront le cofinancement en prévoyance jusqu’en 2015 », conclut Pierre-Alain Boscher, directeur métier en protection sociale chez Optimind Winter.

(1) Approche méthodologique d’évaluation du coût de la portabilité, 19 septembre 2013.

Auteur

  • MIREILLE WEINBERG