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Enquête

LES INCERTITUDES D’UN ACCORD COLLECTIF HISTORIQUE

Enquête | publié le : 12.11.2013 | CAROLINE COQ-CHODORGE

La branche industrie pharmaceutique vient de signer un avenant à l’accord collectif en prévoyance et santé. Considéré comme bien géré, ce contrat de branche satisfait presque tous les partenaires sociaux mais n’échappe pas aux dernières évolutions législatives.

Plus de 80 000 salariés couverts et 70 000 ayants droit : le régime de prévoyance collectif de la branche de l’industrie pharmaceutique est l’un des plus larges et l’un des plus anciens, puisqu’il remonte à 1965. Les incertitudes sur les clauses de recommandation ont conduit les partenaires sociaux à repousser à 2014 un nouvel accord, et un simple avenant a été signé le 25 septembre 2013.

Même la Fnic-CGT, seule non-signataire, reconnaît que « c’est un excellent accord, solidaire, très bien géré, qui ne peut qu’être cité en exemple », explique son secrétaire fédéral Manuel Blanco.

D’importantes réserves

Jusqu’à la nouvelle négociation prévue en 2014, l’Apgis reste l’assureur de la branche en santé et Axa celui de la prévoyance. La branche compte une majorité de très grandes entreprises : plus de la moitié ont plus de 200 salariés, et 5,6 % plus de 2 000. Seules 20 % de ces entreprises ne souscrivent pas au contrat collectif de branche, car elles offrent à leurs salariés un contrat collectif propre aux garanties supérieures.

Ce régime de branche peut s’appuyer sur d’importantes réserves, supérieures aux obligations prudentielles : 300 millions d’euros pour 110 millions d’euros de cotisations prélevées chaque année. Les frais de gestion sont très faibles, inférieurs à 7 %. La branche peut donc se permettre d’améliorer ses prestations sans augmenter les cotisations : l’avenant du 25 septembre prévoit une meilleure prise en charge du forfait hospitalier, à 100 % au lieu de 80 % aujourd’hui, une meilleure prise en compte du degré de correction en optique, une couverture prévoyance étendue aux conjoints, etc.

L’avenant organise aussi la portabilité des droits pour les salariés dès le 1er juin 2014. Conformément à l’article 1 de l’ANI, elle devient gratuite – elle était jusqu’ici payante – et passe de 9 à 12 mois. Le coût de cette portabilité est encore mal évalué. « Entre les actuaires et la chambre patronale, des chiffres circulent, qui vont de 0,5 % à 2,2 % du montant des cotisations », explique Jean-François Chavance. Le délégué fédéral FCE-CFDT est cependant confiant : « La branche peut assumer ce coût, quel qu’il soit, sans relever les cotisations. »

La CGT refuse de son côté de signer en raison de « la séparation des régimes actifs et retraités », explique son secrétaire fédéral Manuel Blanco. Depuis 2007, 15 000 retraités bénéficient d’un contrat à part. Ils assument 100 % de leur cotisation (les salariés bénéficient d’une prise en charge à 60 % par l’employeur). Mais un fonds de solidarité a été créé, alimenté par les actifs : les retraités bénéficient d’une aide de 76 euros annuels, revalorisée à 100 euros par l’avenant du 25 septembre. Ce contrat collectif reste cependant plus coûteux qu’un contrat individuel pour un jeune retraité. « À la différence de la plupart des contrats individuels, notre contrat collectif ne prend pas en compte le critère de l’âge dans le calcul des cotisations, explique Pascal Le Guyader, directeur des affaires générales, industrielles et sociales du Leem. Il devient compétitif aux alentours de 70 ans. Il nous faut communiquer pour convaincre les jeunes retraités de rejoindre ce régime. »

La négociation a aussi été l’occasion pour les partenaires sociaux de mesurer l’impact de la fin de l’exonération fiscale des cotisations employeurs, prévue dans le projet de loi de finances pour 2014. « Cela aura des conséquences non négligeables pour l’imposition sur le revenu des salariés en 2015, explique Pascal Le Guyader. Ils devront ajouter 600 à 1 000 euros de revenus à leur déclaration. Certains syndicats m’ont déjà demandé d’intégrer cet élément dans la négociation sur les salaires. » Côté CFDT, Jean-François Chavance regrette que cette mesure soit supportée « uniquement par les salariés ». Et ce n’est que le début du réajustement de la fiscalité des contrats collectifs, indissociable de leur généralisation. « Ce que l’on craint tous, explique Pascal Le Guyader, c’est la fin de l’exonération sociale, estimée à 2,5 milliards d’euros sur les contrats collectifs ».

Auteur

  • CAROLINE COQ-CHODORGE