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« Nous souhaitons mettre en place le case management »

Enquête | publié le : 01.10.2013 | V. L.

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« Nous souhaitons mettre en place le case management »

Crédit photo V. L.

E & C : Peut-on faire un bilan de la prévention de la désinsertion professionnelle (PDP) telle qu’elle est pratiquée en France depuis plusieurs années ?

D. M. : Le déclenchement administratif du contact avec les salariés en arrêt de travail se réalise dès trois mois d’arrêt, mais, en réalité, la situation est réglée plus tardivement. En général, le traitement du dossier individuel d’un salarié présentant un risque de non-retour à l’emploi intervient plusieurs mois après la perte d’emploi. C’est bien trop tard. Dans le cadre d’un audit interne, nous avons fait un bilan mitigé de la PDP. Certains objectifs ont été atteints, comme la meilleure coordination et le progrès du dialogue entre les acteurs impliqués. Mais nous avons des interrogations sur l’effectivité du dispositif compte tenu des moyens alloués. Nous ne pouvons pas déterminer actuellement si les retours à l’emploi ont été améliorés. Les personnes qui entrent dans ces parcours y parviennent par des voies diversifiées, et nous ne savons pas les retrouver ensuite. La PDP reste une priorité, mais nous devons mieux l’organiser et simplifier son accès par une porte d’entrée unique et un suivi jusqu’au bout du processus. Nous devons être capables d’en mesurer les effets.

E & C : La feuille de route issue de la conférence sociale de juin 2013 indique parmi ses priorités la prévention de l’usure professionnelle et le maintien dans l’emploi, en indiquant que la Cnamts mènera une expérimentation sur le retour à l’emploi des victimes d’accidents du travail graves et complexes. Où en est cette expérimentation ?

D. M. : Après avoir réalisé un benchmark des pratiques auprès de nos homologues en Allemagne, en Suisse, dans plusieurs pays du nord de l’Europe et en Espagne, nous souhaitons mettre en place le case management, qui a prouvé son efficacité dans ces pays. Il s’agit d’un accompagnement individualisé vers le retour à l’emploi des salariés les plus en difficulté, combinant de graves séquelles sur leur santé et des conditions d’isolement participant à leur risque de désinsertion. Cette démarche relève de la prévention secondaire : on souhaite limiter la gravité des conséquences d’un accident ou d’une maladie. N’oublions pas qu’en France, 10 % des accidents les plus graves représentent 60 % à 70 % des coûts pris en charge par la branche AT-MP.

E & C : Plus précisément, quelle serait la valeur ajoutée du case management ?

D. M. : Ce processus est très précoce. Idéalement, il commence le jour même de l’accident ou de l’arrêt maladie. C’est un coaching individuel. Le “gestionnaire de cas” traitera de toutes les situations portées à sa connaissance en devenant en quelque sorte le “double” de la personne. Il exercera une fonction de coordination difficile à réaliser par une structure existante. Dans un environnement complexe, il guidera l’assuré pour qu’il bénéficie des soins nécessaires, des services sociaux et des différents accompagnements possibles vers le retour à l’emploi.

En Allemagne ou en Suisse, le gestionnaire de cas contacte l’entreprise en l’alertant sur le fait que son salarié est entré dans le dispositif et lui demande de préserver le poste. Grâce au case management, plusieurs pays européens, dont l’Allemagne et la Suisse, ont considérablement diminué leurs niveaux d’indemnisation et ont réduit les taux d’incapacité. Ils ont pu également investir trois fois plus dans des dispositifs de réhabilitation et dans la prévention.

E & C : Quelles sont les prochaines étapes de l’expérimentation ?

D. M. : Nous avons lancé un marché public, et des cabinets de consultants spécialisés se sont portés candidats. Nous sommes en train de dépouiller les offres, et, à partir de novembre, nous travaillerons sur la conception du dispositif. Si sa faisabilité est bonne, des expérimentations en région seront lancées pendant au moins un an et demi, à compter de début 2014. Nous prévoyons également, d’emblée, une procédure d’évaluation incluant les gains en santé aussi bien que les retours sur investissement afin de s’assurer de la soutenabilité du projet. La généralisation pourrait être réalisée à la fin de la convention d’objectif et de gestion (COG), en 2017.

Auteur

  • V. L.