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Le nouveau régime social de France Télévisions séduit

Pratiques | publié le : 17.09.2013 | HUBERT HEULOT

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Le nouveau régime social de France Télévisions séduit

Crédit photo HUBERT HEULOT

Déclinaison de la fusion du groupe France Télévisions en 2009, le nouveau régime social signé fin mai entre désormais en application. Adopté par tous les syndicats après quatre ans de négociation, il introduit davantage de souplesse dans la gestion des RH tout en préservant la plupart des acquis sociaux.

Certes, tout dépend maintenant du doigté des chefs de services, des rédacteurs en chef et de l’encadrement dans sa mise en application ; mais la négociation du nouveau régime social de France Télévisions est déjà en soi un exploit. Tel est le sentiment général dans l’entreprise alors que les 10 200 salariés reçoivent, depuis le mois de juillet, l’avenant à leur contrat de travail résultant de l’accord signé le 28 mai dernier, qui crée un nouveau régime social. Ce pavé de 316 pages unifie les métiers, les classifications, les grilles de salaires, l’aménagement du temps de travail et les progressions de carrière.

L’exercice était hardi dans une entreprise aussi complexe : des chaînes de télévision et de radio (France 2, France 4, France 5, France Ô, Radio France Outremer) et autant de traditions sociales ; 49 sociétés au total. Par la volonté de Nicolas Sarkozy et de la loi du 5 mars 2009, celles-ci ont été absorbées par leur holding, France Télévisions. Depuis, un lifting social s’imposait. Ne serait-ce que pour permettre aux salariés de travailler ensemble. Mais aussi pour faire économiser à France Télévisions « plusieurs dizaines de millions d’euros sur une masse salariale d’un milliard d’euros par an », indique Patrice Papet, directeur général délégué à l’organisation, aux ressources humaines et projet d’entreprise du groupe.

Après quatre ans d’élaboration dans un contexte mouvementé – changement d’équipe de direction, de Patrick Carolis à Rémi Pfimlin, alternance politique, loi sur la représentativité – le texte a été signé par tous les syndicats (CGT, CFDT, SNJ, FO) dans une unanimité inédite à la télévision publique. « Cet accord est porteur d’un progrès global », estime Marc Chauvelot, délégué de la CGT, qui domine à France Télévisions avec 37 % des voix (la CFDT est à 20,8 %, le SNJ à 11,5 % et FO à 10,8 %). « Ce nouveau statut collectif démontre la capacité de France Télévisions à se moderniser et à s’adapter aux évolutions de son environnement, à l’émergence de nouveaux usages et de nouveaux supports, commente Patrice Papet. Sur les différents thèmes qu’il traite – les classifications, le temps de travail, le mode de gestion sociale – c’est un texte comparable à ceux de grandes entreprises du secteur privé. »

Première évolution, le cadre du travail d’un salarié peut changer. Il est moins défini par un poste que par un type d’emploi, voire de missions, qui peuvent s’exercer de plusieurs façons et en plusieurs endroits. Un journaliste est considéré d’emblée comme en mesure d’accomplir sa tâche sur tous les supports de l’information, depuis l’écrit jusqu’au Web, en passant par l’image et la radio. Cette souplesse vaut pour les deux grandes catégories de personnel : techniciens et administratifs d’un côté, journalistes de l’autre, de sorte qu’ils puissent non seulement passer d’une chaîne à l’autre, ces grandes “chapelles” au sein de France Télévisions, mais aussi travailler pour plusieurs d’entre elles.

La nomenclature des métiers et des emplois, leur évolution et la classification sont scellées, pour chaque catégorie, dans deux livres séparés au sein de l’accord. Mais un livre commun les précède, instituant les mêmes principes de gestion des parcours professionnels, la création d’un compte épargne-temps ainsi que les droits et avantages sociaux. « Le statut unique du salarié de France Télévision existe bel et bien même s’il subsiste des spécificités », note Patrice Papet.

Le temps de travail a constitué, dès le départ, la grande affaire de la négociation, lancée par la dénonciation en 2009 de tous les accords sociaux précédents. Quatre ans après, le forfait-jours est étendu. Limité aux cadres chez les techniciens, il devient pour ainsi dire la règle (197 jours par an) pour les journalistes (lire l’encadré p. 16).

Fin des augmentations automatiques

Autre grand changement, les commissions paritaires nationales disparaissent. La direction y présentait, pour avis, les recrutements et les promotions ; les mesures disciplinaires y étaient instruites. Ces commissions sont ramenées à l’échelle des délégués du personnel d’établissement. « À France 3, tout cela se passera en région. Je le regrette pour l’égalité de traitement entre les salariés », estime Françoise Chazeau, déléguée Force ouvrière.

Dernière évolution notable, les augmentations automatiques ont disparu. « Le système était fatigué. Avec un point d’indice bloqué depuis dix ans, elles ne suffisaient plus. Pour compenser, les promotions se pratiquaient à tour de bras », raconte Patrice Christophe, de la CFDT. Les progressions de carrière seront davantage fonction des compétences exercées. Les hausses de salaire seront plus rapides en début de carrière. Elles dépendront davantage de l’ancienneté qu’auparavant, sur une durée allongée jusqu’à trente-six ans de carrière. Pour tous, une évolution minimale est prévue tous les cinq ans. Marc Chauvelot, de la CGT, estime que « dans une période de vaches maigres, on ne s’en sort pas si mal pour ce qui est du système salarial ».

Une négociation complémentaire va s’ouvrir pour les métiers artistiques, question jugée jusqu’ici trop délicate. Le résultat sera intégré à l’accord global. Une autre sur l’harmonisation des salaires, d’ici à la fin de l’année, doit éliminer les anomalies résultant des nouvelles grilles de classification.

L’ESSENTIEL

1 Le nouveau régime social de France Télévisions, signé par toutes les organisations syndicales, rapproche la GRH du groupe public de celle des entreprises privées.

2 Il introduit davantage de souplesse dans l’affectation des effectifs et dans le temps de travail, une plus grande individualisation des carrières, et il tend à créer un statut unique.

3 La direction en espère plusieurs dizaines de millions d’euros d’économies. Les syndicats soulignent que la plupart des acquis sociaux sont conservés.

Auteur

  • HUBERT HEULOT