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Les syndicalistes de Veolia prennent de la hauteur

Pratiques | RETOUR SUR… | publié le : 10.09.2013 | HUBERT HEULOT

Veolia propose à ses responsables syndicaux un parcours de formation à l’IEP de Paris. Une façon de préparer le dialogue social à moyen terme dans le groupe.

Une goutte d’eau dans le budget formation, mais qui ne passe pas inaperçue. Depuis trois ans, le groupe Veolia propose à ses responsables syndicaux de suivre, par groupes de 10 à 12 personnes, une formation annuelle de treize jours à Sciences Po Paris avec la rédaction d’un mémoire final soutenu devant un jury et débouchant sur un certificat. « Cela n’a rien changé aux relations sociales en cours dans l’entreprise. Mais, dans un groupe où le dialogue social est une tradition, c’est un pas de plus dans la reconnaissance des syndicats comme partie prenante de notre performance. Une première marche dans la modernisation de notre dialogue pour construire les diagnostics partagés de demain », juge Olivier Carlat, directeur du développement social et des relations de travail.

Culture économique et sociale

Le parcours certifiant “culture économique et sociale” de Sciences Po a été créé en 2010 par l’association Dialogues, qui s’est fait une spécialité du rapprochement entre directions et organisations syndicales. Il traite d’économie, de syndicalisme, de relations sociales et des nouveaux enjeux dans ces domaines. « Nous avons suggéré de remplacer le décryptage des budgets d’entreprise, que les syndicalistes connaissent par cœur, par l’évolution des contrats de délégation de services publics dans notre secteur », raconte Olivier Carlat.

338 personnes en provenance d’une quinzaine de filiales

Le dispositif est réservé aux syndicats représentatifs (CGT, CFDT, CFE-CGC et FO), qui en ont fait profiter 338 personnes jusqu’ici, principalement des délégués syndicaux, en provenance d’une quinzaine de filiales. Parmi eux, la moitié des 25 représentants au comité central d’entreprise du groupe. « Pour ceux qui travaillent à temps plein sur leur mandat, souvent depuis longtemps, ce parcours à Science Po est une façon de s’autoévaluer, de vérifier s’ils peuvent relever le défi d’une formation supérieure. C’est aussi une valorisation des acquis et même une occasion, pour certains, d’acquérir une nouvelle confiance personnelle en dépassant une histoire marquée par des échecs scolaires », raconte Sylvie Berloquin, secrétaire adjointe du comité d’entre­prise de Veolia Environnement SA, le siège du groupe, où elle est aussi déléguée du personnel et membre du CHSCT. Elle fait partie de la deuxième promotion “Sciences Po” de Veolia Environnement qui a commencé ses travaux le 6 juin dernier.

Hervé de Roubaix, délégué central Europe pour la CFDT à Veolia Environnement, a suivi le parcours de l’IEP parisien et en sort ravi : « La qualité des professeurs permet d’élever votre niveau de réflexion et de débat. » Pour lui, une certaine insuffisance syndicale trouve là un palliatif. « Nous ne sommes plus assez formés par nos organisations syndicales aux niveaux de responsabilité qui sont les nôtres. Quand on négocie avec le Pdg d’un groupe employant 350 000 personnes, il faut être capable de lui répondre par des contre-propositions crédibles. C’est parfois difficile. »

Pour lui, le groupe Veolia a lui-même intérêt à cette élévation des compétences : « À un certain moment, on a les interlocuteurs qu’on mérite. Soit on conserve en face de soi des interlocuteurs stagnant dans leurs compétences et leur parcours professionnel et qui n’auront pas de débat neutre et objectif, soit on procure aux syndicalistes le moyen d’être d’autant plus constructifs dans leurs fonctions qu’ils ne seront pas bloqués dans leur évolution professionnelle. »

Retour au travail des représentants syndicaux

Olivier Carlat est conscient de ce besoin: « Il nous faut des entretiens de carrière et des bilans de compétences effectués par des cabinets extérieurs. Souvent, les responsables syndicaux envisagent une reconversion dans les directions de ressources humaines. Les postes de DRH ne suffiront pas. Mais il y a une quantité de métiers ailleurs, par exemple dans les services de qualité pour les anciens délégués au CHSCT, qu’il s’agit d’ouvrir aux syndicalistes. »

Un accord d’entreprise sur le sujet signé en 2010 existe déjà à Veolia Environnement. Consacré à la qualité et au développement du dialogue social, le texte porte sur le retour au travail des représentants syndicaux, ce qui peut faciliter le renouvellement des générations parmi les syndicalistes. Hervé de Roubaix s’empresse déjà de faire valoir cette possibilité d’un parcours de formation à Science Po pour préparer la relève de la CFDT parmi les plus jeunes : « Ceux de la génération Y ont besoin de ce genre de gratifications et de garanties de développement de leur carrière pour s’engager dans l’action syndicale. » Or, pour le moment, les plus jeunes, perçoivent le syndicalisme comme une voie de garage.

En attendant, à travers la formation des syndicalistes à Sciences Po, Veolia adresse un message à son management. « La direction leur rappelle l’importance qu’elle accorde aux représentants syndicaux, et qu’un dialogue de qualité avec eux, condition d’une performance économique, se construit aussi dans le temps », indique Olivier Carlat.

Auteur

  • HUBERT HEULOT