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Enjeux

Erreurs de jugement

Enjeux | LA CHRONIQUE DE MERYEM LE SAGET, CONSEIL EN ENTREPRISES À PARIS. <> | publié le : 27.08.2013 |

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Erreurs de jugement

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On aimerait évaluer les situations avec justesse et décider sans se tromper. Ce serait sans compter avec les distorsions courantes de notre jugement.

En premier lieu se trouvent nos convictions. Si nous pensons qu’une personne n’est pas intéressante, tout ce qu’elle va dire sera minimisé. L’expérience a été faite cent fois. Vous considérez une personne A comme inintéressante, et une deuxième B au contraire comme brillante. On pose la même question aux deux personnes dans une pièce d’à côté et les réponses vous sont transmises par écrit. Vous savez qui a répondu quoi. Naturellement, vous trouvez que vos convictions se confirment. La personne A donne des réponses banales et sans intérêt, alors que B est nettement plus pertinente. On reproduit l’expérience avec une nouvelle question, mais on inverse les réponses à votre insu. Vous continuez de penser qu’il y a quelque chose de très intéressant dans ce que dit A (qui est en fait B), alors que B ne vous mobilise toujours pas. Cette expérience souligne bien les filtres qui nous accompagnent en permanence : est-on capable de s’ouvrir et d’écouter quelqu’un sans être pollué par le jugement que l’on porte sur la personne ?

Il y a bien d’autres biais. Le besoin de cohérence par exemple, qui nous fait reconstruire une histoire à notre façon parce que la vraie situation ne nous semblait pas logique. Sans s’en rendre compte, on élimine les détails qui ne conviennent pas. C’est ce qui fait que deux témoins d’une même scène dans la rue ne racontent pas la même version des faits. Chacun a instantanément construit une logique qui lui semble acceptable.

Nous avons aussi envie d’avoir raison. Si je lance un nouveau produit, j’imagine qu’il va être formidable. Si les clients ne se précipitent pas, je vais expliquer à mes proches que mon produit est sans doute en avance sur son marché, mais je ne douterai pas de l’excellence de mon idée. Au point même de m’entêter et de continuer à perdre beaucoup d’argent alors que la sagesse devrait me conseiller d’arrêter les frais. Pour éviter ce piège, le célèbre homme d’affaires Warren Buffett prône la méthode de « récusation des théories préférées ». Ainsi, au lieu de chercher autour de soi des signes de renforcement qui prouvent que l’on a raison, en traitant les contre-exemples comme des détails insignifiants, il suggère plutôt d’analyser toutes les raisons qui feraient que notre idée n’est pas bonne. Progrès de l’objectivité garantis !

Les effets de groupes peuvent également fausser notre jugement. Dans un tour de table, c’est flagrant. Si trois ou quatre personnes avant nous ont trouvé l’idée du patron très bonne, ce sera difficile de dire « je suis d’un avis différent, je suis davantage dubitatif sur l’effet de cette action sur nos résultats ». Paresse intellectuelle ? Peur de dénoter ? Envie de faire partie du groupe plutôt que de s’isoler ?… Bref, toutes les forces vont se réunir pour me faire tomber dans la “contagion des affects”.

La fatigue est un autre piège fréquent. Quand une personne se sent en panne d’énergie, elle va décider par le biais le plus facile, en évitant l’effort que représente une décision plus circonstanciée. Donc elle dit non, rejette la demande ou la candidature. Parfois, même poser une question en réunion quand on n’est pas sûr d’avoir bien compris semble un effort de trop ! Mais là, en cette rentrée de vacances, on n’a plus d’excuses : c’est sans doute le moment idéal pour repartir d’un bon pied.