Si deux Français sur trois disent appartenir aux classes moyennes, cette catégorie est beaucoup plus floue pour les sociologues et les économistes. Quels critères retenir pour la définir ? La CSP ? Les revenus ? Les valeurs ? Le niveau scolaire ? Les aspirations ? Toutes ces notions à la fois en tant qu’elles peuvent converger ? Mais on peut avoir un niveau scolaire élevé et de faibles revenus ou exercer une profession intermédiaire et ne pas avoir le sentiment d’appartenir aux classes moyennes, etc. La question se complique encore si l’on vise une analyse transnationale. Peut-on vraiment comparer les membres des classes moyennes françaises et américaines ou chinoises, qui n’ont pas les mêmes niveaux d’étude, de revenus, n’exercent pas les mêmes professions, entre autres divergences ? Pourtant, cette catégorie mal définie joue un rôle essentiel quand il s’agit de comparer l’évolution sociale des populations à l’heure de la globalisation, voire, au plan national, quand il s’agit de mesurer l’impact social des orientations économiques comme par exemple l’impact du néolibéralisme. L’auteur, professeur à Sciences Po, tente de préciser les contours de la notion et explique la tendance actuelle à la bipolarisation entre les classes moyennes favorisées qui se “boboïsent” et les classes moyennes inférieures qui se prolétarisent.

La situation française peut se résumer aujourd’hui en quatre termes : effritement de la catégorie, émiettement en sous-groupes distincts, écrasement par le système de protection sociale, reflux des moins favorisés en périphérie urbaine du fait de l’augmentation des coûts de l’habitat en centre-ville. Les classes moyennes n’ont plus la consistance et la cohérence que leur avait données l’époque des Trente Glorieuses.

Les Classes moyennes

Julien Damon, Que sais-je ?, Puf, 128 pages, 9 euros.