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Le CICE : quel capitaine à la manœuvre ?

Enjeux | LA CHRONIQUE JURIDIQUE D’AVOSIAL | publié le : 09.07.2013 |

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Le CICE : quel capitaine à la manœuvre ?

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Le “fameux” crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) a dépassé le stade de l’indifférence du début de l’année pour accéder à un nouvel état d’interrogation, voire d’inquiétude. Pourquoi un tel “cadeau” inquiète-t-il ?

Le CICE peut rapporter 4 % au titre de 2013 (et 6 % pour les années suivantes) des salaires de 75 % à 80 % des salariés en moyenne ! Ce dernier pourcentage dépend largement de la typologie des rémunérations : entrent dans l’assiette du CICE les salaires qui, en principe, ne dépassent pas 2,5 smic (42 907 euros) par an.

Mais, de fait, malgré la publication de commentaires de l’administration rapidement après la publication de la loi (Bofip, 5 février 2013), l’analyse du CICE a pu prendre un peu de retard dans les entreprises, car le dossier dépend de plusieurs directions.

Plusieurs acteurs dans l’entreprise auront des rôles successifs ou concomitants à jouer.

En premier lieu, la direction se saisit de la question de l’utilisation de la somme qui pourrait être ainsi débloquée et du timing prévisionnel. L’entreprise a-t-elle besoin de cash, de trésorerie, de financements… immédiats ou différés ? Le CICE va-t-il permettre d’investir dans du matériel, une campagne publicitaire, une extension de l’activité… ? La quasi-absence de condition liée à son utilisation permet d’adapter largement l’utilisation du CICE aux besoins de l’entreprise.

Cette analyse sera menée avec les départements fiscal et/ou comptable qui vont en assurer la gestion fiscale (proche de celle du crédit d’impôt recherche) et élaborer la documentation qui permettra de justifier de l’utilisation du crédit.

Mais le rôle central doit sans doute être laissé aux départements RH et paye, qui vont avoir la lourde tâche d’évaluer, de calculer, de sécuriser, de déclarer et de justifier le CICE.

Évaluer : les décisions de la direction ne pourront être prises qu’au vu d’une évaluation réaliste du montant du CICE fondée sur des données extraites des bases de l’année 2012 et des hypothèses d’évolution pour l’année 2013.

Calculer : les modalités de calcul sont relativement complexes et doivent être effectuées salarié par salarié. Ainsi, s’agissant des salariés pris en compte : en principe, tous les salariés sont éligibles au CICE. Toutefois, certains cas particuliers doivent être examinés : les apprentis, les salariés sous contrats de professionnalisation ou bénéficiant de contrats aidés, les salariés mis à disposition d’une autre entreprise, les salariés détachés à l’étranger…

De même, si le principe relatif à l’assiette du CICE semble clair – il s’agit des rémunérations brutes définies à l’article L . 242-1 du Code de la sécurité sociale (rémunérations soumises à cotisations sociales) –, de nombreuses questions se posent sur les heures supplémentaires et complémentaires, les indemnités de rupture du contrat partiellement exonérées, les frais professionnels et abattements…

Enfin, le montant du plafond de 2,5 smic n’est pas fixe, mais varie pour chaque salarié en fonction du nombre d’heures supplémentaires et complémentaires effectuées, de la durée du travail…

Sécuriser le montant du CICE : en modifiant les paramètres de calcul de la paye et en anticipant l’impact de redressements Urssaf potentiels par un audit social complet et la mise en place d’actions correctives si nécessaire. Mais justifier aussi l’utilisation du CICE au regard notamment des institutions représentatives du personnel. En effet, la loi sur la sécurisation, qui devrait être publiée de façon imminente, prévoit une consultation annuelle sur ce sujet.

Déclarer : à compter du mois de juillet, les entreprises doivent compléter leur déclaration mensuelle ou trimestrielle de cotisations sociales, des données sur l’assiette du CICE. Cette déclaration conditionne le bénéficie du CICE.

L’entreprise doit donc se préoccuper rapidement du sujet pour être prête à le déclarer. Mais la grande nouveauté de ce crédit d’impôt réside sans nul doute dans la possibilité de céder ou nantir la créance future de CICE, c’est-à-dire avant même imputation sur l’impôt dû au titre de l’exercice correspondant, permettant ainsi aux entreprises d’obtenir un financement dès 2013.

En conclusion, le CICE peut finalement être géré comme un véritable projet transversal d’entreprise et son analyse menée dès maintenant !

Marie-Pascale Piot et Anne-Elisabeth Combes, du cabinet Ernst & Young Société d’Avocats, membre d’Avosial, le syndicat des avocats en droit social.