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Enquête

EXTERNALISER LA FORMATION : JUSQU’OÙ ?

Enquête | publié le : 02.07.2013 | LAURENT GÉRARD

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EXTERNALISER LA FORMATION : JUSQU’OÙ ?

Crédit photo LAURENT GÉRARD

L’externalisation de la gestion administrative, financière et pédagogique de la formation chez un prestataire privé n’est pas encore chose banale pour les entreprises françaises, mais la tendance se développe doucement. À l’avenir, ce marché pourrait se partager entre prestataires privés et Opca, selon la taille et la stratégie des entreprises.

Où en est le marché de l’externalisation de la formation professionnelle (gestion, logistique, relations avec les Opca et les prestataires pédagogiques…) ? La réponse n’est pas évidente, car plusieurs faits sont contradictoires. Mais il est clair que son développement n’est pas comparable à celui de la paie ou de la comptabilité. La formation professionnelle est adepte d’une double forme d’externalisation. La gestion financière, et parfois administrative, est déjà largement externalisée auprès des collecteurs de fonds (Opca). De même, nombre d’actes pédagogiques réalisés en entreprise le sont via des intervenants externes. Dans ces conditions, qu’externaliser de plus ? Jusqu’où ? Et avec quels objectifs ?

Le cran au-dessus, c’est l’externalisation d’autres prérogatives : pilotage des relations avec les prestataires de formation et vérification de leur respect des cahiers des charges ; pilotage de la logistique ; planification des sessions ; centralisation des attestations de présence, des factures et des dossiers d’évaluation ; vérification des tarifs facturés ; aide à la rédaction de cahiers des charges, au dépouillement et à la présélection d’appels d’offres ; voire aide à l’ingénierie et à l’analyse des besoins… Autant de motivations qui se retrouvent dans les choix des entreprises qui témoignent dans ce dossier.

Faire mieux avec le même budget

« Au bout de sept ans d’externalisation, le scepticisme du départ a totalement disparu », juge Michaël Vautier, DRH du groupe cimentier Italcementi France-Belgique (lire p. 26). « En moins d’un an, l’ensemble du processus du plan de formation a été externalisé, sauf le recueil des besoins », explique Frédéric Brouard, responsable RH de Covidien (lire p. 23).

Maëlle Chouadra, RRH de Chassis Brakes International, constate, quant à elle, que lors du premier bilan de l’externalisation, « nous avons conservé le même taux de départ en formation qu’avant. À l’avenir, nous espérons même pouvoir faire mieux, avec le même budget » (lire p. 25). Quant à la responsable formation de Clear Channel France, Martine Bouquin, elle estime que « l’externalisation permet de se recentrer sur son cœur de métier : faire de la formation un levier de développement de l’entreprise ». Et Nicolas Fournier, responsable du service formation de Monoprix, apprécie de « solliciter un expert pour des prestations très spécifiques, à forte valeur ajoutée ».

Les entreprises qui externalisent se disent satisfaites du service rendu, et leurs prestataires d’externalisation respectifs (Demos Outsourcing, Place de la Formation, Cimes, Develop’Invest, Exfor…) assurent continuer à se développer et à convaincre de nouveaux clients. Pourtant, il reste une incertitude sur l’existence d’un modèle économique idéal et pérenne : au cours des années passées, nombre de ces “externalisateurs” ont dû souscrire plusieurs augmentations de capital auprès de leurs actionnaires, en attendant que le marché se révèle totalement clair et profitable.

Des cibles de marché différentes

Aujourd’hui, certains prestataires publient des résultats, d’autres pas, et des organismes n’en ont jamais publié. Ils n’ont pas à l’origine la même clé d’entrée sur le marché (courtier, gestionnaire, conseil, etc.), mais tous tendent à présenter une gamme de plus en plus étendue de services pour l’ensemble du processus de formation. Leur cible de marché semble les différencier. Par exemple, plutôt le CAC 40 et le SB 120 pour Cimes, clairement le midmarket des entreprises de 300 à 5 000 salariés pour Develop’Invest… Toutefois, il est incontestable que, depuis deux ans, nombre d’autres acteurs (Berlan, Merlane, CSRH, Formastreet…) ayant voulu lancer ou développer leur marché d’externalisation ont connu de sévères déconvenues, certains ayant définitivement jeté l’éponge.

Une poignée de prestataires

À en croire le consultant Philippe Yana qui, par deux fois, a tenté l’expérience sans succès (avec Ecofor il y a plus de vingt ans et récemment avec CSRH), l’externalisation de la formation serait un « faux marché » (lire p. 26). Selon lui, le chiffre d’affaires totalisé des prestataires spécialisés cités ci-dessus avoisinerait les 20 millions d’euros, sur un marché qu’il estime à un maximum de 100 millions d’euros. À terme, ajoute-t-il, l’externalisation passera par les Opca pour les petites et moyennes entreprises, et par une poignée de prestataires spécialisés pour les grandes entreprises.

L’ESSENTIEL

1 Les entreprises qui externalisent tout ou partie de leur processus de formation auprès d’un prestataire privé apprécient le service rendu et le professionnalisme offert.

2 Nombre de cabinets qui ont tenté de se positionner sur ce marché ont cependant connu de sévères déconvenues, le modèle économique de l’externalisation n’étant pas stabilisé.

3 Les Opca, aujourd’hui interlocuteurs des prestataires d’externalisation au nom de leurs entreprises clientes, pourraient devenir demain leurs concurrents.

Auteur

  • LAURENT GÉRARD