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L’âge n’est plus la question

Actualités | publié le : 18.06.2013 | HÉLÈNE TRUFFAUT

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Une meilleure prise en compte des aspirations des seniors depuis 2010

Crédit photo HÉLÈNE TRUFFAUT

La dernière enquête de Cegos sur les 50-65 ans en entreprise montre que cette population est globalement composée de salariés performants, en quête de reconnaissance et partageant les mêmes préoccupations que leurs cadets. Mais sans illusions sur leurs possibilités d’évolution.

« Un virage à 180° sur un temps très court » : c’est le constat de Jacques Coquerel, président du groupe Cegos, sur la perception des 50-65 ans dans l’entreprise à l’issue de la présentation de l’enquête sur les seniors et les relations intergénérationnelles au travail*, le 12 juin. De fait, le spécialiste de la formation professionnelle s’était déjà penché en 2010 sur la situation des plus de 50 ans. Et, à l’épo ? que, « on parlait de choc démographique. Le senior était un actif vieillissant », plutôt mal perçu par les jeunes qui guignaient son poste. Bref, « c’était un vrai problème. Aujourd’hui, tout va bien. Du côté des DRH, c’est le soulagement », considère-t-il.

Accords et plans d’action seniors

Pour les seniors, les choses semblent effectivement s’arranger, même s’il y a encore des motifs d’insatisfaction (et une grande marge de progression pour les DRH). Effets des accords et plans d’action seniors ? 41 % des salariés âgés de 50 à 65 ans interrogés cette année estiment que leur entreprise a pris en compte leurs aspirations concernant leurs conditions de vie au travail – c’est aussi l’opinion de 68 % des DRH. En 2010, ils n’étaient que 26 %. Seule la possibilité de bénéficier d’une mobilité professionnelle est en net repli (voir graphe ci-contre). Signe, peut-être, d’une frustration liée aux attentes (non concrétisées) que génère l’entretien de 2e partie de carrière…

Plus des trois quarts des seniors se disent néanmoins attachés à leur entreprise actuelle et reconnus comme performants dans leur emploi. Un avis partagé par les DRH. Selon ces derniers, les actions mises en place dans le cadre des politiques seniors ont permis d’améliorer sensiblement le maintien des expertises clés (57 %), l’égalité des chances dans les processus RH (56 %) et les conditions de travail des seniors (52 %).

Accords de compétitivité

L’attachement à l’entreprise est-il aussi un effet de la crise ? Interrogés sur les accords de compétitivité, 47 % des seniors seraient prêts à a accepter un emploi avec un niveau de qualification inférieur si leur employabilité était menacée (le taux monte à 53 % pour les 50-57 ans). Et 27 % pourraient éventuellement s’accommoder d’une rémunération inférieure. Ces mêmes seniors placent pourtant en tête des risques majeurs pour leur avenir l’absence d’augmentation et d’évolution professionnelle (cités par 37 % des sondés) devant la perte d’emploi (28 %).

Sans surprise, l’allongement de la vie au travail – et les problèmes inhérents, dont la prévention des risques liés aux conditions de travail (voir graphe ci-contre) – préoccupe les DRH. Mais, pour 80 % d’entre eux, cette situation peut aussi permettre la transmission des savoir-faire métier liés à l’expérience. S’ils pensent en majorité que les seniors sont détenteurs de compétences cœur de métier déjà bien partagées, 31 % admettent que leurs salariés de plus de 50 ans possèdent des compétences clés. Ils ne sont que 10 % à les classer sur un champ de compétences obsolètes ou vouées à disparaître à moyen terme.

Comme en 2010, la reconnaissance de leurs compétences et de leur performance reste d’ailleurs la première attente des tempes grises (41 %), devant la progression de carrière (26 %), la reconnaissance et le partage de leur expertise (23 %). Mais les aspirations diffèrent selon les tranches d’âge : les 58-65 ans sont, de fait, trois fois moins nombreux que les 50-57 ans (en pleine 2e partie de carrière) à espérer une progression. Les plus âgés sont aussi un peu plus enclins à vouloir partager leur expertise. Problème : si 84 % des seniors interrogés souhaitent évoluer (87 % des jeunes seniors, 71 % des plus âgés), ils sont plus de la moitié (54 %) à penser que cela ne sera pas possible !

Un concept flou pour des réalités diverses

Pour Annick Cohen-Haegel, manager du pôle capital humain à Cegos, les fortes attentes de cette population « doivent être prises en compte par les managers ». Mais elle estime également que le mot « senior » est un « concept flou qui recouvre des réalités différentes ». D’où la difficulté de structurer une politique RH autour de cette notion. « Au regard de la problématique senior, la question de l’âge n’est plus une clé d’entrée pertinente », expose Virginie Loye, responsable des formations ressources humaines à Cegos. Qui prône une approche par les compétences.

Quant au contrat de génération, il ne suscite guère l’enthousiasme : 32 % des DRH pensent qu’il n’est pas une solution pour favoriser l’emploi des jeunes et des seniors. Près de 40 % de ces deux populations et un quart des DRH y voient « un beau concept », qui aura un « impact limité ». Ce nouveau dispositif soulève, du reste, de nouvelles difficultés pour la fonction RH. 57 % des responsables interrogés citent une perte de lisibilité liée à la multiplication des accords (pénibilité, seniors, GPEC), 48 %, la complexité administrative et juridique. Le tout sur fond d’incertitudes sur l’avenir (44 %) et de difficultés économiques (31 %).

Transfert des savoirs

Dans les entreprises concernées par la signature d’un accord collectif, les DRH sont néanmoins 55 % à penser que cela va permettre de favoriser le transfert des savoirs et des compétences clés au sein de l’organisation, et 36 % à y voir l’occasion d’améliorer la coopération intergénérationnelle. Du pain sur la planche en perspective : 59 % des seniors n’ont jamais exercé de mission de tutorat. Et ils sont presque autant à vouloir se lancer. Mais, concrètement, un DRH sur deux compte poursuivre les politiques seniors déjà engagées, un sur quatre veillera à la mise en œuvre et au suivi de celles-ci. Pour 23 % des DRH, ce nouvel accord sera juste une reprise des dispositifs existants.

* Enquête menée entre fin mars et début avril 2013 auprès de 527 seniors de 50 à 65 ans, de 555 jeunes de 20 à 30 ans et de 115 DRH et RRH.

JEUNES ET SENIORS : MÊME COMBAT

Les conflits générationnels en entreprise ? « Un faux débat », considère le groupe Cegos, qui, dans son enquête seniors 2013, a croisé les regards des premiers intéressés et des DRH avec ceux des jeunes. Premier constat : les 50-65 ans et les 20-30 ans font face à la même impérieuse nécessité : gagner de l’argent. Pour ces deux populations, la recherche de l’épanouissement personnel dans le travail n’arrive qu’en 2e position, loin derrière. Du coup, la retraite est, pour les aînés, autant synonyme de baisse de revenu que de liberté…

Sur le terrain, les relations entre jeunes et seniors ne posent pas de problèmes pour 92 % des DRH, 82 % des seniors et 72 % des jeunes – lesquels ne s’entendent d’ailleurs pas tous sur l’âge de la séniorité, 44 % plaçant la borne à 50 ans. Certes, des tensions existent : si 53 % des seniors apprécient le dynamisme des jeunes générations, ceux qui rencontrent des difficultés avec elles les attribuent surtout à un manque de courtoisie et de savoir-vivre (68 %), devant un manque d’engagement dans le travail (54 %).

Pour leur part, les jeunes considèrent à 77 % que les seniors ne sont pas toujours à l’aise avec les nouvelles technologies (73 % des DRH, mais seulement 22 % des seniors sont de cet avis) ; à 61 % qu’ils ont du mal à s’adapter aux changement et à 44 % qu’ils éprouvent un sentiment d’usure et de lassitude. Des représentations largement battues en brèche par les premiers intéressés, à qui leurs cadets reconnaissent volontiers quelques atouts, dont la capacité à résoudre rapidement les problèmes (75 %) et la prise de recul sur les situations d’urgence (54 %).

H. T.

Auteur

  • HÉLÈNE TRUFFAUT