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MarocL’OFFICE CHÉRIFIEN DES PHOSPHATES CONTRAINT D’ÊTRE UNE ENTREPRISE CITOYENNE

Pratiques | International | publié le : 21.05.2013 | ISABELLE ARBONA

Confronté au chômage des jeunes là où il est implanté, et sous la pression de la rue, l’Office chérifien des phosphates (OCP) poursuit depuis 2011 un ambitieux programme d’embauches et de formation.

Mars 2011, Khouribga, dans le centre du Maroc. La région, principale réserve de phosphates au monde, s’embrase. Les émeutes font plus d’une centaine de blessés. À Benguerir, Laayoune, Youssoufia et Sétif, les autres régions productrices de phosphates, les tensions sont également perceptibles. Le taux de chômage élevé des populations et la mono-activité y poussent les jeunes à la révolte. Beaucoup sont des petits-enfants ou enfants de retraités de l’Office chérifien des phosphates (OCP), principal employeur local. Avec 19 000 salariés et un chiffre d’affaires de 5 milliards d’euros, l’OCP, premier exportateur mondial de phosphate, est le joyau économique du royaume.

Accélération des projets

Sous l’effet du printemps arabe qui a déjà touché la Tunisie et l’Égypte, ces jeunes prennent à parti l’entreprise et réclament un emploi. C’est dans ce contexte qu’un ambitieux plan de recrutement et d’aide au développement des compétences est bâti. OCP Skills prévoit le recrutement de 5 800 personnes, la formation de 15 000 jeunes à des métiers d’avenir et le soutien aux porteurs d’un projet de création d’entreprise. « Le programme s’articule avec la stratégie de développement du groupe, dont les capacités de production doivent doubler d’ici à 2017. Les événements de mars 2011 nous ont poussés à accélérer les projets en cours », assure Abdelhadi Sohib, responsable d’OCP Skills.

L’attente est très forte : en l’espace de quelques semaines, près de 90 000 candidatures affluent ! Priorité est donnée à ceux qui ont un lien avec l’OCP, qu’ils soient riverains des zones d’exploitation ou descendants de mineurs. Selon le responsable d’OCP Skills, il y a bien sûr eu des déçus, ceux qui ont été écartés du processus, mais par la suite, pas de mouvement contestataire, car très vite, « les jeunes ont reconnu que l’on faisait quelque chose pour eux ».

L’entreprise a misé sur le Web et les réseaux sociaux. Les candidats sélectionnés pour un emploi, le financement d’un cursus de formation ou le soutien à la création d’entreprise disposent d’un espace personnalisé sur le site Internet d’OCP Skills. Une ligne téléphonique d’assistance a été mise en place, et Facebook se révèle un précieux allié pour informer et rassurer les candidats.

Avant d’être intégrées au sein de l’entreprise, les recrues sont envoyées auprès de différentes ONG pour une mission de courte durée : « Nous recrutions des personnes qui faisaient valoir un droit à l’emploi. La formation d’intégration et ce passage préalable en ONG étaient nécessaires », explique Abdelhadi Sohib.

Formation à des métiers d’avenir

L’autre volet d’OCP Skills réside dans la formation de 15 000 jeunes à des métiers d’avenir. Les secteurs choisis correspondent à ceux de la stratégie de développement du Royaume répertoriés dans le plan national Émergence. Âgées de 16 à 35 ans, les bénéficiaires, après voir suivi des ateliers et fait valoir leurs souhaits, sont dirigés vers des formations qualifiantes dont la durée va de trois mois à trois ans. Actuellement, 10 600 jeunes sont inscrits dans 285 filières. L’OCP ajoute aux formations existantes un cursus centré sur les softs skills (coaching, formation à la technique de recherche d’emploi, connaissance de l’entreprise, etc.). Il finance une partie des formations et attribue des bourses d’études.

Le système d’aide à la création d’entreprise est également en place : 300 projets ont été accompagnés et 76 entreprises sont en activité. L’OCP fournit une aide au démarrage de 1 800 euros et un accompagnement dans la présentation du projet aux partenaires financiers.

Le premier volet de ce programme a représenté un investissement de 35 millions d’euros. Le prix à payer pour éteindre l’incendie social ? Force est de constater que, deux ans après les émeutes de mars 2011, il n’y a plus eu de tensions majeures.

Auteur

  • ISABELLE ARBONA