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La SNCF ouvre un guichet pour les entreprises en difficulté

Pratiques | publié le : 21.05.2013 | DOMITILLE ARRIVET

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La SNCF ouvre un guichet pour les entreprises en difficulté

Crédit photo DOMITILLE ARRIVET

Pour aider au reclassement de leurs salariés, des DRH de grandes entreprises qui ont prévu de réduire leurs effectifs ont frappé à la porte de la SNCF, où les besoins en main-d’œuvre sont importants. Le transporteur a répondu avec bienveillance, et des partenariats ont été conclus avec plusieurs groupes de secteurs très différents, comme PSA ou Air France.

C’est la rançon de sa bonne santé : en annonçant fin 2012 que la SNCF allait recruter 6 000 personnes cette année – et 10 000 pour les quatre ans à venir dans l’ensemble du groupe – Guillaume Pepy, son président, a aussitôt attisé l’intérêt d’entreprises engagées dans des réductions d’effectifs ou soucieuses de les anticiper. Ainsi, coup sur coup, Air France, Renault, PSA, puis Presstalis se sont précipités pour “vendre” leurs salariés auprès des hautes instances de la direction de la SNCF, dans l’espoir d’alléger leur facture sociale. L’entreprise, soucieuse de tenir son rang en matière d’engagement sociétal, s’est alors fait un devoir de répondre à l’appel à l’aide de ses consœurs en difficulté, en leur promettant de leur ouvrir ses postes.

« Ce qui fonde nos accords, c’est un pari gagnant-gagnant, explique Vincent Renet, le responsable de la politique de recrutement à la SNCF. On part du principe que ces entreprises aux côtés desquelles nous nous engageons disposent de compétences transférables. Dans chacun des cas, le principe de base est de faire correspondre les descriptifs de postes des deux sociétés et de favoriser la transmission des candidatures adaptées à nos besoins. Mais chaque arrangement a été mené selon une trame souple, adaptée aux besoins de chaque société. Le degré de pression n’est pas le même selon les entreprises. »

La série a commencé en novembre 2012 avec Air France, qui a sollicité la SNCF dans le cadre de son plan Transform 2015 engagé début 2012, qui vise à réaliser en trois ans 2 milliards d’euros d’économies, notamment en supprimant 5 122 postes d’ici à fin 2013 – « sans départs contraints », précise l’entreprise. « Nous avons identifié des rapprochements possibles pour nos postes de personnel de maintenance ou d’escale. D’autres sont envisagés pour les cadres et les fonctions supports dans les domaines de la finance, du juridique ou des achats. Ces métiers ne sont pas différents à la SNCF et à Air France », estime Vincent Renet.

Pour se faire connaître des candidats potentiels, la SNCF a participé à cinq forums interentreprises (en compagnie d’autres entreprises, comme Airbus ou Safran) organisés par Air France sur ses sites de Roissy, Orly, Lyon, Marseille et Nice. « Ces rencontres nous ont permis d’étudier 70 candidatures de cadres et une cinquantaine de non-cadres », précise le responsable du recrutement.

Mais la SNCF a aussi suscité l’intérêt des fleurons de l’économie française, y compris en dehors du transport. Ainsi, fin 2012, PSA puis Renault se sont présentés au guichet de l’entreprise ferroviaire. Avec cependant des points de départ différents. Alors que PSA prend les devants de la fermeture annoncée de l’usine d’Aulnay-sous-Bois en 2014, Renault inscrit sa démarche dans le déploiement de son accord compétitivité scellé mi-mars, qui prévoit notamment le non-remplacement de 7 500 postes à l’horizon 2016. Là, pas de plan social mais une forte incitation à la mobilité, via la GPEC.

Dans ce cadre, la convention de partenariat signée en décembre 2012 entre François Nogué, le DRH de la SNCF, et son alter ego chez Renault, prévoit notamment la présence des offres d’emploi de la SNCF sur le site emploi du constructeur automobile ainsi que sa participation à trois forums interprofessionnels. « Depuis début mars, nous présentons également la SNCF dans les espaces emploi-compétences que nous avons déployés sur nos sites. Qu’ils soient ingénieurs, techniciens, opérateurs de tous niveaux, et ce, dans la majorité des régions, nos salariés peuvent répondre aux postes que propose la SNCF », estime Maximilien Fleury, le responsable emploi en France de Renault. Il ne doute pas de recevoir un accueil favorable : « Les salariés ont bien conscience du contexte difficile de notre secteur et de la nécessité de mobilité. Ils comprennent que la grille de salaires n’est pas la seule chose qui compte et qu’intégrer une entreprise qui rassure, qui sécurise les emplois, représente aussi des avantages importants. »

Adapter les qualifications

Pendant ce temps, PSA a fait les choses en grand. Depuis mi-février, le constructeur automobile a construit avec l’Afpa un dispositif de formation destiné à adapter les qualifications des salariés de l’usine d’Aulnay qui le souhaitent aux besoins de trois entreprises : la SNCF, la RATP et Aéroports de Paris. Chacune a réservé une centaine de postes à ces cols bleus qu’ils prérecruteront s’ils acceptent une reconversion vers leurs métiers (lire l’encadré p. 15). « L’enjeu est de réussir le passage vers un nouveau projet, un nouvel avenir, une nouvelle voie. La clé de la réussite réside dans la psychologie du changement », estime Franck Bernard, directeur du projet industriel à PSA.

En complément, PSA a signé officiellement avec la SNCF un contrat de méthode dans lequel les deux partenaires définissent aussi les autres compétences dont la SNCF a besoin, et celles mises à disposition par PSA. « Pour tous les types de postes, et sans engagement de nombre, cette fois, précise Vincent Renet. Nous allons les recruter au fil de l’eau, mais sans réserver des postes, car ce rapprochement vise avant tout à satisfaire nos besoins en recrutement. »

Mi-mars, en prévision d’un plan de restructuration avant l’été qui conduirait à la suppression de plusieurs centaines de postes à l’horizon 2015, le distributeur de journaux Presstalis toquait à la même porte. « La SNCF a une certaine attractivité en termes d’image et de métiers. Nos salariés se sentiront valorisés si on leur propose des postes qui leur permettront de choisir plutôt que de subir », confie Michel Casciani, le DRH du groupe.

Dans son panier, des personnes des fonctions supports du siège à Paris, des opérateurs qui connaissent la préparation et la logistique dans les entrepôts de presse de province, et une poignée de spécialistes de la maintenance, dont les compétences en électromécanique pourraient intéresser les équipes du matériel roulant à la SNCF. Le processus, qui n’est pas encore formalisé par une convention, permet d’ores et déjà à la direction de faire bonne figure auprès des organisations syndicales de Presstalis, très mobilisées contre le projet de restructuration.

Malgré l’abondance des sollicitations de ses entreprises partenaires, la SNCF reste modeste sur l’effet produit par cette collaboration. Tout au plus, elle confie qu’elle espère s’attirer les compétences de quelques perles rares qui devront, pour certains d’entre eux, accepter mobilité géographique et rémunération moins confortable. « On rapproche des malades d’un groupe qui est bien portant et qui a de larges capacités d’accueil. Nous faisons un effort pour eux, nous ouvrons nos portes. Mais à la fin, la balle est dans le camp des salariés », nuance Vincent Renet.

L’ESSENTIEL

1 La SNCF va recruter 10 000 personnes dans les quatre ans à venir.

2 Elle a passé plusieurs partenariats avec des groupes confrontés, eux, à des réductions d’effectifs, et dont les profils des salariés peuvent correspondre à ses besoins.

3 Si ces démarches privilégient la participation à des forums de recrutement ou la transmission des offres d’emploi, la SNCF a aussi élaboré un plan de reconversion pour 100 salariés de PSA Aulnay.

Un plan de reconversion avec PSA

Pour préparer au mieux le reclassement des salariés de l’usine d’Aulnay-sous-Bois, PSA a mis en place un dispositif offensif : au lieu de la méthode classique qui consiste à délivrer une formation puis à laisser les salariés chercher un emploi, le partenariat établi entre le groupe automobile et trois entreprises (SNCF, Aéroports de Paris et RATP) vise à prérecruter les salariés volontaires, puis à les former pour adapter leurs compétences à celles requises par les recruteurs. Ainsi, 300 salariés candidats à ces contrats de reclassement bénéficieront d’une formation délivrée par l’Afpa à Aulnay-sous-Bois. Parmi les parcours possibles : 231 heures de formation (notions en électricité, gestes de bases en mécanique…) pour devenir opérateur signalisation électrique à la SNCF, ou 385 heures d’enseignement (Code de la route, manœuvres, secourisme…), pour s’orienter vers le métier de chauffeur d’autobus à la RATP.

Auteur

  • DOMITILLE ARRIVET