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LE RENDEZ-VOUS DE LA FORMATION

Les branches plébiscitées

LE RENDEZ-VOUS DE LA FORMATION | Éditorial | publié le : 21.05.2013 | LAURENT GÉRARD

Ironie de l’histoire : à la question « quel est l’acteur le plus apte à piloter la formation professionnelle continue en France ? », la réponse numéro 1 des 993 Français représentatifs de la population âgés de 18 ans et plus interrogés par l’Ifop du 12 au 15 avril 2013 à l’occasion d’un sondage pour Acteurs publics/Ernst & Young/ Observatoire des politiques publiques, est : les branches professionnelles.

Plus précisément, 44 % des interviewés citent les branches professionnelles, devant l’Afpa (24 %). Les régions (17 % de citations), dont les prérogatives devraient se renforcer à l’occasion de l’acte 3 de la décentralisation, et plus encore l’État (8 %) sont jugés moins aptes à mener cette politique. Pôle emploi (7 % de mentions) n’arrive qu’en dernière position des acteurs cités : « C’est le signe d’un manque de confiance patent de l’opinion à l’égard de cet organisme », commente Damien Philippot, directeur des études politiques au département Opinion et stratégies d’entreprise de l’Ifop.

Une capacité à piloter

Dans le détail, l’institut de sondage observe que ce sont surtout les sympathisants de droite qui mettent en avant l’efficacité potentielle de la gestion par les branches professionnelles (54 % d’évocations), alors que ceux de gauche, « quand bien même ils privilégient eux aussi les acteurs privés ou les associations, font relativement plus confiance aux acteurs institutionnels » (22 % évoquent les régions et 12 % l’État).

Les branches professionnelles, donc. Celles-là mêmes (et leurs Opca, bien sûr) qui, par certains articles de presse écrits à l’emporte-pièce et plusieurs rapports parlementaires ou privés manquant de technicité et de profondeur, sont accusées d’inefficacité, de conservatisme et de corporatisme. Ce sont ces mêmes branches qui sont plébiscitées par les Français dans leur capacité à piloter la formation.

Certes, affirme l’Ifop, les Français portent « un regard sévère sur l’efficacité de la formation professionnelle ». Seules 24 % des personnes interrogées estiment que l’argent est efficacement utilisé. Les plus jeunes (36 % des moins de 35 ans) et les proches de la gauche (34 %) apparaissent comme les moins critiques. Le regard le plus dur est porté par les ouvriers (17 % d’opinion favorable seulement).

Sur quoi est basée cette observation sévère ? Sur leur propre vécu ? C’est possible : ces salariés peuvent être déçus de leur accès à la formation : trop peu, trop espacé. Mais elle provient aussi de l’ambiance générale négative entretenue sur la formation continue. Rares sont les expressions publiques (politiques, médiatiques…) positives, ou disons équilibrées, sur le système français. Depuis longtemps, le ton employé est trop souvent catastrophiste : ça finit par laisser des traces.

D’autres sondages (Cegos, Agefos, Cimes, Opcalia, FFP…) traduisent des avis plus modérés, même s’ils ne nient pas les problèmes. Mais, rétorquent les plus prompts à tout raser, « ces sources citées sont des acteurs du sujet : elles ne sont pas crédibles ». Est-ce à dire qu’être acteur, c’est être forcément menteur ? Rien de sérieux ne peut se construire sur ce genre de point de vue, comme le sous-entend Stéphane Lardy, secrétaire confédéral de FO dans l’interview ci-contre.

Invités à désigner les publics prioritaires de la formation professionnelle, les Français mettent en avant les demandeurs d’emploi (39 %) et les jeunes sans qualification (37 %), qui sont justement les deux catégories visées dans les réformes envisagées par le gouvernement. Les salariés les moins qualifiés (19 %) ou encore ceux de plus de 50 ans (5 %) sont considérés comme moins prioritaires. Mais, à dire vrai, tout le monde a besoin de formation. Y compris les ingénieurs, très diplômés et très consommateurs de formation, qui créeront les produits de demain. Pour l’heure, très prosaïquement, le gouvernement a besoin d’argent pour financer la formation des demandeurs d’emploi et des jeunes : il le prendra certainement dans les Opca et les entreprises.

Auteur

  • LAURENT GÉRARD