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Enquête

« Les accords de méthode sont porteurs de créativité »

Enquête | publié le : 07.05.2013 | ÉLODIE SARFATI

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« Les accords de méthode sont porteurs de créativité »

Crédit photo ÉLODIE SARFATI

E & C : Dans les études que vous avez réalisées sur les accords de méthode*, vous insistez sur la logique d’engagement dont ces accords sont porteurs. Que voulez-vous dire ?

A. J. : Ce qui ressort de l’analyse des accords de méthode, c’est qu’au-delà d’une simple transaction autour de l’aménagement de la procédure d’information et de consultation des instances sur le PSE, ils mobilisent les parties dans un processus de régulation conjointe de la restructuration. Avec, souvent, une forme de créativité. Ainsi, beaucoup de ces accords ont permis de structurer des collectifs paritaires pour prendre en charge la négociation de solutions alternatives, la mise en œuvre des mesures d’accompagnement, etc. Ces groupes de travail, ces commissions de suivi structurent un débat permanent dans l’entreprise autour des questions d’emploi. Chez Bosch, à Vénissieux, c’est un groupe ad hoc, mis en place par un accord de méthode, qui a eu pour mission de préparer la reconversion du site vers le photovoltaïque. Dès lors qu’ils permettent une vraie concertation, ce ne sont donc pas seulement les modalités de la procédure du PSE qui sont modifiées par les accords de méthode, mais bien sa nature.

E & C : Les accords de méthode seraient donc favorables à la qualité du dialogue social ?

A. J. : Oui, car ils renouvellent les jeux d’acteurs. Par ailleurs, ils ont contribué à légitimer l’intervention des syndicats sur un domaine nouveau, celui de la gestion de l’emploi. Pour autant, il ne suffit pas de négocier un accord de méthode pour créer un dialogue social vivace dans l’entreprise. Au contraire : il faut, au préalable, un dialogue dynamique pour qu’un accord de ce type soit possible. C’est pourquoi cela concerne la plupart du temps les grandes entreprises, dans lesquelles les partenaires sociaux ont déjà conclu des accords relatifs à l’emploi : GPEC, mobilité, classifications… En ce sens, il faut relativiser le succès des accords de méthode.

E & C : Quelles en sont les autres limites ?

A. J. : On aurait pu avoir l’espoir, au vu du contenu des premiers accords, qu’ils allaient permettre de généraliser le débat autour des solutions alternatives à la restructuration. Or, ce n’est pas allé très loin, d’autant que, pendant la crise de 2008, beaucoup de syndicats n’y croyaient plus. Et les négociations se sont recentrées sur le montant des indemnités. Aujourd’hui, on est restés dans cette logique, même si la question du volontariat est devenue aussi prégnante. Et puis, d’autres pistes auraient pu être abordées par les accords de méthode, comme la revitalisation du territoire, mais cela est resté marginal. La dimension territoriale reste à explorer.

E & C : Qu’attendez-vous des accords sur les PSE que la loi de sécurisation de l’emploi institue ?

A. J. : Je milite pour renforcer la négociation, pour que le PSE ne soit plus quelque chose qui tombe brutalement dans l’entreprise. Le fait de prévoir des accords majoritaires va renforcer encore l’engagement des parties. Et si les partenaires sociaux ont le souci d’un dialogue social élargi, si les groupes laissent de l’espace à leurs établissements pour cela, on peut espérer que ces accords permettront eux aussi d’ouvrir des pistes innovantes.

* In “L’entreprise en restructuration, dynamiques institutionnelles et mobilisations collectives”, sous la direction d’Annette Jobert et Claude Didry, Presses universitaires de Rennes, 2010.

Auteur

  • ÉLODIE SARFATI