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Le temps de l’apprentissage

Enjeux | LA CHRONIQUE DE MERYEM LE SAGET, CONSEIL EN ENTREPRISES À PARIS. <> | publié le : 30.04.2013 |

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Le temps de l’apprentissage

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On sait bien que le futur demandera de nouvelles compétences, de la réactivité et de la souplesse. Il faudra raisonner différemment, faire face à des réalités nouvelles, bref, apprendre en permanence pour se frayer un chemin dans un monde sans cesse changeant. Pourtant, cette culture de l’apprentissage n’est pas encore la norme dans nos organisations.

Même si les discours évoluent, les dirigeants semblent davantage focalisés sur les résultats que sur le développement du « potentiel à réussir ». Ils préfèrent les investissements qui « produisent du concret » (un bâtiment, un nouvel outil de production, une technologie prometteuse) à ceux qui développent les collaborateurs. Même si l’homme est au centre de la plupart des chartes d’entreprises, encore aujourd’hui, le DRH n’est pas systématiquement membre du comité de direction…

Corollaire de cette façon de penser : en période difficile, on rogne facilement sur les budgets de formation, de coaching ou de tutorat. On remonte les décisions à la tête, comme si la centralisation assurait une meilleure gestion de l’incertitude ! Pourtant, moins il y a de responsabilisation et de délégation dans l’entreprise, moins les personnes développent leur capacité d’apprendre.

Soyons justes, la culture française n’aide pas beaucoup non plus. Individuellement, le salarié a peur de faire des erreurs, il évite de s’interroger sur son action par crainte de paraître faible ou de perdre la face devant les autres. Effectivement, il est plus facile de chercher la faute à l’extérieur (les autres, l’environnement économique, le système, etc.) que de se questionner sur ce que l’on a fait pour produire ce résultat moyennement satisfaisant.

Peu d’entreprises valorisent l’approche par essai/erreur/amélioration. L’expérimentation, qui fait pourtant partie intégrante d’une culture d’apprentissage, n’est pas vraiment développée. Peut-être est-elle encore associée à l’à-peu-près, le mal-fini, le peu professionnel. On préfère les beaux modèles pensés par nos esprits savants. Malheureusement, quand le futur est à ce point non cartographié, l’aspiration à la perfection peut engendrer un immobilisme regrettable.

Il faut beaucoup de force de caractère pour avancer à contre-courant du prêt-à-penser actuel : pour ne pas se complaire dans le cynisme ambiant (rien ne va), dans la critique (c’est nul) ou dans le défaitisme (tous les talents quittent la France). Nos systèmes sont vieux et fatigués, c’est certain. Mais qui donc peut les réinventer, si ce n’est l’ensemble des hommes et des femmes qui ont envie d’explorer et d’apprivoiser ces nouvelles dynamiques en train d’émerger ? Nous sommes peut-être en « panne d’Europe », mais nous sommes surtout collectivement en panne d’imaginaire et de confiance en nos possibilités.

Au fond, derrière ces soubresauts de société, peut-être sommes-nous animés secrètement d’un idéal élevé ; or cette aspiration haute est actuellement mise à mal. Déçus, on se crispe sur une approche tout ou rien : on doute de la valeur de nos initiatives individuelles (une goutte d’eau dans l’océan), on dévalorise nos petits pas (trop insignifiants par rapport aux enjeux). Mais existe-t-il un champion qui refuserait de s’entraîner, d’entrer sur le terrain et d’apprendre ?