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AutricheLA GARANTIE JEUNESSE : UNE MESURE QUI A FAIT SES PREUVES

Pratiques | International | publié le : 23.04.2013 | LUC ANDRÉ

Le programme étendu au niveau européen pour lutter contre le chômage des jeunes trouve sa source d’inspiration en Autriche notamment. Une place y est garantie à chaque apprenti, ainsi qu’un emploi ou une formation aux 19-24 ans.

Il est 7 h 00 quand Milan Gidic accueille sa quinzaine d’apprentis au centre technique de Jugend am Werk (Jeunesse à l’œuvre) à Vienne. Comme dans un vrai garage. Ces futurs mécaniciens n’ont pas trouvé de place en entreprise et ont été affectés dans son institution, financée par l’assurance-chômage (AMS). Ils font partie des quelque 10 000 bénéficiaires de la « garantie apprentissage » (Ausbildungsgarantie) sur un total de 120 000 apprentis. Il s’agit d’une des sources d’inspiration de la garantie jeunesse, dont le principe a été adopté fin février par les ministres européens des Affaires sociales. Sous quatre mois, chaque jeune européen de moins de 25 ans devra recevoir une offre d’emploi ou de formation.

Centres “supra-entreprise”

« L’aspect social est primordial, il faut les préparer au monde du travail », assure le formateur Milan Gidic. La moitié de ses ouailles ont des difficultés linguistiques, sociales ou personnelles. Dans un premier temps, la ponctualité est tout aussi importante que la mécanique. Les apprentis, qui partagent leur temps entre l’atelier, l’école et des stages, touchent entre 300 et 600 euros par mois. Les métiers proposés et les contingents de places sont, dans la tradition autrichienne, négociés pour chaque province par les partenaires sociaux. Introduit à la fin des années 1990, le système est particulièrement prisé dans la capitale et ses environs, où l’industrie recule. Il a été réformé en 2008 pour permettre d’effectuer l’intégralité de la formation (trois ans) dans ces centres “supra-entreprise” (überbetriebliche Einrichtung). Mais ce n’est pas l’objectif. « Nous sommes particulièrement fiers que la moitié de ces apprentis puissent rejoindre une entreprise après un an », se félicite Johannes Kopf, membre du directoire de l’AMS. À plus de 16 000 euros par jeune et par an en moyenne, on comprend pourquoi. « C’est un filet de sécurité, mais la formation doit aussi intervenir dans les entreprises pour être au plus près de leurs besoins », justifie M. Kopf. Plusieurs acteurs dénoncent pourtant la concurrence que ce système parapublic exerce sur l’apprentissage traditionnel en entreprise. « Certaines ont réduit leurs capacités d’accueil d’apprentis », s’inquiète Alfred Freundlinger, responsable formation à la représentation du patronat WKÖ.

Le deuxième étage de la fusée de la garantie jeunesse vise les 19-24 ans à faibles qualifications. L’“Action avenir jeunesse” (Aktion Zukunft Jugend) garantit une formation ou un emploi dans les six mois de l’inscription au chômage.

Incitations financières

Depuis 2009, le dispositif a permis près de 15 000 embauches et 10 000 mesures de qualification dans ce pays de 8,5 millions d’habitants. Les entreprises bénéficient d’incitations financières, comme pour les salariés âgés ou handicapés. Le montant est négocié en direct entre l’assurance-chômage et l’employeur. Il peut atteindre deux tiers des coûts salariaux pour deux ans maximum. « Dans 60 % des cas, les salariés sont conservés après la fin du financement », souligne Johannes Kopf. Il fait valoir que le dynamisme du marché de l’emploi, avec une faible protection contre le licenciement, conditionne la réussite des dispositifs.

Au total, l’Autriche consacre environ 640 millions d’euros par an pour les mesures en direction des 15-25 ans. Avec un certain succès : le pays, doté du plus faible taux de chômage de l’Union européenne (4,8 % selon Eurostat), est en deuxième position pour le chômage des jeunes (8,9 %) derrière l’Allemagne (7,7 %), qui mise comme l’Autriche sur un important système d’apprentissage. Sur ce point précis, Thomas Mayr, directeur du centre de recherches IBW, fondé par le patronat autrichien, veut mettre en garde les Européens : « 80 % des 15-16 ans sont en formation professionnelle », rappelle-t-il. Sans prise en compte de ce « fondement », tenter de dupliquer le modèle autrichien peut réserver de mauvaises surprises.

Auteur

  • LUC ANDRÉ