Les récits de vie de militants syndicalistes, surtout quand ils sont écrits au soir d’une vie vouée au combat, ont en commun leur côté épique sur fond de camaraderies inconditionnelles dans la lutte et de haines féroces contre les ennemis de classe.

Le récit de vie de Joël Biard, d’abord ouvrier électricien puis responsable CGT et membre du parti communiste français, répond si bien aux règles du genre qu’il ferait presque regretter la vie des ouvriers d’antan, pour qui l’action commune paraissait un vrai sacerdoce. Fils d’un ouvrier communiste, petit-fils d’un marin de Terre-Neuve, l’auteur quitte l’école et sa Normandie natale à 15 ans pour devenir apprenti puis ouvrier en région parisienne. C’est à Paris, et surtout en Seine-Saint-Denis, l’un des bastions de l’industrie française durant les Trente Glorieuses, que le goût de la liberté prendra pour lui tout à la fois sens et conscience.

Mais, plus qu’une description quasi romantique de la lutte syndicale, ce livre constitue une chronique très précise de la vie ouvrière sur deux décennies (1968-1990), en des temps où le travail s’est fait à la fois plus humain, physiquement moins éprouvant, et cependant plus déstabilisant du fait des menaces pesant sur l’emploi et de la tendance au délitement des collectifs.

Un livre qui, parallèlement à la description des bouleversements industriels, fait sa place aux bouleversements psychologiques et sociaux qui ont affecté la société française ces dernières décennies.

Un Engagement ouvrier

Joël Biard, Les Éditions de l’Atelier, 272 pages, 20 euros.