Parler de droit social, c’est affirmer que la protection des individus est une exigence incontournable garantie par l’État aux citoyens, au nom de leur humanité même. Cette conception, qui a mis du temps à émerger au fil du 20e siècle, construit le lien social, y compris dans un monde où les liens communautaires et familiaux tendent à se déliter. En faisant de tous ses membres des “ayants droit”, c’est sa propre cohésion que la République défend. Or, à l’heure où le chômage de masse perdure, on assiste à une remise en cause de ce principe de solidarité au nom d’une responsabilisation des chômeurs et des précaires. Il serait normal que ceux-ci trinquent pour leurs turpitudes, puisque coupables d’incompétence, de paresse, voire de malhonnêteté.
La suspicion générale qui concerne “les assistés” tend à dégager la collectivité de ses devoirs à leur endroit, tout en poussant à accepter ceux-ci n’importe quelle activité salariée à n’importe quel prix pour faire la preuve de leur moralité et de leur bonne volonté à vivre d’autre chose que de la charité publique.
Quatre sociologues, dont Robert Castel et Serge Paugam, et une économiste, Hélène Périvier, décryptent l’approche idéologique de la solidarité au fil de l’histoire économique et sociale, notamment dans les dernières décennies. Ils questionnent entre autres la logique du RSA qui, certes, permet à des milliers des personnes de vivoter, mais au prix d’une stigmatisation de la pauvreté. Un éclairage qui devrait contribuer à repenser la solidarité.
L’Avenir de la solidarité
Robert Castel et Nicolas Duvoux, PUF, 112 pages, 8,50 euros.
