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ANI du 11 janvier 2013 : que faut-il en penser ?

Enjeux | LA CHRONIQUE D’AVOSIAL | publié le : 29.01.2013 |

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ANI du 11 janvier 2013 : que faut-il en penser ?

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Ainsi les négociations que le gouvernement appelait de ses vœux ont abouti à un accord auquel peu de gens croyaient à l’origine. Pour y parvenir, contrairement à ce que tentent de faire croire les non-signataires, chaque camp a dû faire des concessions.

Du côté des entreprises, il a fallu renoncer à modifier la définition du motif économique, pourtant totalement inadaptée à leur environnement concurrentiel (que penser en effet d’une conception “défensive” de la compétitivité que les employeurs ne peuvent que sauvegarder lorsqu’ils se réorganisent à l’heure où ils doivent au contraire l’améliorer ?). Du côté des salariés, il a fallu renoncer à sanctionner les licenciements dits “boursiers”, pourtant très médiatiquement relayés.

En définitive, les contempteurs de cet accord oublient qu’un compromis est fait de concessions et que même un mauvais accord vaut mieux qu’un bon procès.

Or l’ANI n’est pas un mauvais accord. Certes, il n’est pas parfait, il n’est pas complet et sa rédaction manque de clarté sur bien des points. Mais chacune des parties a obtenu des avancées parfois significatives, sans compter le gouvernement qui a vu sa stratégie couronnée de succès, à telle enseigne qu’il compte répliquer la méthode sur d’autres thèmes majeurs, notamment ceux ô combien épineux des retraites et de l’assurance chômage.

Si on le lit objectivement, force est de constater que cet accord est équilibré et l’analyse de quelques-unes des mesures contenues ne peut que le démontrer.

Mesures en faveur des salariés. Les partenaires sociaux se sont enfin préoccupé du parcours professionnel des salariés, appréhendé dans sa globalité par la création d’un “compte personnel de formation”, créé dès leur entrée sur le marché du travail et qui va leur permettre de se former tout au long de leur vie professionnelle.

Dans le même esprit, la période de mobilité volontaire sécurisée va leur permettre de découvrir un emploi chez un autre employeur pendant deux ans maximum en ayant l’assurance de retrouver leur emploi d’origine (ou un emploi équivalent) si ce “test” n’est pas concluant.

Très importante aussi pour la lutte contre la précarité, outre la taxation supplémentaire des contrats courts, la disposition prévoyant que, sauf exception, les contrats à temps partiel ne pourront plus être inférieurs à 24 heures hebdomadaires.

Mesures en faveur des demandeurs d’emploi. Les droits à assurance chômage seront dorénavant rechargeables, de manière à ce qu’ils soient conservés et ajoutés à de nouveaux droits en cas d’acceptation puis de perte d’une offre d’emploi. Leurs droits à formation sont également accrus.

Mesures en faveur des entreprises. Confrontées à une crise dont il est urgent de sortir pour réduire le chômage, les entreprises ont obtenu plus de souplesse de gestion de leurs ressources humaines.

Les accords de maintien de l’emploi ont déjà été abondamment commentés, et critiqués. Mais on oublie de rappeler qu’ils ne seront mis en place qu’à la suite d’un accord avec leurs partenaires sociaux (qui pourront se faire assister d’un expert) et à la suite de la production d’informations exhaustives par l’employeur. La cause de ces accords (existence de graves difficultés conjoncturelles) pourra donc être remise en question. Les refus de mobilités internes n’entraîneront plus de licenciement pour motif économique et les PSE sont sécurisés et encadrés dans le temps, ce qui est favorable aux entreprises comme aux salariés.

En contrepartie, l’information des représentants du personnel sur la situation et les perspectives de la société sur trois ans est considérablement renforcée, comme la GPEC.

Dernier point très important, les juridictions devront dorénavant (enfin) justifier des montants des indemnités qu’ils ordonnent en cas de licenciement sans cause réelle ou sérieuse, mettant ainsi fin à une pratique tendant à une “barémisation” des indemnités en fonction de la seule ancienneté du salarié.

Cet accord contient donc des avancées, et il est primordial que le législateur modifie le Code du travail en conséquence. Quant aux partenaires sociaux, ils devront poursuivre leur ambitieux travail de réforme sur d’autres sujets pour agir en profondeur sur les relations sociales. Le travail ne fait que commencer…

Étienne Pujol, avocat à Granrut, membre d’Avosial, le syndicat des avocats en droit social.